(RV) Entretien - Plusieurs dizaines de raids aériens israéliens ont été lancés
sur la bande de Gaza sur une cinquantaine de cibles dans la nuit de lundi à mardi.
Ces attaques ont fait 17 blessés dont sept enfants et deux femmes et des renforts
terrestres ont également été déployés. L’armée israélienne a ainsi répliqué à d’intenses
salves de roquettes tirées depuis le territoire palestinien sur des villes israéliennes,
des tirs alors revendiqués par la branche armée du Hamas, les Brigades Ezzedine al
Qassam.
Ces échanges de tirs sont une nouvelle preuve des tensions toujours
très fortes au Proche-Orient entre Israéliens et Palestiniens. La mort d’un Palestinien
brûlé vif suite à l’assassinat de trois jeunes Israéliens continue d’alimenter un
climat de psychose. Le ministre des affaires étrangères Avidgor Lieberman, partisan
de la manière forte contre la bande de Gaza a officiellement rompu son alliance avec
le Likoud du Premier ministre Benyamin Netanyahou, tout en restant à son poste.
Olivier
Bonnel a recueilli la réaction de Mgr Fouad Twal, le patriarche latin de Jérusalem,
qui revient sur ce climat explosif
Comment
réagissez-vous aujourd'hui face à ces tensions ? Autant nous étions heureux
et optimistes lors du passage du Saint-Père et lors de la rencontre de prière pour
la paix à Rome, autant nous sommes aujourd'hui mal à l’aise. La violence continue
et c’est une culture de violence qui s’instaure. C’est triste et c’est mauvais. Nous
espérons toujours. Nous prions toujours. Nous souffrons toujours. Nous sommes plus
que jamais une Église du calvaire. Nous vivons un calvaire. Il n’y a pas de travail
et il y a de moins en moins de touristes chez nous. Ils ont peur et ils ont raison
d’avoir peur. Il y a partout des checkpoints. Ils jettent partout des pierres. Il
y a partout des soldats. Ce n’est plus une Terre Sainte, ce n’est plus une vie normale.
Nous espérons qu’un jour, il y aura une vie normale à Jérusalem, en Terre Sainte,
comme dans tous les autres pays. Cette culture de violence ne peut pas continuer.
Les gens aiment la paix, veulent la paix, luttent pour la paix. L’objectif, c’est
le dialogue, mais dialoguer pour dialoguer sans fin, ça n'aboutit à rien.
Un
mot sur les jeunes puisque ce sont les jeunes qui sont visés d’un côté comme de l’autre.
C’est un élément important. Qu’est-ce que vous arrivez à dire à la jeunesse qui a
peur de cette violence ? Je veux dire à la jeunesse, aux parents, aux gouvernements
et au Ministère de l’éducation quel type d’éducation vont-ils donner à ces jeunes.
Ça, c’est la question. Et où mène cette éducation ? Au bien de tous, à la paix
pour tous ou à plus de violence ? Il faut aller à la racine. Quel type d’éducation
donnons-nous à nos jeunes ? Et dans nos discours, est-ce que nous encourageons ces
terroristes, ces extrémistes ou nous les arrêtons ? C’est une question que chaque
dirigeant religieux et politique doit se poser. Il faut dire les choses telles qu’elles
sont. Cette politique et cette culture de violence ne mènent à rien. Personne n’est
heureux. Personne. Ni les Israéliens, ni les Palestiniens. Ni vous, à Rome, en Italie.
Personne n’est heureux. Il faut une autre mentalité. Il faut une autre simplicité,
humilité. Il faut même savoir demander pardon, les uns aux autres. Il faut avoir le
courage d’éduquer nos gens à plus d’ouverture, plus de justice et plus de respect
pour les autres.
C’est un respect qui commence à l’intérieur même de la
société israélienne comme de la société palestinienne ? Absolument. Nous
ne sommes pas pour l’un ou l’autre. Nous sommes pour le bien et la paix de tous. Et
si nous critiquons l’un ou l’autre, ça ne veut pas dire que nous sommes pour l’un
ou pour l’autre. Nous sommes pour la paix, pour la justice, pour une vie normale :
une vie normale à Jérusalem.
Dans ce contexte particulièrement tendu, aujourd’hui,
quelle voix peut apporter l’Église ? La même voix que celle du Saint-Père,
la même voix que nous avons répétée mille fois. Nous voulons la paix, l’éducation.
C’est ce que nous faisons dans nos écoles.