Jean-Paul II, sa relation privilégiée avec les jeunes
(RV) Témoignage - Dimanche matin a eu lieu sur la place Saint-Pierre la célébration
solennelle du Dimanche des Rameaux, présidée par le Pape François. Cette fête coïncidait
avec la 29ème Journée diocésaine de la Jeunesse. A la fin de la messe, un groupe de
jeunes brésiliens a remis la croix des JMJ aux jeunes polonais qui la porteront en
pèlerinage jusqu’à Cracovie.
Cette croix, c’est celle que Jean-Paul II a donnée
il y a 30 ans au centre San Lorenzo. Ce Centre situé à quelques mètres de la place
Saint-Pierre, entièrement consacré aux jeunes du monde entier, a été fondé en 1983
par Jean-Paul II. C’est ici que se sont retrouvés dimanche après la messe, quelques-uns
des près de 250 délégués des conférences épiscopales de 90 pays et de 45 communautés,
associations et mouvements de jeunes catholiques. Ils ont participé la semaine dernière,
près de Rome, à une rencontre internationale organisée par le Conseil pontifical pour
les laïcs, en vue des JMJ 2016 à Cracovie.
Parmi eux, il y avait Soeur
Nathalie Becquart. Religieuse Xavière, elle est la directrice du Service national
français pour l'évangélisation des jeunes et pour les vocations. A cette occasion,
nous avons évoqué avec elle la relation privilégiée nouée par Jean-Paul II avec les
jeunes ou encore l’héritage qu’il en reste aujourd’hui : . Des propos recueillis
par Audrey Radondy.
Moi, ce qui m’habite, c’est le fait qu’il ait fait vraiment
confiance aux jeunes, qu’il leur ait proposé de se réunir. C’est lui qui a initié
les journées mondiales de la jeunesse. Mais plus que cela, il avait été aumônier de
jeunes et ça, c’est quand même important. Quand il est arrivé comme Pape, il avait
toute son expérience, tout ce qu’il avait fait avec les jeunes, notamment à Cracovie.
Il a été très proche d’eux. Il a lui-même expérimenté comme jeune, le fait de chercher
son orientation de vie, de découvrir sa vocation. Et donc, il a vraiment fait confiance
aux jeunes et il leur a donné un grand chemin, celui de la Sainteté en les appelants
à être audacieux et à suivre le Christ. Ce qu’il habitait, c’était que les jeunes
rencontrent le Christ. Et aussi le fait que les jeunes sont un don pour l’Église et
aussi qu’à travers eux, il y a quelque chose de l’avenir qui s’ouvre et qui peut revivifier
l’Église.
Et si je vous dis « quand Jean-Paul II parlait aux jeunes » Alors,
je dirais « quand Jean-Paul II parlait aux jeunes », c’est vrai qu’il avait un charisme
très fort. Quand j’étais encore jeune novice, que je venais d’entrer dans ma communauté
Xavière, j’ai participé aux JMJ de 1997 et c’est vrai que je me souviens vraiment
de ce qui se passait, notamment la veillée de Longchamp. J’ai vraiment perçu à travers
Jean-Paul II quelque chose du visage du Christ qui nous rejoignait à travers lui et
à travers ses paroles.
Et qu’est-ce que ses messages, ses actes ont changé
pour vous ? Moi, je ce que je peux surtout dire aujourd’hui par rapport à la
mission que j’ai reçu au service de l’évangélisation et de la pastorale des jeunes
en France, c’est qu’il y a vraiment un avant 1997 et un après. Donc, c’est vrai les
JMJ et le fait qu’on ait eu la chance en France de recevoir ces JMJ très tôt en 1997,
ça a eu un vrai impact et ça a lancé toute une dynamique de pastorale des jeunes dans
les diocèses, d’une certaine coordination permettant aux différents acteurs de travailler
ensemble. Plus personnellement, j’ai aussi eu la chance de rencontrer Jean-Paul II.
Alors là, j’étais encore très jeune adolescente quand il est venu en France à Lisieux.
Je crois que c’était en 1981, si je ne me trompe pas. Et son appel « n’ayez pas peur
» m’a beaucoup rejointe et m’a finalement invité dans cette confiance.
Comment
son héritage a-t-il évolué avec les nouvelles générations ? C’est vrai, lorsque
je vois les gens de ma génération, on a connu Jean-Paul II, on a été marqué par les
JMJ, par ses voyages, par ses paroles. On se disait récemment que la jeune génération
qui arrive aujourd’hui, lorsque Jean-Paul II est mort, ils avaient neuf-dix ans. Donc,
ce n’est pas pareil. Ils en entendent parler, il y a un héritage qui se transmet mais
qui est certainement aussi à faire fructifier pour leur faire découvrir. Le risque,
c’est de réduire Jean-Paul II à une ou deux phrases ou à un aspect. Il a eu un impact
et une personnalité très riche. Sa manière de dynamiser l’Église, je dirais, est très
large. Voilà, on ne peut pas le réduire à une seule facette et ça, je crois que c’est
important pour les jeunes et leur faire découvrir aussi comment cet homme qui était
vraiment un homme de prière a aussi eu une action à travers son engagement de foi
qui a eu un impact pour le monde. Jean-Paul II, ce n’est pas seulement un héritage
pour les jeunes catholiques, je crois que c’est aussi un héritage pour le monde entier.
Les polonais le sentent bien et vont être massivement présents aux canonisations.
Est-ce que vous pensez que le catholicisme militant de Jean-Paul II a décomplexé
les catholiques et les a poussés à s’exprimer davantage dans l’espace publique ? Vous
savez, chaque Pape arrive à une époque donnée. Aujourd’hui, on n’est plus dans le
même contexte que celui des années’80-90. Jean-Paul II a déployé tout son charisme
pour l’Église, il y a participé et ce n’est sans doute pas le seul. En France, c’est
aussi une histoire de l’Église de France qui fait qu’aujourd’hui, les catholiques
osent davantage dire qu’ils sont catholiques mais aussi parce qu’ils sont beaucoup
plus minoritaires. Donc ça, ca change beaucoup les choses et moi je le vois très concrètement
chez les jeunes. Ils sont très peu nombreux au milieu des autres comme jeunes catholiques
engagés et en même temps, quand ils ont découvert le trésor du Christ, ils ont à cœur
de le partager. Et je crois que le Pape Jean-Paul II les a invités à ouvrir grand
les portes de leurs cœurs et les portes de la foi, à être témoins du Christ. Benoît
XVI a sa manière a affirmé cela et le Pape François aussi, aujourd’hui. Il y a comme
une continuité entre ces Papes mais en même temps, des styles et des charismes très
différents. C’est ça toute la richesse de l’Église.
En parlant de charisme
et de style différents, quels sont, selon vous, les similitudes et les différences
entre Jean-Paul II et le Pape François ? Déjà, on voit bien qui est le Pape
François et quel est son style, son charisme. En même temps, ça ne fait qu’un an qu’il
est Pape. Avec Jean-Paul II, on a eu une longue histoire. En tous les cas, chez tous
les deux, on sent une très grande ferveur, un très grand encrage dans la prière. C’est
très important. C’était vrai aussi pour Benoît XVI. C’est d’abord et avant tout des
hommes de prière, une prière qui les invite vraiment à rayonner du Christ et aussi
avec une dimension missionnaire qui est très forte. Je crois qu’elle est très présente
chez Jean-Paul II et chez le Pape François. Après, leur différence majeure, je crois
que c’est aussi une différence de culture. Ils sont enracinés dans un pays, dans une
histoire, dans une culture. C’est vrai que Jean-Paul II a vécu le communisme, ça l’a
énormément marqué. Il a vécu toute cette histoire de la Pologne, cette histoire des
pays de l’est. C’est aussi avant tout, celui qui a contribué à faire tomber le mur
de Berlin. Il avait du coup, un rapport au monde, à la société marquée par cet héritage
là alors que le Pape François est profondément latino-américain. Il a vécu dans une
toute autre culture avec un style très relationnel, très affectif qui était aussi
en partie présent chez Jean-Paul II mais qui s’exprime autrement chez le Pape François.
Et puis surtout, il a cette expérience de pays avec une pauvreté qui est autre que
celle qui était présente en Europe de l’est et cette invitation très forte de l’Église
d’Amérique latine à être très présente auprès des plus pauvres , à aller vers les
périphéries. Aujourd’hui, je crois qu’il apporte cette tonalité très forte.
Photo
: Jean-Paul II le 15 août 2000 face à quelque 150 000 pélerins sur la place Saint-Jean
de Latran à Rome pour l'ouverture des 15e Journées mondiales de la Jeunesse