2015-05-29 12:17:00

Mgr Nzapalainga«la paix est encore possible en Centrafrique»


(RV) – Entretien: Synode sur la famille, dialogue entre les différentes réligions, justice, réconciliation nationale et situation politique, appels en faveur des populations très pauvres : sont là quelques thèmes abordés par Mgr Dieudonné Nzapalainga, archevêque de Bangui et président de la Ceca (Conférence épiscopale de Centrafrique). A cœur ouvert au micro de Jean-Pierre Bodjoko, Mgr Dieudonné Nzapalainga, archevêque de Bangui et président de la Conférence épiscopale de Centrafrique, commence par évoquer le dernier forum sur la paix qui s'est récemment tenu à Bangui et invite aussi au respect de la dignité de tous, dans son pays meurtri par la crise politique. Il s'est exprimé également en sango, une langue locale. Ecoutons-le!

Le forum de Bangui a été un rendez-vous tant attendu par les Centrafricains. Nous avons vu qu’il y a eu déficit de communication dans la gestion du pouvoir et nous avons eu cette fois-ci l’opportunité de donner l’occasion aux Centrafricains à la base de parler, ce qu’on appelle consultations à la base. Le forum de Bangui était ce moment qu’on peut appeler l’arbre à palabres où tous les Centrafricains sont venus de l’est, de l’ouest, du nord et du sud. Tous s’asseyaient et se regardaient en face pour se dire la vérité, pour réfléchir autour de quatre ateliers thématiques en ce qui concerne la gouvernance dans notre pays, un des maux qui a gangréné ce pays c’est le problème de la malgouvernance il faut le dire. Depuis toujours le pouvoir est caporalisé par un petit groupe et les autres n’ont pas droit à la parole ou bien encore à la gestion du pays et nous avons où ça nous a conduits: des frustrations, des prises d’armes. Un des ateliers a aussi abordé la question de paix et sécurité, quand il n’y a pas la paix on ne peut pas travailler, il n’y a pas de développement. C’est une culture qu’il faudrait acquérir, il faudrait déposer les armes et envoyer les enfants à l’école, c’est cela qui a manqué. Un autre atelier aussi important était le développement économique et social.

Un pays comme le nôtre riche en ressources naturelles mais qui est pauvre et dans la misère, il va falloir que nous puissions poser de bons diagnostics et que les gens qui vont dorénavant signer des contrats d’exploitation que ça soit connu par tout le monde. Un autre encore des ateliers thématiques qu’on a abordé c’est la question de justice et réconciliation parce que l’impunité a caractérisé notre pays. A chaque fois qu’il y a des problèmes on parle de l’amnistie or à chaque fois les mêmes bourreaux sont au pouvoir, ils continuent à vaquer librement à leurs occupations. Il est temps de siffler la fin de la recréation, de donner l’occasion aussi aux victimes d’être reconnues dans leur dignité; et en même temps aussi tout ne s’arrête pas avec les drames, les barbarise et les violences que nous avons connues. Il va falloir oser poser un autre acte pour tendre la main même aux bourrreaux pour un dépassement, pour vivre ensemble, c’est ça le sens de la réconciliation.

Ce forum a été aussi organisé avec l’implication de l’Eglise afin de chercher l’harmonie entre les peuples

L’Eglise a pris des inititatives, moi-même plusieurs fois je suis allé à la rencontre de l’imam. L’imam a séjourné chez moi, nous avons aussi eu à circuler dans les camps pour parler aux uns et autres pour que la réconciliation s’instaure. Ce n’est pas en restant avec la peur dans nos coins qu’on va se retrouver pour faire avancer le dossier de la réconciliation, il faut oser aller à la rencontre de l’autre et les tabous et les masques pourront tomber et nous comme Eglise nous avons osé. L’Eglise est prophétique, l’Eglise est aussi une mère, elle a su accueillir. Maintenant elle doit donner des orientations à tous ses enfants.

Comment avez-vous pu préparer dans cette ambiance de crise le prochain synode consacré à la famille?                                                

En effet, avec la crise que nous avons connue nos familles sont disloquées, le tissu familial a été brisé. Nous avons des familles où papa se retrouve en brousse, maman se retrouve à la maison, l’enfant se retrouve peut-être ailleurs. Voilà pourquoi nous avons parlé des familles éclatées qui ont maintenant des blessures parce que les jeunes filles qui se retrouvent dehors enceintes on a abusées d’elles avec les armes. Donc nos familles ont été confrontées à la situation de la guerre, il va falloir intégrer dans notre pastorale cette gestion de trauma de la guerre pour guérir, pour purifier la mémoire de nos familles afin qu’elles puissent aussi s’accepter parce qu’aucun modèle ne peut être trouvé ailleurs que le modèle de Nazareth. Nos familles maintenant sont en route et nous avons eu des sessions pastorales sur la famille pour demander que si la famille reste unie, si la famille se retrouve, si la famille donne un bon enseignement, si la famille éduque, si la famille accompagne, console, rassemble, la famille pourra être le socle pour ne pas dire le repère et proposera des hommes, des femmes qui vont tenir dans la société.

A part les défis causés par la crise politique, y’a-t-il d’autres défis pastoraux dans l’Eglise de Centrafrique?

Entre autres défis que nous voyons c’est le défi de la justice, les gens qui ont eu à souffrir crient justice. La justice est aussi un des noms de Dieu. En parlant de justice nous voulons aider nos frères à grandir en humanité. Un autre défi qui s’impose à l’horizon c’est l’acceptation de l’autre, avec ce qui s’est passé, on pense que l’autre est devenu un ennemi. Non! il n’est pas un ennemi, il reste un frère. Nous avons aussi un autre défi c’est le patriotisme, il faut que les Centrafricains aiment leur pays, il va falloir que nous puissions nous aimer pour éviter les trahisons, pour éviter les soupçons, pour éviter les divisions, pour rebâtir une nouvelle Centrafrique.

Est-ce que vous pouvez vous adresser au peuple centrafricain en utlisant une langue locale?

(Message en Sango: une langue parlée en Centrafrique)








All the contents on this site are copyrighted ©.