2014-10-07 19:56:00

Kobané embrase les rues de Turquie


(RV) Entretien - Les violences de l’Etat islamique se sont indirectement exportées mardi en Turquie. De violentes manifestations contre le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan ont embrasé la rue turque. Des milliers de personnes, principalement des kurdes, ont protesté dans plusieurs villes du pays pour dénoncer le refus du pays d’intervenir militairement à sa frontière, au secours de la ville de Kobané, prise d’assaut par le groupe djihadiste l’Etat islamique. Dans plusieurs villes, la contestation a dégénéré en affrontements. Une personne a été tuée.

Après un vote au Parlement en faveur d’une intervention, Ankara essaie désormais de gagner du temps, d’où une position ambiguë, comme nous l’explique Samim Akgönül, professeur à l’université de Strasbourg, spécialiste de la Turquie.

Texte de l'entretien: 

La Turquie est dans une position très ambigüe. D’un côté, il y a cet État islamique, le Daesh, qui est en réalité le fruit de l’opposition syrienne contre le régime de Bashar al-Assad, alaouite, pour lequel la Turquie a œuvré pendant des années. Elle a donc soutenu cette opposition pendant des années, politiquement parlant, discursivement parlant et même peut-être logistiquement parlant. Ce qu’on appelle l’État islamique est issu de cette opposition. C’est en quelques sortes le monstre créé en partie à travers le soutien de la Turquie. Mais aujourd’hui, la Turquie ne veut pas voir à ses frontières un État islamique aussi barbare et aussi primitif. D’un autre côté, un État islamique qui est vaincu veut dire ipso facto la victoire des kurdes dans la région. L’autre versant de cette politique est la création d’un État kurde autonome, voire indépendant et cela n’arrange pas non plus la Turquie.

Quelle option reste t’il à Ankara ? Erdogan a évoqué mardi la possibilité d’une opération militaire terrestre.

Il y a deux choses. En réalité, il y a cette histoire d’intervention terrestre mais bien entendu, la Turquie ne pas être seule parce qu’il y a approximativement deux millions de réfugiés syriens dans les territoires de Turquie et parmi ces deux millions de réfugiés, il ne sera pas surprenant qu’il y ait des cellules dormantes de l’État islamique qui, en cas d’intervention radicale de l’armée turque contre l’État islamique commettrait des attentats ou je ne sais quoi. De l’autre côté, les kurdes ne soutiennent pas non plus cette intervention islamique car ils pensent qu’elle soutient deux objectifs. Premièrement, non pas d’éradiquer l’État islamique mais de créer une zone tampon entre la Turquie et la Syrie pour empêcher la création de l’État kurde. Et deuxièmement, de renverser le régime de Bashar al-Assad. Il y a un mépris sur la cible.  La cible vue par l’Occident est l’État islamique. La cible vue par Ankara est le régime de Bashar al-Assad. La Turquie fait appel aux américains pour ensemble combattre l’État islamique mais aussi pour renverser le régime d’Assad. Hors, ce n’est plus ce que les américains et les russes veulent. 

 

 

 








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