2015-06-12 18:49:00

La mobilisation doit s'amplifier contre les abus sur les enfants


(RV) Entretien - Ce vendredi 12 juin marque la journée mondiale contre l’exploitation des enfants.

De nombreux enfants dans le monde sont exploités, parfois victimes d’abus sexuels dans le cadre de leur travail comme dans leur milieu familial et relationnel. Ce drame était au centre du congrès international du BICE, le Bureau International Catholique de l’enfance qui s’est tenu le mois dernier au Collège des Bernardins, à Paris. Selon de récentes études réalisées par l’OMS et un laboratoire de recherche familiale : 1 enfant sur 5 est victime d’abus sexuel dans le monde et dans 85% des cas, l’abus sexuel est commis par un membre de la famille ou un proche de l’enfant.

Consacré aux moyens de prévention et d’accompagnement des enfants victimes d’abus sexuels la rencontre réunissait à la fois des professionnels des milieux médicaux et législatifs, des spécialistes de la résilience de l’enfant, des représentants gouvernementaux et des membres de l’Eglise. Marguerite du Chaffaut a interrogé Alessandra Aula, secrétaire générale du BICE.

 

On a voulu avec ce congrès interpeler les mondes des juristes, pour voir quelles réponses le droit apportait à terme au droit de protection des enfants, mais aussi le corps médical, les assistants sociaux, les éducateurs parce qu’ évidemment il faut un travail interdisciplinaire pour essayer de prévenir, d’appréhender ou de protéger les enfants qui ont été victimes, mais aussi n’oublions pas les enfants qui ont été témoins et parfois aussi, auteurs d’abus sexuels. Le fait de rassembler des personnalités de différentes parties du monde, nous a effectivement permis de marquer un temps fort dans les débats sur la question de l’abus sexuel.

Vous expliquez qu’il est très difficile de venir à bout des abus sexuels, notamment à cause du silence qui entoure les victimes dans leur entourage et dans les familles, comment venir à bout de ce fléau, quelles sont les pistes pour non seulement reconnaitre un abus sexuel et ensuite venir en aide aux enfants?

On commence à briser le silence, on commence à en parler. C’est effectivement  aussi grâce aux médias, c'est le bon côté de l’internet aussi et des réseaux sociaux, ça permet évidemment d’aller plus vite, d’atteindre plus de personnes et donc on commence à mettre des noms sur certaines situations. Il y a par exemple deux pistes que j’aimerai évoquer: une piste qui s’adresse surtout aux éducateurs, aux assistants sociaux mais aussi aux opérateurs judiciaires, c’est-à-dire une formation continue aussi sur ce sujet, d’une formation adaptée car une des difficultés, c’est un tabou évidemment c’est un sujet extrêmement délicat mais aussi chaque cas est un cas, chaque enfant a son histoire et donc, il faut savoir comment parler à chaque enfant. L’autre volet aussi, c’est toute une éducation à la parentalité positive, comment les parents exercent leur rôle de parents, de protecteurs de leurs enfants. L’autre piste, c’est aussi de commencer à l’école et avec les parents à faire connaitre aussi à l’enfant son corps, donc de l’éduquer aussi à la sexualité adaptée son âge, à son niveau de maturité bien évidemment pour que l’enfant aussi lui-même apprenne à dire non et que l’enfant déculpabilise aussi parce que souvent aussi les enfants qui sont abusés ne se voient pas comme victimes, se voient comme des méchants.

Vous avez fait partie de la délégation qui a rencontré le Pape François en avril 2014. Il a renouvelé l’engagement de l’Eglise dans le combat contre les abus sexuels, qu’est-ce que vous retenez de cette entrevue?

Ça a été déjà une gravité extrême, on sentait, au-delà des mots que le Pape a prononcés le poids qu’il porte de cette question et vraiment c’est une source de douleur profonde. C’est quelque chose qu’on ressent au contact, qui est difficile à traduire dans des mots, dans des déclarations mais évidemment le Saint Père a demandé pardon et surtout il a eu des mots très forts en terme de lutte pour l’impunité pour les cas qui ont eu lieu. C’est un grand pas en avant, on sent que la page se tourne.

Vous faites la promotion de la résilience en donnant à ce terme à la fois un aspect psychologique et spirituel...

Et aussi juridique. Ce sont deux approches qui peuvent s’enrichir mutuellement. Pour nous la résilience, ce sont les capacités que chaque enfant a envie de pouvoir rebondir au fond de circonstances traumatiques de sa vie. En même temps aussi, comment on favorise les facteurs de protection qui sont autour de cet enfant, pour que cet enfant, en situation de profonde détresse c’est quand même difficile de trouver en soi-même des ressources et donc s’il y a un environnement protecteur, ou bien des tuteurs de résilience qui peuvent aider cet enfant, tout ça contribue à les remettre debout et on peut aller de l’avant. Il y aura les cicatrices qui vont rester évidemment, on n’oublie pas certains traumatismes, ce n’est pas une question d’effacer ce qui s’est passé, il y a une très belle phrase d’un cahier qu'un des mes collègues a publié pour résumer en deux mots tout cela : « blessés mais pas vaincus ».

 








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