2014-09-04 14:26:00

Boko Haram menace le Cameroun : l'inquiétude des évêques


(RV) Entretien- Les évêques du Cameroun étaient cette semaine à Rome, en visite Ad Limina ; l’occasion pour eux de se rendre dans les différents dicastères de la Curie Romaine, surtout de rencontrer le Pape, et d’évoquer avec lui la situation présente d’une Eglise vivante et dynamique. L’occasion aussi pour ces évêques de faire part de leurs inquiétudes face à plusieurs menaces, au premier rang desquelles, celle représentée par Boko Haram.

La secte islamiste, qui sème la terreur dans le nord du Nigéria, menace maintenant directement l’extrême nord du Cameroun, multipliant incursions, attaques et enlèvements, et obligeant les populations de cette région frontalière du Nigéria à fuir, et l’armée camerounaise à définir une nouvelle stratégie militaire.

Mgr Samuel Kleda, archevêque de Douala, et président de la conférence épiscopale du Cameroun revient avec nous sur une situation toujours plus préoccupante :

Effectivement, en ce moment, la situation est à craindre parce qu’il y a des attaques répétées. Au mois de décembre dernier, il y a eu l’enlèvement d’un prêtre. Et puis, il y a eu l’enlèvement de deux prêtres italiens et d’une religieuse canadienne. Cela sans mentionner le premier enlèvement d’une famille française. Ensuite, il y a eu l’enlèvement d’un groupe de chinois qui travaillait non loin de Kusiri. Jusqu’à présent, ils n’ont pas été libérés. Je décrirais presque la situation comme une guerre. Il y a beaucoup d’attaques et nos soldats camerounais sont obligés d’être en éveil pour pouvoir repousser les membres de la secte de Boko Haram. Voilà la situation que nous vivons. Même de l'autre côté, les troubles en RCA ont des répercussions au Cameroun. Il y a des réfugiés centrafricains et des réfugiés nigérians qui sont au Cameroun. Nous devons faire face à tous ces problèmes. Au niveau de l’Église, nous avons déjà adressé des lettres. Nous avons également organisé une journée de prière pour la paix parce que jusqu’à présent, le Cameroun a toujours été un pays de paix (...). Dans notre lettre, nous avons bien dit que cette situation nous préoccupe beaucoup.

Selon vous, y-a-t-il une véritable prise de conscience collective du danger que représente Boko Haram ?

Dans le nord du pays, les populations qui sont à la frontière, au niveau de Kusiri, sont obligés de fuir pour venir vers l’intérieur du pays à cause de Boko Haram. La question qu’on se pose maintenant est de savoir quel est le but de cette secte-là. Qu’est-ce qu’ils cherchent exactement ? C’est la question que nous tous, nous nous posons.

Selon vous, cette situation inquiétante appelle t’elle à une stratégie coordonnée des états concernés ?

Pour lutter à tout prix contre cela, ils devront se mettre ensemble. Je suis convaincu que s’ils se mettent tous ensemble, ils pourront repousser ou au moins arriver à contrôler la situation. Je me dis que les premiers acteurs doivent d’abord être nos dirigeants qui doivent défendre leur pays, défendre leur population. Évidemment, ils peuvent maintenant demander des moyens à l’extérieur puisque nous parlons de cette situation dans la région. Quand je vois qu’aujourd’hui, on peut enlever 230-250 jeunes filles sans que le monde n’arrive à les retrouver ou à les libérer, c’est pour moi une honte pour l’humanité. On dirait qu’on revient en arrière de très loin. C’est une honte pour notre siècle qu’aujourd’hui, on puisse enlever des gens et en faire des esclaves sans que l’humanité n’arrive à les retrouver.

Vous avez évoqué le rôle de l’Église, le positionnement de l’Église par rapport à tout cela ; l’Église qui écrit des lettres, l’Église qui appelle à prier pour la paix. Quelles autres actions éventuelles prévoyez-vous de faire, le cas échéant ?

Peut-être que maintenant, il faudrait aller plus loin et essayer d’amorcer un dialogue pour pouvoir aider nos dirigeants à faire quelque chose dans ce sens-là. C’est déjà ce que les évêques de la Centrafrique font. Ils ont beaucoup investi. À un moment donné, en RCA, il n’y avait plus d’institutions.  Il n’y avait plus que l’Église et tout le monde s’est  tourné vers l’Église. Pour moi, c’est quelque chose de très positif et nous pouvons faire davantage à ce niveau-là.

Vous voulez dire... que l’Église soit un peu médiatrice pour que les dirigeants prennent leur responsabilité ?

S’il faut aider en ce sens, nous sommes prêts à le faire et nous allons sans doute tenter de le faire parce que c’est nécessaire et utile. 








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