À Fatima, le Pape invite les pèlerins à être «marials»
(RV) « Si nous voulons être chrétiens, nous devons être marials ». Citant
les paroles de Paul VI, c’est l’invitation du Pape François qui a salué ainsi les
pèlerins de Fatima vendredi 12 mai 2017 au soir, lors de ce centenaire des apparitions
de la Vierge.
Le résumé de la soirée, avec Blandine Hugonnet :
Après un dîner en privé à la Casa "Nossa Senhora do Carmo", cet ancien hôpital
qui donne directement sur le sanctuaire, le Saint-Père est descendu de la papamobile
sur l'esplanade, pour se présenter en pèlerin, à pieds, au milieu des fidèles. Il
s’est ensuite adressé à la foule fervente, éclairée de milliers de bougies, venue prier un
peu plus tôt aux pieds de la statue de Marie dans la Chapelle des apparitions. C’est
un « pèlerinage vécu dans l’espérance et dans la paix » a rappelé le Pape,
comme le dit le slogan de ce 19e voyage apostolique, le premier au Portugal. Lors
de cette veillée mariale, il a développé le sens de la figure de Marie.
« Qui est Marie ? » a interrogé le Pape. C’est une « Maîtresse de
vie spirituelle, la première qui a suivi le Christ sur la “voie étroite” de la croix
» qui donne l’exemple, bien plus qu’une « Dame “inaccessible” et donc inimitable
» ou une « “image pieuse” à laquelle on a recours pour recevoir des faveurs
à bas coût », répond-il avec fermeté. C’est elle, cette « Mère douce et attentive
» qui a donné un visage humain au Fils du Père éternel, rappelle le Pape. Un visage
à contempler « dans les moments joyeux, lumineux, douloureux et glorieux de sa
vie ». Car c’est avec la récitation du Rosaire, que « l’Évangile reprend
sa route dans la vie de chacun, dans la vie des familles, des peuples et du monde
». En effet, « si nous voulons être chrétiens, nous devons être marials,
c’est-à-dire que nous devons reconnaître le rapport essentiel, vital, providentiel
qui unit Marie à Jésus et qui nous ouvre le chemin qui nous conduit à Lui ».
Elle n’est pas non plus celle « qu’on voit tenir ferme le bras justicier de
Dieu prêt à punir » insiste le Pape. Car les pêcheurs ne sont pas punis par le
jugement de Dieu, mais sont pardonnés par sa miséricorde, met-il en garde. Marie,
poursuit le Pape, c’est cette « force révolutionnaire de la tendresse et de l’affection
», et de l’humilité qui ne « sont pas les vertus des faibles, mais des forts,
qui n’ont pas besoin de maltraiter les autres pour se sentir importants » estime
enfin le Saint-Père, avant d’inviter les pèlerins à prier pour que cette « Mère
les prenne dans ses bras, les couvre de son manteau et les place à côté de ton Cœur
».
Ce vendredi, le Pape a tenu à respecter l’enseignement de la Vierge, en confiant
à Jésus « spécialement ceux qui en ont le plus besoin » (Apparition de juillet
1917), « les déshérités et malheureux à qui a été volé le temps présent, chacune
des personnes exclues et abandonnées à qui est nié l’avenir, chacun des orphelins
et des victimes de l’injustice à qui il n’est pas permis d’avoir un passé ».
Au terme de cette veillée mariale, notre envoyée spéciale Blandine Hugonnet a interrogé
deux pèlerins français venus pour l'occasion.
Le père Laurent Tournier, de la Congrégation de Jésus et Marie,
qui accompagne un grand groupe de la France à Saint-Jacques de Compostelle en passant
par ce centenaire à Fatima. Il était là seulement pour cette veillée mariale.
Présent également hier soir à la veillée, un accompagnateur de pèlerinage. Pierre
Voyer vient tous les ans à Fatima depuis 36 ans. Il confie ce qu’il retient
des paroles du Pape.
(BH)
Texte intégral du Salut du Père lors de la bénédiction des cierges au Sanctuaire
de Fatima le 12 mai 2017
VEILLEE MARIALE
Salut à la Vierge – 12 mai 2017
Chers pèlerins de Marie et avec Marie !
Merci de m’avoir accueilli parmi vous et de vous être unis à moi en ce pèlerinage
vécu dans l’espérance et dans la paix. Dès maintenant, je désire assurer tous ceux
qui se trouvent unis à moi, ici ou ailleurs, que je vous porte tous dans mon cœur.
Je sens que Jésus vous a confiés à moi (cf. Jn 21, 15-17), et je vous embrasse et
vous confie tous à Jésus, “spécialement ceux qui en ont le plus besoin” – comme la
Vierge nous a enseigné à prier (Apparition de juillet 1917). Que la Mère, douce et
attentive à tous ceux qui sont dans le besoin, leur obtienne la bénédiction du Seigneur !
Sur chacun des déshérités et des malheureux à qui a été volé le temps présent, sur
chacune des personnes exclues et abandonnées à qui est nié l’avenir, sur chacun des
orphelins et des victimes de l’injustice à qui il n’est pas permis d’avoir un passé,
que descende la bénédiction de Dieu incarnée en Jésus Christ : « Que le Seigneur te
bénisse et te garde ! Que le Seigneur fasse briller sur toi son visage, qu’il te prenne
en sa grâce ! Que le Seigneur tourne vers toi son visage, qu’il t’apporte la paix ! »
(Nb 6, 24-26)
Cette bénédiction s’est accomplie pleinement dans la Vierge Marie, puisqu’aucune autre
créature n’a vu resplendir sur elle le visage de Dieu comme elle, qui a donné un visage
humain au Fils du Père éternel ; et nous, maintenant, nous pouvons le contempler successivement
dans les moments joyeux, lumineux, douloureux et glorieux de sa vie, que nous revisitons
dans la récitation du Rosaire. Avec le Christ et Marie, nous demeurons en Dieu. En
effet, « si nous voulons être chrétiens, nous devons être marials, c’est-à-dire que
nous devons reconnaître le rapport essentiel, vital, providentiel qui unit Marie à
Jésus et qui nous ouvre le chemin qui nous conduit à Lui » (Paul VI, Discours au cours
de la visite au sanctuaire de la Vierge de Bonaria, Cagliari, 24 avril 1970). Ainsi,
chaque fois que nous récitons le Rosaire, en ce lieu béni ou en n’importe quel autre
lieu, l’Evangile reprend sa route dans la vie de chacun, dans la vie des familles,
des peuples et du monde.
Pèlerins avec Marie… Quelle Marie ? Une Maîtresse de vie spirituelle, la première
qui a suivi le Christ sur la “voie étroite” de la croix, nous donnant l’exemple, ou
au contraire une Dame “inaccessible” et donc inimitable ? La “Bienheureuse pour avoir
cru” toujours et en toutes circonstances aux paroles divines (cf. Lc 1, 42.45), ou
au contraire une “image pieuse” à laquelle on a recours pour recevoir des faveurs
à bas coût ? La Vierge Marie de l’Evangile, vénérée par l’Eglise priante, ou au contraire
une Marie affublée d’une sensibilité subjective qu’on voit tenir ferme le bras justicier
de Dieu prêt à punir : une Marie meilleure que le Christ, vu comme un juge impitoyable ;
plus miséricordieuse que l’Agneau immolé pour nous.
On commet une grande injustice contre Dieu et contre sa grâce quand on affirme en
premier lieu que les pécheurs sont punis par son jugement sans placer avant – comme
le manifeste l’Evangile – qu’ils sont pardonnés par sa miséricorde ! Nous devons faire
passer la miséricorde avant le jugement et, de toute façon, le jugement de Dieu sera
toujours fait à la lumière de sa miséricorde. Evidemment la miséricorde de Dieu ne
nie pas la justice, parce que Jésus a pris sur lui les conséquences de notre péché
avec le châtiment mérité. Il ne nie pas le péché mais il a payé pour nous sur la Croix.
Et ainsi, dans la foi qui nous unit à la Croix du Christ, nous sommes libérés de nos
péchés ; mettons de côté toute forme de peur et de crainte, parce que cela ne convient
pas à celui qui est aimé (cf. 1 Jn 4, 18). « Chaque fois que nous regardons Marie
nous voulons croire en la force révolutionnaire de la tendresse et de l’affection.
En elle, nous voyons que l’humilité et la tendresse ne sont pas les vertus des faibles,
mais des forts, qui n’ont pas besoin de maltraiter les autres pour se sentir importants.
[…] Cette dynamique de justice et de tendresse, de contemplation et de marche vers
les autres, est ce qui fait d’elle un modèle ecclésial pour l’évangélisation » (Evangelii
gaudium, n. 288).Que chacun de nous puisse devenir, avec Marie, signe et sacrement
de la miséricorde de Dieu qui pardonne toujours, qui pardonne tout.
Pris par la main de la Vierge Mère et sous son regard, nous pouvons chanter avec joie
les miséricordes du Seigneur. Nous pouvons dire : Mon âme chante pour toi, Seigneur !
La miséricorde que tu as eue envers tous tes saints et envers le peuple fidèle tout
entier, est aussi arrivée jusqu’à moi. A cause de l’orgueil de mon cœur, j’ai vécu
distrait derrière mes ambitions et mes intérêts, sans réussir cependant à n’occuper
aucun trône, ô Seigneur ! L’unique possibilité d’exaltation que j’ai est celle-là :
que ta Mère me prenne dans ses bras, me couvre de son manteau et me place à côté de
ton Cœur. Et qu’il en soit ainsi.