
(RV) Le Pape François a célébré la messe de Pentecôte ce dimanche 4 juin place
Saint-Pierre au Vatican, devant des milliers de fidèles. Sous le soleil romain, le
Saint-Père a rappelé le sens de cette fête, cinquante jours après Pâques. L’Esprit
Saint qui est descendu sur les apôtres ce jour-là est l’Esprit créateur qui «réalise
toujours des choses nouvelles». Ainsi, deux nouveautés ressortent de ces lectures
de la Pentecôte : un peuple nouveau et un cœur nouveau.
Le jour de la Pentecôte, «l’Esprit fait des disciples un peuple nouveau».
C’est la première nouveauté réalisée par l’Esprit Créateur, a commencé le Pape François.
Un peuple nouveau, car le jour de la Pentecôte, l’Esprit est descendu du ciel, sous
forme de langues de feu, pour se poser sur chacun. Tous ainsi remplis d’Esprit Saint
: ils se mirent à parler en d’autres langues, raconte le Saint-Père. C’est «l’action
de l’Esprit, qui met tout le monde en communication». C’est un don fait à chacun
qui «réunit tout le monde dans l’unité» et recompose l’harmonie. «En
d’autres termes, le même Esprit crée la diversité et l’unité et, ainsi, façonne un
peuple nouveau, diversifié et uni : c’est l’Église universelle». L’Esprit fait
«en sorte qu’il y ait l’unité vraie, celle selon Dieu, qui n’est pas uniformité,
mais unité dans la différence» explique le Pape.
Mais il met en garde, car il y a deux tentations récurrentes qu’il faut éviter
pour préserver cette unité vraie. «La première, c’est celle de chercher la diversité
sans l’unité», par exemple en voulant se distinguer, en créant des coalitions
ou se raidissant sur ses positions, «en jugeant peut-être qu’on est meilleur ou
qu’on a toujours raison» avec ce comportement, dénonce François, «on devient
des ‘‘supporters’’ qui prennent parti plutôt que des frères et sœurs dans le même
Esprit ; des chrétiens ‘‘de droite ou de gauche’’ avant d’être de ‘‘Jésus’’ ; des
gardiens inflexibles du passé ou des avant-gardistes de l’avenir avant d’être des
enfants humbles et reconnaissants de l’Église. Ainsi, il y a la diversité sans l’unité».
L’autre tentation à éviter, c’est celle de «chercher l’unité sans la diversité»,
car l’unité devient alors uniformité, obligation de faire tout ensemble et tout pareil,
de penser tous toujours de la même manière, qui élimine toute liberté.
Pour vivre cette unité multiforme, il faut aussi demander à l’Esprit Saint «un
cœur qui sente l’Église, notre mère et notre maison». Un cœur nouveau, c’est
la deuxième nouveauté réalisée par l’Esprit de la Pentecôte, poursuit le Pape, car
c’est l’Esprit du pardon des péchés, premier don de Jésus Ressuscité. «Voilà le
commencement de l’Église, voilà la colle qui nous maintient ensemble, le ciment qui
unit les briques de la maison : c’est le pardon» a expliqué le Saint-Père. Cet
«Esprit du pardon, qui résout tout dans la concorde, pousse à refuser les voies
du jugement ou de la critique», mais «à parcourir la voie à double sens du
pardon reçu et donné, de la miséricorde divine qui se fait amour du prochain et de
la charité».
(BH)
Texte intégral de l'homélie du Saint-Père - messe de Pentecôte 4 juin 2017
Se conclut aujourd’hui le temps de Pâques, cinquante jours qui, de la Résurrection
de Jésus à la Pentecôte, sont marqués de manière spéciale par la présence de l’Esprit
Saint. C’est lui, en effet, le Don pascal par excellence. C’est l’Esprit créateur,
qui réalise toujours des choses nouvelles. Deux nouveautés nous sont montrées dans
les Lectures d’aujourd’hui : dans la première, l’Esprit fait des disciples un peuple
nouveau ; dans l’Évangile, il crée dans les disciples un cœur nouveau.
Un peuple nouveau. Le jour de Pentecôte, l’Esprit est descendu du ciel, sous forme
de « langues qu’on aurait dites de feu, qui se partageaient, et il s’en posa sur chacun
[…]. Tous furent remplis d’Esprit Saint : ils se mirent à parler en d’autres langues »
(Ac 2, 3-4). La Parole de Dieu décrit ainsi l’action de l’Esprit, qui se pose d’abord
sur chacun et ensuite met tous en communication. Il fait à chacun un don et réunit
tous dans l’unité. En d’autres termes, le même Esprit crée la diversité et l’unité
et, ainsi, façonne un peuple nouveau, diversifié et uni : l’Église universelle. D’abord,
avec imagination et de manière imprévisible, il crée la diversité ; à chaque époque,
en effet, il fait fleurir des charismes nouveaux et variés. Ensuite, le même Esprit
réalise l’unité : il relie, réunit, recompose l’harmonie : « Par sa présence et son
action, il réunit dans l’unité les esprits qui sont distincts les uns des autres et
séparés » (Cyrille d’Alexandrie, Commentaire sur l’évangile de Jean, XI, 11). En sorte
qu’il y ait l’unité vraie, celle selon Dieu, qui n’est pas uniformité, mais unité
dans la différence.
Pour réaliser cela, il convient de nous aider à éviter deux tentations récurrentes.
La première, c’est celle de chercher la diversité sans l’unité. Cela arrive quand
on veut se distinguer, quand on crée des coalitions et des partis, quand on se raidit
sur des positions qui excluent, quand on s’enferme dans des particularismes propres,
jugeant peut-être qu’on est meilleur ou qu’on a toujours raison. Alors, on choisit
la partie, non le tout, l’appartenance à ceci ou à cela avant l’appartenance à l’Église ;
on devient des ‘‘supporters’’ qui prennent parti plutôt que des frères et sœurs dans
le même Esprit ; des chrétiens ‘‘de droite ou de gauche’’ avant d’être de Jésus ;
des gardiens inflexibles du passé ou des avant-gardistes de l’avenir avant d’être
des enfants humbles et reconnaissants de l’Église. Ainsi, il y a la diversité sans
l’unité. La tentation opposée est en revanche celle de chercher l’unité sans la diversité.
Cependant, ainsi, l’unité devient uniformité, obligation de faire tout ensemble et
tout pareil, de penser tous toujours de la même manière. De cette façon, l’unité finit
par être homologation et il n’y a plus de liberté. Mais, dit saint Paul, « là où l’Esprit
du Seigneur est présent, là est la liberté » (2 Co 3, 17).
Notre prière à l’Esprit Saint, c’est alors de demander la grâce d’accueillir son unité,
un regard qui embrasse et aime, au-delà des préférences personnelles, son Église,
notre Église ; de prendre en charge l’unité de tous, de mettre fin aux bavardages
qui sèment la division et aux envies qui empoisonnent, car être des hommes et des
femmes d’Église signifie être des hommes et des femmes de communion ; c’est de demander
également un cœur qui sente l’Église notre mère et notre maison : la maison accueillante
et ouverte, où on partage la joie multiforme de l’Esprit Saint.
Et venons-en à la seconde nouveauté : un cœur nouveau. Jésus Ressuscité, en apparaissant
pour la première fois aux siens, dit : « Recevez l’Esprit Saint. À qui vous remettrez
ses péchés, ils seront remis » (Jn 20, 22-23). Jésus ne condamne pas les siens, qui
l’avaient abandonné et renié durant la passion, mais il leur donne l’Esprit du pardon.
L’Esprit est le premier don du Ressuscité et il est donné avant tout pour pardonner
les péchés. Voilà le commencement de l’Église, voilà la colle qui nous maintient ensemble,
le ciment qui unit les briques de la maison : le pardon. Car, le pardon est le don
à la puissance n, c’est le plus grand amour, celui qui garde uni malgré tout, qui
empêche de s’effondrer, qui renforce et consolide. Le pardon libère le cœur et permet
de recommencer : le pardon donne l’espérance ; sans pardon l’Église ne s’édifie pas.
L’Esprit du pardon, qui résout tout dans la concorde, nous pousse à refuser d’autres
voies : celles hâtives de celui qui juge, celles sans issue de celui qui ferme toutes
les portes, celles à sens unique de celui qui critique les autres. L’Esprit nous exhorte,
au contraire, à parcourir la voie à double sens du pardon reçu et donné, de la miséricorde
divine qui se fait amour du prochain, de la charité comme « unique critère selon lequel
tout doit être fait ou ne pas être fait, changé ou pas changé » (Isaac de l’Étoile,
Discours 31). Demandons la grâce de rendre toujours plus beau le visage de notre Mère
l’Église en nous renouvelant par le pardon et en nous corrigeant nous-mêmes : ce n’est
qu’alors que nous pourrons corriger les autres dans la charité.
Demandons-le à l’Esprit Saint, feu d’amour qui brûle dans l’Église et en nous, même
si souvent nous le couvrons de la cendre de nos péchés : ‘‘Esprit de Dieu, Seigneur
qui te trouves dans mon cœur et dans le cœur de l’Église, toi qui conduis l’Église,
façonne-la dans la diversité, viens ! Pour vivre, nous avons besoin de Toi comme de
l’eau : descends encore sur nous et enseigne-nous l’unité, renouvelle nos cœurs et
enseigne-nous à aimer comme tu nous aimes, à pardonner comme tu nous pardonnes ! Amen’’.