Irak : la fuite ou la mort pour les derniers chrétiens de Mossoul
(RV) Entretien- En Irak, ce vendredi, les dernières familles chrétiennes encore
présentes à Mossoul quittaient la ville en direction de Qaraqosh, ville majoritairement
chrétienne dans la plaine de Ninive, mais aussi plus à l’est, vers Erbil ou Dohuk
au Kurdistan irakien.
Selon plusieurs sources sur place, les jihadistes ont
ordonné aux chrétiens de Mossoul de se convertir à l’islam, de payer l’impôt islamique,
ou de quitter leurs maisons sans rien prendre. Toute propriété appartient désormais
à l’État islamique. Selon l’Association Fraternité en Irak, des voitures de l’État
islamique avec des haut-parleurs sont passées dans les quartiers où résidaient encore
quelques familles chrétiennes pour les avertir : « soit vous vous convertissez, soit
vous payez l’impôt, soit vous partez. Sinon vous serez tués. »
L’État islamique
a également distribué ce même message sur papier, frappé de son logo, un cercle blanc
sur fond noir. Des familles ont été pillées par les djihadistes au moment où elles
ont passé le check-point de sortie. Or, papiers, et même voitures ont été volés dans
certains cas. Certains n’ont pu partir qu’avec leurs habits sur le dos.
Jean-Baptiste
Cocagne a joint Faraj Benoît Camurat, président de l’association Fraternité en
Irak :
Les
maisons des chrétiens mais aussi les maisons des yézidis et des chiites de Mossoul
ont été marquées avec des inscriptions disant que ces maisons appartiennent désormais
à l’État Islamique. Donc, ça a été une première chose très marquante.
Hier,
un représentant de l’État Islamique est passé à l’évêché syriaque catholique de Mossoul
et a demandé à ce que, dans l’après-midi, les chrétiens de la ville se rassemblent
afin que leur soient expliquées les règles pour vivre dans le califat islamique de
Mossoul. Naturellement, les chrétiens de Mossoul n’ont pas eu tellement confiance.
Ils ne se sont pas rendus à cette convocation. Et hier soir, jusque tard dans la nuit,
des voitures avec des haut-parleurs ont sillonné la ville indiquant que les chrétiens
avaient le choix entre trois options : La première, se convertir à l’Islam et devenir
des sujets du califat. La deuxième, payer un impôt, la jizya. Et la troisième, partir
ou subir l’épée. En plus de ces haut-parleurs qui ont diffusé hier cet ultimatum,
une lettre a été distribuée à certaines familles. L’ultimatum était fixé à aujourd’hui,
midi. Par conséquent, il y a eu une véritable panique. La centaine de familles chrétiennes
qui se trouvaient encore à Mossoul a quitté la ville avec précipitation. Ces familles,
au check-point de sortie de Mossoul, ont été rançonnées, fouillées. On a volé leurs
biens et pour ceux qui avaient une voiture encore un peu près neuves, on leur a volé
leur voiture.
Ces personnes arrivent à Karakosh, arrivent dans les villages
de la pleine de Ninive avec pour certains, uniquement leurs vêtements sur eux et ils
ne savent pas quel est leur avenir dans cet Irak. C’est une grande tragédie parce
qu’il faut rappeler que Mossoul, avant 2003, comptait au moins 20.000 chrétiens. Il
y a vingt ans, c’était encore une des plus grandes villes chrétiennes de tout le Proche-Orient.
Ce qui vient de se passer à Mossoul est extrêmement préoccupant parce qu’il y a un
enjeu humanitaire vraiment urgent.
Photo : Des chrétiens de Mossoul,
réfugiés dans la ville de Qaraqosh.