2014-07-02 08:38:28

Quelle riposte pour Israël après le triple meurtre ?


(RV) Entretien- La population israélienne est encore sous le choc après la découverte des cadavres des trois jeunes israéliens enlevés le 12 juin dernier dans le sud de la Cisjordanie. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a promis de « faire payer » le Hamas et Israël a lancé une trentaine de raids aériens contre des groupes armés dans la bande de Gaza sans faire de victime. Le cabinet de sécurité, qui s'est réuni dès lundi soir étudie sa riposte. Certains faucons de la majorité prônent une opération massive visant à « éradiquer » le Hamas en Cisjordanie comme dans la bande de Gaza, d'autres ministres et une partie de la hiérarchie militaire plaident pour une réplique mesurée. Quelles peuvent être les conséquences de ce triple meurtre ? L’analyse de Frederic Encel, professeur à Sciences Po Paris et auteur de l'Atlas Géopolitique d'Israël chez Autrement RealAudioMP3

On doit nécessairement s’attendre à des représailles d’Israël. C’est absolument évident. C’est un grand classique de la stratégie politique et militaire israélienne de frapper systématiquement après un attentat ou après des pertes. Mais je ne crois pas à un réinvestissement militaire massif dans la bande de Gaza par exemple, comme cela s’était produit en 2008-2009 parce que c’est le genre d’aventure qui coûte cher à Israël. Donc frapper des têtes militaires et éventuellement politiques du Hamas c’est une chose, par voie aérienne ou par voie de drone. Mais ça en est une autre de réoccuper la bande de Gaza. Donc, je ne crois pas que les Israéliens vont monter en puissance dans leur riposte.

Benjamin Netanyahu a déjà fait des déclarations particulièrement virulentes à l’encontre du Hamas qui avait donc nié être impliqué dans cet enlèvement ?
Oui, c’est vrai, le Hamas a nié mais en même temps, le Hamas est allié pour la première fois depuis plus de dix ans (et ça a été extrêmement difficile) à l’Autorité palestinienne. Donc, vous pensez bien qu’aujourd’hui, les leaders politiques du Hamas n’ont pas intérêt à attirer sur eux, non seulement la foudre d’Israël mais surtout le rejet du président palestinien Mahmoud Abbas. Donc, c’est la raison pour laquelle il le nie. On peut d’ailleurs très bien imaginer que ce soit un commando lié au Hamas d’une manière ou d’une autre mais défavorable à sa ligne politique qui ait frappé.

Cet assassinat est un véritable coup de couteau dans le processus de paix israélo-palestinien. Il peut également mettre en péril l’accord de réconciliation conclu entre le Fatah et le Hamas ?
Disons que c’est un coup de couteau dans un cadavre parce que le processus de paix est officiellement arrêté. D’abord, il avait été enclenché par John Kerry, en tout cas sous l’égide des Américains l’été dernier pour neuf mois. Il est arrivé à échéance sans accord et de toute façon, l’accord de gouvernement entre le Hamas et l’Autorité palestinienne a provoqué le départ de la table de négociation du gouvernement israélien. Donc, de toute façon, aujourd’hui, il n’y a plus de négociations.

Alors quand à votre deuxième question, oui, je crois que ce triple meurtre des jeunes Israéliens risque de provoquer l’éclatement, déjà, de ce gouvernement. Et de ce point de vue-là, Mahmoud Abbas se trouve entre l’enclume et le marteau. Aujourd’hui, les Israéliens disent : « tu sors de cette association avec les terroristes du Hamas sinon on voit bien que tu ne veux pas faire la paix et on ne reviendra pas à la table des négociations. Et le temps joue pour nous ». Quand au Hamas, il continue à traiter le président palestinien de faible, de mou, parfois de lâche, précisément parce qu’il a renoncé à la violence voilà plus de dix ans. Donc oui, cette formation gouvernementale unifiée palestinienne risque de voler en éclats.

Photo: les funérailles des trois jeunes Israéliens, à Modiin, le 1er juillet.







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