(RV) Entretien- Dans l'après-midi du jeudi 22 mai, une conférence de presse
s’est tenue à Yad Vashem pour présenter aux médias le programme de la visite du pape
François dans ce haut lieu de mémoire, le 26 mai prochain. La porte-parole, Mme Iris
Rosenberg, a commencé par tracer le déroulement de la visite. Puis, le président Avner
Shalev en souligna le sens, et apporta quelques détails supplémentaires.
«
Se souvenir du passé, façonner l'avenir »
Dr. Shalev a commencé par
déclarer que ce sera un grand honneur pour Yad Vashem que de recevoir le pape François,
chef et représentant d'une communauté de plus de 1 300 millions de Catholiques. Ce
sera la troisième visite d'un pape, après celle de Jean-Paul II en 2000 et de Benoît
XVI en 2009. Les relations cordiales que Jorge Mario Bergoglio a su tisser en Argentine
avec les Juifs sont déjà bien connues, tout comme son estime pour le judaïsme, ainsi
que sa position sur la Shoah. Il se place dans la continuité de ses prédécesseurs,
dans une attitude de grande proximité avec le peuple juif. Dans ce contexte, le pape
François viendra raviver la flamme de la Salle du Souvenir, et prendra la parole devant
les plus hautes personnalités de l'État d'Israël ; son discours sera le seul.
Le
Dr. Shalev a ainsi attiré l'attention sur la « vision et la mission » de Yad Vashem,
bien résumée par son slogan « Se souvenir du passé, façonner l'avenir », ainsi que
par son logo représentant un germe vert poussant à partir de fils de fer barbelés.
Depuis 60 ans, Yad Vashem est avant tout un lieu où reste conservé le souvenir d'un
passé tragique sans cesse étudié et transmis. Mais l'histoire doit servir de base
pour aller de l'avant et nous engager tous à bâtir ensemble un avenir meilleur, où
de telles tragédies ne pourront plus jamais se reproduire. En ce sens, la visite du
pape réaffirme l’engagement commun à lutter contre toutes les formes d'antisémitisme
et d'anti-humanisme.
Etudes sur le rôle de Pie XII toujours en cours
Le
Dr Shalev a consacré la plus longue partie de son discours à la présentation de trois
moments particuliers de la visite, lorsque seront lues la dernière lettre d’une mère
de 22 ans, Ida Goldish, à la veille de son voyage sans retour, et quelques strophes
d'un poème d’Abramek Koplowicz, un garçon juif qui, depuis le ghetto de Lodz, rêvait
de voler libre au-dessus du monde, d'une merveille à l'autre, jusqu'à la Sainte Terre
de l'Alliance. Enfin, M. Shalev a présenté le tableau peint par ce même poète lorsqu’il
n’avait que 13 ans. L’œuvre représente un rabbin enveloppé dans talith, qui dans une
humble attitude se tient face au « tabernacle de la Torah », se tournant vers Dieu
dans la prière. Une copie de cette peinture sera remise au pape François. Les valeurs
qu'elle exprime ne sont pas seulement juives, mais universelles : toute personne de
foi connaît et fait trésor de cette expérience profonde de la relation avec Dieu dans
la prière - a commenté le Dr. Shalev.
S’en sont suivies les questions posées
par les nombreux journalistes, représentants des médias locaux et internationaux.
L’un d’entre eux a fait observer que le pape François ne visiterait pas la partie
de l’«exposition» concernant l'histoire de la Shoah et de ses racines plongées dans
l'antisémitisme, et qu’il ne passerait pas non plus devant le panneau sur Pie XII
qui, bien que réhabilité, subit encore un certain jugement critique quant à son rôle
historique. Le Dr. Shalev a répondu en disant que le pape François était déjà informé
de cette présente section. Il a ajouté que Yad Vashem menait des recherches sur la
période du pontificat de Pie XII, selon les critères de l'objectivité historique et
de la rigueur scientifique, afin de présenter des résultats de manière la plus équilibrée
possible. À cet égard, M. Shalev a rappelé la journée d'étude entre les experts juifs
et chrétiens, qui s'est tenue en mars 2009, conjointement organisée par Yad Vashem
et par le Centre d’études théologiques salésien « Ratisbonne » de Jérusalem. Enfin,
il déclaré que d’autres pièces des archives du Vatican seront mises à la disposition
des chercheurs, conformément à la promesse émise en cette circonstance, récemment
réitérée par le pape François. «Nous savons que les travaux de préparation sont
en cours » - a-t-il conclu.
Don Gianni Caputa, présent à cette conférence
de presse en tant que membre de la Commission du Vatican pour les mass-media, en a
profité pour exprimer sa réaction « à chaud ». Elle est affectée par la tonalité d'espoir
des textes / documents sélectionnés par Yad Vashem pour cette occasion, dont les auteurs
sont deux jeunes victimes de la Shoah. Il pense que le pape appréciera beaucoup ce
message qui, bien que provenant d'un lieu de souffrance, de douleur et de mort, ouvre
à la vie et à l’espoir en l’avenir. Par conséquent, la présence des deux jeunes chrétiens,
une fille et un garçon, aux côtés du Saint-Père, est très significative : ces deux
enfants de travailleurs immigrés appartenant à la « communauté catholique d’expression
hébraïque » poseront avec le pape François la couronne de fleurs à côté de la flamme
éternelle.
Notre envoyé spécial en Terre Sainte, Bernard Decottignies s'est
entretenu avec le père Giovanni Caputa, membre de la commission pour les médias
de cette visite papale, et spécialiste des rapports judéo-chrétiens :
Photo
: «Prière», l'œuvre du poète Abramek Koplowicz. Une copie de cette peinture sera offerte
au Pape François