Crimée : un prêtre gréco-catholique brièvement enlevé
A la veille du referendum en Crimée, l'aumônier militaire de la péninsule séparatiste
ukrainienne, le curé gréco-catholique de la paroisse de la Dormition de la Vierge
à Sébastopol, a été enlevé pendant quelques heures avant d’être libéré, annonce ce
soir le chef de la police locale.
C'est Risu, le service d’information religieuse
de l’Ukraine, qui a été le premier a donné la nouvelle : le père Mykola Kvich a été
enlevé ce samedi dans son Eglise par des hommes armés membres des milices pro-russes
qui occupent la Crimée. Sur les ondes de Radio Vatican, Mgr Borys Gudziak l’exarque
pour les Ukrainiens gréco-catholiques, l’a confirmé et signifié sa « grande préoccupation
».
Son domicile perquisitionné
Son portable sonnait mais dans
le vide. Le prêtre a été conduit en voiture « contre sa volonté » dans un lieu inconnu.
Il y a été détenu « brièvement », pendant que la police perquisitionnait son domicile.
Selon l’AFP, elle y aurait retrouvé des gilets pare-balles. Ce soir, c'est la police
qui annonce avoir libéré le père Mykola Kvich .
Selon le père Iavorski, le
responsable gréco-catholique de l'aumônerie des forces armées et de la police en Ukraine,
le fait que le père Kvich soit aumonier militaire peut être une raison de son enlèvement.
Comme
de nombreux autres prêtres gréco-catholiques, le père Mykola Kvich avait été plusieurs
fois menacé et invité à quitter la péninsule ukrainienne ces derniers mois. Comme
la totalité d’entre eux, il avait tenu à rester auprès de ses fidèles.
«
Une occupation en Crimée»
Dans un entretien accordé
à la Conférence des éveques de France, Mgr Borys Gudziak, êvêque de l'Éparchie de
Saint-Vladimir-le-Grand, revient sur les défis que doit aujourd’hui relevé l'Eglise
Ukrainienne Gréco-Catholique : « A présent, toutes les institutions ukrainiennes,
et pas uniquement les Eglises, sont face à d'énormes défis. Nous avons un conflit
en Crimée, que nous pouvons ouvertement nommer une guerre et une occupation. Dans
l'Est du pays, nous sommes face à de nombreuses incertitudes. Tandis que dans bien
d'autres régions, la situation reste délicate. Toutefois, on peut observer
déjà comment la société ukrainienne a changé. Les gens sont devenus plus responsables,
plus solidaires, mais également, bien plus exigeants vis-à-vis des autorités. Et les
Eglises, en tant que composante importante de la société civile vont devoir prendre
en compte ces challenges sociaux. Nous devons et devrons faire face à des
défis ecclésiaux. L'Orthodoxie ukrainienne est divisée : il existe un conflit aigu
entre l'Eglise Ukrainienne Orthodoxe du Patriarcat de Moscou, et l'Eglise Ukrainienne
Orthodoxe du Patriarcat de Kiev. Sur le Maïdan, nous avons découvert et vécu un œcuménisme
et un dialogue interreligieux authentiques. Maintenant, nous devons transformer cette
spiritualité du Maïdan d'aide mutuelle et de respect fraternel en une coopération
pacifique. Nous voyons de très prudentes avancées dans la direction d'une unité des
Eglises Orthodoxes, tout du moins les discussions sur la nécessité du dialogue sont-elles
ré-ouvertes. Cependant, des facteurs internes et externes freinent encore le processus,
et la situation évoluant tellement rapidement, il est difficile de prévoir quoi que
ce soit. »
5 millions de fidèles catholiques en Ukraine
Plus
de 97% des communautés religieuses actuellement enregistrées en Ukraine sont des communautés
chrétiennes. La moitié d'entre elles sont de tradition orthodoxe. L'autre moitié se
divise entre catholiques et protestants. Les catholiques en Ukraine sont peu nombreux.
L'Eglise Ukrainienne Gréco-Catholique et l'Eglise Catholique Romaine en Ukraine représentent
5 millions de fidèles pour 46 millions d'Ukrainiens.
L'Eglise Ukrainienne
Gréco-catholique a un héritage unique de résistance et, par la même, une autorité
morale forte dans toute la société. Interdite par les autorités soviétiques en 1946,
cette Eglise a fonctionné et servi ses fidèles dans les catacombes et a été le plus
grand mouvement d'opposition au totalitarisme soviétique. « L'Eglise Ukrainienne
Gréco-Catholique (UGCC) a été presque totalement anéantie durant la période soviétique
et a survécu dans la clandestinité de 1946 à 1989. Après sa légalisation en 1989,
l'UGCC a redémarré avec 300 prêtres de 70 ans d'âge moyen. A présent, les prêtres
sont plus de 3000, et la plupart sont de jeunes prêtres », a précisé Mgr Gudziak.