2014-04-15 09:43:32

Quand Cuba s'ouvre à la France


(RV) Entretien - Visite historique à Cuba : le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, s’est entretenu longuement dimanche avec le président Raul Castro. Il a pu aborder avec lui la question des droits de l’homme. Il a aussi rencontré le cardinal Ortega, archevêque de La Havane, et des entrepreneurs français installés sur place.

Cuba s’ouvre timidement aux investissements étrangers, mais la capacité de l’île à s’ouvrir au commerce reste inégale selon les secteurs. Cette visite était historique car aucun ministre français n’avait visité cette île communiste depuis plus de 30 ans.

La France est pourtant plutôt bien perçue par les Cubains, comme l’explique Christian Girault, chercheur au CNRS et spécialiste de Cuba RealAudioMP3

Texte intégral de l'entretien :

La France peut jouer un rôle important. Il y a toujours le prestige du passé, des grands écrivains, des grands intellectuels français et ça joue évidemment beaucoup à Cuba sur la fibre révolutionnaire. Utiliser Cuba comme un pont avec certains pays des Caraïbes ou certains pays de la zone latino-américaine, dans les deux sens d’ailleurs, ça paraît une diplomatie assez habile et correcte. Ce voyage était certainement plutôt bienvenu et finalement, il a été assez bien reçu puisqu’il a quand même été reçu non seulement par le ministre lui-même mais aussi par Raoul Castro, le chef d’État.

Aujourd’hui, quelle est la situation économique à Cuba ? Est-ce que le pays est capable de s’ouvrir à des échanges commerciaux ?
Il y a des points positifs et des points difficiles. Sur le plan financier, la situation n’est pas brillante parce que les cubains essayent de supprimer le double cours du peso. En fait, il y a un peso qui est plus au moins attaché au dollar, le peso qu’utilisent les touristes et puis, il y a un peso local. L’idée, ça serait de rétablir une seule monnaie unique mais la situation financière est très difficile. Le pays a beaucoup de dettes et peu de partenaires financiers. C’est un point très difficile. Les atouts du pays, c’est plutôt sa position stratégique qui a toujours été le grand atout de Cuba puisqu’il est en fait très proche des États-Unis, du Mexique et du canal de Panama. L’agriculture ne va pas bien du tout et l’industrie est très chancelante. Il y a quelques points positifs sur la recherche et le développement. En particulier, il y a un secteur de biotechnologie qui fonctionne bien, qui est reconnu dans le secteur de la recherche. On a découvert des vaccins et on est en train de mettre au point des vaccins contre certaines maladies infectieuses, contre l’hépatite b. Il y a un secteur et des investisseurs français qui sont intéressés par ce secteur de biotechnologie.

Et cette présence française, c’est un phénomène nouveau ou l’influence française est-elle déjà bien encrée à Cuba ?
Les relations sont quand même assez chaleureuses dans un certain sens. Ca ne concerne peut-être pas l’ensemble des politiques français mais par exemple, le président du Sénat français a passé la fin de l’année dernière à la Havane. Il faut dire qu’il est marié à une cubaine, une dame de Cuba. Donc, ça facilite les choses. Et puis aussi, les relations culturelles sont assez importantes. On sait qu’il y a beaucoup d’inscrits à l’alliance française à la Havane. Beaucoup d’étudiants apprennent le français pour travailler dans le secteur touristique, le secteur des hôtels. C’est important pour eux. Mais d’une façon générale, ce qui vient de France est plutôt bien vu.

Laurent Fabius a rencontré l’archevêque de la Havane, le cardinal Ortega. C’est une rencontre un petit peu étonnante d’un point de vue français. Quelle est aujourd’hui l’influence de l’Église dans la société cubaine ?
L’Église a un rôle important, d’autant que les observateurs ont remarqué une pratique religieuse plus importante depuis quelques années, de façon générale à Cuba. Et puis, les évêques et l’archevêque sont devenus des interlocuteurs. La société civile est presque absente à Cuba et en réalité, l’Église avec son organisation et ses fidèles représentent un véritable interlocuteur pour le régime. Et les relations sont très suivies. D’ailleurs, l’Église cubaine a envoyé un certain nombre de messages au gouvernement à plusieurs reprises. Le message, c’était de laisser quand même un peu plus de marge à l’expression politique ou à l’expression citoyenne.


Photo : Laurent Fabius, le ministre français des Affaires étrangères, à La Havane, ce week-end








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