La joie de l'Évangile, au coeur de la mission de l'Église
(RV) Le message du Pape pour la prochaine journée missionnaire mondiale a été publié
ce samedi. Cette journée, la 88 ème, sera célébrée le 18 octobre prochain et est l’occasion
de se pencher sur l’activité missionnaire de l’Eglise universelle. Dans son message.
François invite les croyants à retrouver une ferveur apostolique contagieuse, enracinée
dans la joie de l’Evangile. Le compte rendu d’Olivier Bonnel
« Aujourd’hui
encore, très nombreux sont ceux qui ne connaissent pas Jésus Christ. C’est pourquoi
la mission ad gentes demeure une grande urgence, à laquelle tous les membres de l’Église
sont appelés à participer, parce que l’Église est, de par sa nature même, missionnaire
: l’Église est née "en sortie" ».C’est par ces mots que commence le message du
pape, invitant à renouveler le zèle missionnaire de l’Eglise. Cette journée mondiale
de la mission est l’occasion d’une célébration de grâce et de joie. De grâce, parce
que le Saint Esprit, envoyé par le Père, offre sagesse et force à ceux qui sont dociles
à son action. De joie, parce que Jésus accompagne l’œuvre missionnaire.
«
La joie est celle des disciples fort de l’amour de Dieu qu’ils ont reçu et de la possibilité
de le partager. Mais attention à ceux qui seraient trop pleins d’eux-mêmes et prétendent
déjà tout savoir » avertit le Pape. Non, la mission passe par les “petits”,
les humbles, les simples, les pauvres, les marginalisés, ceux qui sont sans voix,
fatigués et opprimés, et que Jésus rappelle François a déclarés “bienheureux”. En
citant largement Saint Luc, le Pape souligne le plan salvifique et bienveillant de
la part du Père envers les hommes et rappelle cette joie de Jésus qui voyait la réussite
de la mission de ses disciples, une joie pour le salut en acte.
Le manque
de vocations est souvent un manque de ferveur apostolique
Pour François,
la difficulté de la mission est aussi celle du monde contemporain, « marqué par
une tristesse individualiste qui vient du cœur bien installé et avare, de la recherche
malade de plaisirs superficiels et de la conscience isolée » , c’est pourquoi
poursuit-il, l’humanité a un grand besoin de puiser au salut apporté par le Christ,
en portant la joie de l’Evangile, comme le rappelle son encyclique Evangelii Gaudium.
Tous les disciples du Seigneur sont par ailleurs appelés à alimenter cette joie de
l’Évangélisation.
Dans son message, le Saint-Père relève aussi que «dans certaines
régions, le manque de vocations au sacerdoce et à la vie consacrée est souvent du
à un manque de ferveur apostolique contagieuse et encourage ainsi les communautés
paroissiales, les associations et les groupes à vivre une vie fraternelle intense
en étant attentifs aux plus défavorisés. Il rappelle la mission toujours plus importante
des fidèles laïcs dans l’Eglise et l’importance qu’ils soient formés de manière adéquate.
A l’occasion de cette journée, le Pape exhorte enfin à faire mémoire, « comme dans
un pèlerinage intérieur, du « premier amour » avec lequel Jésus a réchauffé le cœur
de chacun, non pas pour en concevoir un sentiment de nostalgie mais pour persévérer
dans la joie.»
Texte intégral du message du Pape François :
Chers
frères et soeurs, Aujourd’hui encore, très nombreux sont ceux qui ne connaissent
pas Jésus Christ. C’est pourquoi la mission ad gentes demeure une grande urgence,
à laquelle tous les membres de l’Église sont appelés à participer, parce que l’Église
est, de par sa nature même, missionnaire : l’Église est née « en sortie ». La Journée
missionnaire mondiale est unmoment privilégié durant lequel les fidèles des
différents continents s’engagent par la prière et par des gestes concrets de solidarité
à soutenir les jeunes Églises des territoires de mission. Il s’agit d’une célébration
de grâce et de joie. De grâce, parce que le Saint Esprit, envoyé par le Père, offre
sagesse et force à ceux qui sont dociles à son action. De joie, parce que Jésus Christ,
le Fils du Père, envoyé pour évangéliser le monde, soutient et accompagne notre œuvre
missionnaire. C’est justement sur la joie de Jésus et des disciples missionnaires
que je voudrais offrir une icône biblique, que nous trouvons dans l’Évangile de Luc
(cf. 10, 21-23). 1. L’Évangéliste raconte que le Seigneur envoya les soixante-douze
disciples deux par deux, dans les villes et les villages pour annoncer que le Royaume
de Dieu s’était fait proche et pour préparer les personnes à la rencontre avec Jésus.
Après avoir accompli cette mission d’annonce, les disciples revinrent pleins de joie
: la joie est un thème dominant de cette première et inoubliable expérience missionnaire.
Le Divin Maître leur dit : « Ne vous réjouissez pas de ce que les esprits vous sont
soumis ; mais réjouissez-vous de ce que vos noms se trouvent inscrits dans les cieux.
A cette heure même, il tressaillit de joie sous l’action de l’Esprit Saint et il dit
: “Je te bénis, Père” (…) Puis, se tournant vers ses disciples, il leur dit en particulier
: “Heureux les yeux qui voient ce que vous voyez !” » (Lc 10,20-21.23). Ce sont
les trois scènes présentées par Luc. D’abord, Jésus parla aux disciples, puis il s’adressa
au Père avant de recommencer à parler avec eux. Jésus voulut faire participer les
disciples à sa joie, qui était différente et supérieure à celle dont ils avaient fait
l’expérience. 2. Les disciples étaient pleins de joie, enthousiastes du pouvoir
de libérer les personnes des démons. Toutefois, Jésus les avertit de ne pas se réjouir
tant pour le pouvoir reçu que pour l’amour reçu : « parce que vos noms se trouvent
inscrits dans les cieux » (Lc 10, 20). En effet, l’expérience de l’amour de Dieu leur
a été donnée ainsi que la possibilité de le partager. Et cette expérience des disciples
est un motif de gratitude joyeuse pour le cœur de Jésus. Luc a saisi cette jubilation
dans une perspective de communion trinitaire : « Jésus tressaillit de joie sous l’action
de l’Esprit Saint », s’adressant au Père et lui rendant gloire. Ce moment de joie
intime jaillit de l’amour profond de Jésus en tant que Fils envers Son Père, Seigneur
du ciel et de la terre qui a caché ces choses aux sages et aux intelligents mais qui
les a révélées aux tout-petits (cf. Lc 10, 21). Dieu a caché et révélé et, dans cette
prière de louange, ressort surtout le fait de révéler. Qu’est-ce que Dieu a révélé
et caché ? Les mystères de son Royaume, l’affirmation de la seigneurie divine en Jésus
et la victoire sur satan. Dieu a caché tout cela à ceux qui sont trop pleins d’eux-mêmes
et prétendent déjà tout savoir. Ils sont comme aveuglés par leur présomption et ne
laissent pas de place à Dieu. Il est facile de penser à certains contemporains de
Jésus qu’il a avertis à plusieurs reprises mais il s’agit d’un danger qui existe toujours
et qui nous concerne nous aussi. En revanche, les “petits” sont les humbles, les simples,
les pauvres, les marginalisés, ceux qui sont sans voix, fatigués et opprimés, que
Jésus a déclarés “bienheureux”. Il est facile de penser à Marie, à Joseph, aux pêcheurs
de Galilée et aux disciples appelés le long du chemin, au cours de sa prédication.
3. « Oui, Père, car tel a été ton bon plaisir » (Lc 10, 21). L’expression de Jésus
doit être comprise en référence à son exultation intérieure, où le bon plaisir indique
un plan salvifique et bienveillant de la part du Père envers les hommes. Dans le contexte
de cette bonté divine, Jésus a exulté parce que le Père a décidé d’aimer les hommes
avec le même amour qu’Il a pour le Fils. En outre, Luc nous renvoie à l’exultation
similaire de Marie : « mon âme exalte le Seigneur, et mon esprit tressaille de joie
en Dieu mon Sauveur » (Lc 1, 47). Il s’agit de la Bonne Nouvelle qui conduit au salut.
Marie, en portant en son sein Jésus, l’Évangélisateur par excellence, rencontra Elisabeth
et exulta de joie dans l’Esprit Saint, en chantant le Magnificat. Jésus, en voyant
la réussite de la mission de ses disciples et, ensuite, leur joie, exulta dans l’Esprit
Saint et s’adressa à son Père en priant. Dans les deux cas, il s’agit d’une joie pour
le salut en acte, parce que l’amour avec lequel le Père aime le Fils arrive jusqu’à
nous et, par l’action de l’Esprit Saint, nous enveloppe, nous fait entrer dans la
vie trinitaire. Le Père est la source de la joie. Le Fils en est la manifestation
et l’Esprit Saint l’animateur. Immédiatement après avoir loué le Père, comme le dit
l’Évangéliste Matthieu, Jésus nous invite : « Venez à moi, vous tous qui peinez et
ployez sous le fardeau, et moi je vous soulagerai. Chargez-vous de mon joug et mettez-vous
à mon école, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez soulagement pour
vos âmes. Oui, mon joug est aisé et mon fardeau léger » (11, 28-30). « La joie de
l’Évangile remplit le cœur et toute la vie de ceux qui rencontrent Jésus. Ceux qui
se laissent sauver par lui sont libérés du péché, de la tristesse, du vide intérieur,
de l’isolement. Avec Jésus Christ la joie naît et renaît toujours » (Exhort. ap. Evangelii
gaudium, n.1). De cette rencontre avec Jésus, la Vierge Marie a eu une expérience
toute particulière et elle est devenue « causa nostrae laetitiae ». Les disciples
par contre ont reçu l’appel à demeurer avec Jésus et à être envoyés par lui pour évangéliser
(cf. Mc 3, 14) et ils sont ainsi comblés de joie. Pourquoi n’entrons-nous pas nous
aussi dans ce fleuve de joie ? 4. « Le grand risque du monde d’aujourd’hui, avec
son offre de consommation multiple et écrasante, est une tristesse individualiste
qui vient du cœur bien installé et avare, de la recherche malade de plaisirs superficiels,
de la conscience isolée » (Exhort. ap. Evangelii gaudium, n. 2). C’est pourquoi l’humanité
a un grand besoin de puiser au salut apporté par le Christ. Les disciples sont ceux
qui se laissent saisir toujours plus par l’amour de Jésus et marquer au feu de la
passion pour le Royaume de Dieu, afin d’être porteurs de la joie de l’Évangile. Tous
les disciples du Seigneur sont appelés à alimenter la joie de l’Évangélisation. Les
Évêques, en tant que premiers responsables de l’annonce, ont le devoir de favoriser
l’unité de l’Église locale dans l’engagement missionnaire, en tenant compte du fait
que la joie de communiquer Jésus Christ s’exprime autant dans la préoccupation de
l’annoncer dans les lieux les plus lointains que dans une constante sortie en direction
des périphéries de leur propre territoire, où se trouve le plus grand nombre de personnes
pauvres dans l’attente. Dans de nombreuses régions, les vocations au sacerdoce
et à la vie consacrée commencent à manquer. Souvent, cela est dû à l’absence d’une
ferveur apostolique contagieuse au sein des communautés, absence qui les rend pauvres
en enthousiasme et fait qu’elles ne sont pas attirantes. La joie de l’Évangile provient
de la rencontre avec le Christ et du partage avec les pauvres. J’encourage donc les
communautés paroissiales, les associations et les groupes à vivre une vie fraternelle
intense, fondée sur l’amour de Jésus et attentive aux besoins des plus défavorisés.
Là où il y a la joie, la ferveur, le désir de porter le Christ aux autres, jaillissent
d’authentiques vocations. Parmi celles-ci, les vocations laïques à la mission ne doivent
pas être oubliées. Désormais, la conscience de l’identité et de la mission des fidèles
laïcs dans l’Eglise s’est accrue, tout comme la conscience qu’ils sont appelés à jouer
un rôle toujours plus important dans la diffusion de l’Évangile. C’est pourquoi il
est important qu’ils soient formés de manière adéquate, en vue d’une action apostolique
efficace. 5. « Dieu aime celui qui donne avec joie » (2 Co 9, 7). La Journée missionnaire
mondiale est également un moment pour raviver le désir et le devoir moral de participer
joyeusement à la mission ad gentes. La contribution économique personnelle est le
signe d’une oblation de soi-même, d’abord au Seigneur puis à nos frères, afin que
l’offrande matérielle devienne un instrument d’évangélisation d’une humanité qui se
construit sur l’amour. Chers frères et sœurs, en cette Journée missionnaire mondiale,
ma pensée se tourne vers toutes les Églises locales. Ne nous laissons pas voler la
joie de l’évangélisation ! Je vous invite à vous immerger dans la joie de l’Évangile
et à alimenter un amour capable d’illuminer votre vocation et votre mission. Je vous
exhorte à faire mémoire, comme dans un pèlerinage intérieur, du « premier amour »
avec lequel le Seigneur Jésus Christ a réchauffé le cœur de chacun, non pas pour en
concevoir un sentiment de nostalgie mais pour persévérer dans la joie. Le disciple
du Seigneur persévère dans la joie lorsqu’il demeure avec lui, lorsqu’il fait sa volonté,
lorsqu’il partage la foi, l’espérance et la charité évangélique. À Marie, modèle
d’évangélisation humble et joyeuse, adressons notre prière, afin que l’Église devienne
une maison pour beaucoup, une mère pour tous les peuples et qu’elle rende possible
la naissance d’un monde nouveau. Du Vatican, le 8 juin 2014, Solennité de la Pentecôte.