2014-03-19 18:24:33

Au Sénégal, des accouchements à domicile sont sujets à drames


Les accouchements à domicile et sans assistance médicale, souvent mortels, font le lit de drames au Sénégal. A Ndiaganiao, une zone situé au centre-ouest du Sénégal, qui focalise 39 villages totalisant 50.000 habitants, la majorité des femmes accouchent à domicile. De nombreuses femmes des zones rurales de cette région sont ainsi obligées d'accoucher à domicile faute de moyens de déplacement notamment. «Quand je commence à ressentir des maux de ventre, c'est souvent la nuit. Je n'ai pas toujours une charrette ou un autre véhicule pour aller dans une structure de santé» affirme Diakhère Ndong, une mère de famille d’une localité de la région de Thiès à l’ouest du pays, où six de ses sept enfants sont nés à la maison. «Pour mon septième enfant, l'infirmier m'a internée quand je suis venue me soigner de paludisme. J'ai accouché deux heures après» poursuit cette femme menue de 40 ans enceinte de son huitième enfant.

C’est un drame que nous ne souhaitons plus revivre

Adja Oumou Anne, une sage femme à Notto-Diobass dans un village proche de Ndiaganio a indiqué que la structure de santé locale a enregistré en janvier quinze naissances, par quinze femmes dont dix ont accouché à domicile. "Les drames proviennent de ces accouchements à domicile. Il est arrivé que des femmes meurent d'hémorragie. C'est un drame que nous ne souhaitons plus revivre", a déclaré Amadou Bèye, unique infirmier de Ndiaganiao, lors d'un forum sur la santé mercredi 12 mars dernier.
Le forum dans le cadre du programme de lutte contre la mortalité maternelle et infantile en Afrique, s'est tenu en présence de responsables de l'Association pour la médecine et la recherche en Afrique (Amref), une ONG africaine de santé publique, et de la Fondation Sanofi Espoir basée en France. Selon l'Amref et la Fondation Sanofi Espoir, citant des chiffres officiels, le taux de mortalité maternelle a été réduit au cours des 20 dernières années au Sénégal. Mais avec 392 pour 100.000 naissances vivantes, ce taux demeure toujours élevé. Quant à la mortalité néonatale, elle a régressé de 35 à 26% entre 2005 et 2012, mais reste toujours élevée. Elle représente à elle seule 40% de la mortalité infantile.

Les risques liés à l’accouchement à domicile

Selon l'infirmier Bèye, sur 263 accouchements en 2013 à Ndiaganiao, 61 l'ont été à la maison, soit près de 25%. Des femmes accouchent à domicile et se font ensuite examiner mais d'autres ne viennent pas. Il y en a qui ne font pas de consultations prénatales et souffrent après d'hémorragies, d'anémies et d'infections précise t il.

Des facteurs culturels expliquent les accouchements à domicile

Les belles-mères prennent presque toutes les décisions en milieu rural. Elles disent à leurs belles-filles qu'une brave femme accouche à la maison. Ami Sène, une habitant de Ndiaganiao, confirme: «Nos mamans nous encouragent à accoucher à domicile mais le coût élevé des frais médicaux explique que beaucoup de femmes ne vont pas voir l'agent de santé ». Ce coût, accouchement et frais médicaux compris, varie entre 8.000 et 9.000 FCFA (entre 12 et 13,7 euros) dans le public. Il monte à 20.000 FCFA (30,4 euros) dans le dispensaire privé du village. Pour le chef d'un village voisin de Ndiaganiao, un autre problème est lié aux femmes qui cachent leur grossesse et ne vont pas voir l'agent de santé. Selon des croyances populaires, annoncer sa grossesse peut faire perdre le bébé.

Awa Diouf, une responsable locale d’organisations de femmes, résume la situation: «Nous souffrons d'un déficit en structures de santé et les difficultés sont dues à la pauvreté. Les routes sont mauvaises et nous sommes dans une zone enclavée. Des villages n'ont aucune structure de santé». Et enfin, l'Amref et la Fondation Sanofi veulent dans leur programme en Afrique de l'Ouest, dont le Sénégal est un pays pilote, accroître le nombre de sages-femmes et renforcer leurs capacités.

Les accoucheuses traditionnelles

Par ailleurs, dans le cadre de référence sur les accoucheuses traditionnelles, selon l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) la moralité maternelle représente actuellement encore plus de 1/6ème des décès des femmes dans le pays en voie de développement. En 2007, 54% des femmes d’Afrique dont 94% en Ethiopie accouchent encore à domicile. On estime à 4 millions par an le nombre de décès néonataux, maximum au cours de la première semaine, dont 99 % dans les pays en voie développement. En effet, en 2009, on estime le taux décès néonatal à 88 sur 1000 en Afrique et le nombre d’enfant morts nés s’élève également à 4 millions par an.
Comme pour la mortalité maternelle, la majorité de ces décès ont une origine curable. Ainsi la prématurité (28%), les infections (26%) et l’hypoxie néonatale (23%) en sont les causes principales. Ces décès sont par ailleurs fortement corrélés à l’état de santé et aux complications maternelles. Devant ce constat inquiétant, la communauté internationale a décidé de faire de la santé materno-infantile une priorité de santé publique.








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