2014-10-07 17:33:00

Bientôt la fin de la récession en Grèce ?


(RV) Entretien - Athènes prévoit de sortir de la récession en 2015 et annonce même le retour de la croissance dès cette année. C’est ce qu’a affirmé Christos Staïkouras le ministre adjoint des Finances, en dévoilant lundi l’avant-projet de budget de l’État. Si comme le gouvernement l’a annoncé la croissance revient, le pays sortirait de six ans de récession, qui ont fait perdre à la Grèce un quart de son Produit intérieur brut.

Pour éviter sa faillite, l’Union européenne et le Fonds monétaire international ont assisté financièrement la Grèce depuis 2010, en échanges de mesures drastiques d’austérité. La semaine dernière, la troïka des créanciers de la Grèce : l’Union européenne, la Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international, ont entamé un nouveau contrôle des comptes et des réformes du pays.

Peut-on dire que la Grèce va mieux ? Et pourra-t-elle, comme elle le souhaite, se passer de soutien financier ? L’analyse de Jean Catsiapis, universitaire spécialiste de la Grèce, collaborateur de la revue Politique Internationale. Il est interrogé par Audrey Radondy 

Il y a quelques chiffres qui sont bons sur le plan micro-financier, macroéconomique mais de façon concrète, le chômage est considérable, de l’ordre de 27% et de 60% chez les jeunes. À Athènes ou à Thessalonique, il y a un magasin sur deux qui est fermé. Les gens mangent grâce aux soupes populaires. Les gens se suicident, les gens émigrent. Voilà ce qui se passe depuis plusieurs années.

Dans le projet de budget qui va être discuté dans quelques semaines, il y a une légère diminution des impôts mais ceux-ci étaient considérables ces six dernières années. Ça irait un petit peu dans le bon sens. Ceci étant, tout dépend de la bonne volonté de l’Union européenne, du FMI, de la Troïka et de la conjoncture politique car il y a vraiment un très grand mécontentement en Grèce. Ceci étant, il n’y a pas tellement de politiques de rechange car même si  le Syriza, la coalition de gauche radicale, est en tête dans les sondages, ces mêmes sondages n’accordent pas une confiance extraordinaire à Syriza pour sortir de la crise.

Les solutions proposées par Syriza ne paraissent pas très réalistes puisqu’il dit que soit on supprime la dette extérieure, soit on fait exactement comme l’Allemagne avait fait en 1953 lorsqu’elle est sortie de la guerre et qu’elle avait une dette considérable. Les créanciers de l’Allemagne avaient consenti à effacer 50% de la dette et que les 50% restants soient remboursés sur 30 ans.

Quels progrès doivent encore être accomplis ?

Le problème de la Grèce, à la différence de l’Espagne ou d’autres États qui ont des difficultés, c’est que les structures administratives et l’État avec un « E » majuscule n’existent pas. Les réformes que décident le gouvernement avec le Parlement tardent à être mises en œuvre parce que les fonctionnaires sont recrutés sur la base du clientélisme et qu’il n’y a pas d’administration efficace pour mettre en œuvre les réformes. C’est ça le problème majeur de la Grèce, c’est que des réformes sont décidées mais tardent à être appliquées. Et la Troïka s’en est rendu compte. Il ne faut pas croire les grecs sur parole puisqu’ils promettent des réformes mais dans la pratique, ils ont beaucoup de difficultés à les mettre en œuvre.

Sur le plan économique, il y a des points positifs. Le tourisme a très bien marché au cours de l’été dernier. Mais ça ne dure seulement que deux ou trois mois. Il faudrait une réforme administrative importante qui ne peut pas se faire en quelques mois, ni même en quelques années. Vu les contraintes politiques avec les élections de février 2015 pour le président de la République, de mai 2016 pour le Parlement, le gouvernement n’a pas le temps devant lui pour faire passer des mesures très impopulaires. Le Premier ministre grec, Antonis Samarás dit « je vais donner satisfaction aux Grecs grâce à la politique que je mène et qui donne quelques résultats. On aura plus la Troïka sur le dos qui est une humiliation pour les Grecs ».

Est-ce qu’ils ne veulent pas aller un petit peu trop vite ?

La majorité est très étroite, le Pasok (Mouvement socialiste panhéllenique) qui participe au pouvoir n’a plus que 4 ou 5% des voix selon les sondages alors qu’il y a quatre ans, il en avait 44%. Le Pasok est donc en partie en train de disparaître. La Nouvelle Démocratie, du Premier ministre, est maintenant devancée par le Syriza. Donc, l’objectif politique du gouvernement, c’est d’éviter les élections et pour éviter les élections, c’est d’obtenir peut-être de façon artificielle de l’Union Européenne et du FMI un certain desserrement de la contrainte, dire que la Troïka n’exerce plus sa tutelle et d’obtenir peut-être qu’il n’y ait pas trop de contraintes sur le plan budgétaire. De façon concrète, ça voudrait dire que l'on va supprimer moins de fonctionnaires que ce qui a été prévu.

Alors, il n’est pas impossible que l’Union européenne ne souhaite pas avoir sur le dos une Grèce avec un gouvernement qui ne souhaite ni la sortie de l’euro, ni la sortie de l’Union européenne mais qui ne paierait pas sa dette. Ça donnerait un très mauvais exemple pour l’Union européenne. Il faut savoir aussi que la Commission est sortante et le 1er novembre, la Commission de Jean-Claude Juncker entrera en fonction. Jean-Claude Juncker est assez favorable à la Grèce. Il a toujours dit qu’il fallait éviter d’humilier les Grecs, de leur donner des contraintes importantes. Il n’est donc pas impossible que Jean-Claude Juncker aille dans le sens d’une aide à la Grèce qui ne serait pas une nouvelle aide financière mais un allégement des contraintes. 








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