(RV) Près d’un an après son élection, le Pape François est revenu, dans une longue
interview au quotidien italien Corriere della Sera, sur quelques aspects marquants
de son magistère, de la vie de l’Eglise, de ses choix vis-à-vis de la Curie et de
ses relations avec son prédécesseur Benoît XVI. L’interview, réalisée à la résidence
Sainte-Marthe, révèle aussi quelques aspects moins connus de l’évêque de Rome.C’est
la troisième fois que le Pape argentin accorde une interview à un quotidien italien.
«Benoît
XVI n’est pas une statue conservée dans un musée, c’est une institution ; nous n’étions
pas habitués à une telle situation mais cela se répètera peut-être». Le Pape François
s’exprime en toute liberté, sur son prédécesseur mais aussi sur ses propres gouts
et points de vue. «J’aime vivre au milieu des gens, je n’aime pas les interprétations
idéologiques, je trouve offensant qu’on représente le Pape comme une sorte de superman».
Bref il n’apprécie pas l’idéalisation de sa personne, une certaine mythologie du
pape François note t-il : quand on dit par exemple qu'il sort de nuit du Vatican
pour aller donner à manger aux clochards, cela ne lui est jamais venu à l'esprit.
Le Pape n’est pas seul, il est entouré de collaborateurs et écoute ses conseillers
; mais au moment de décider il prend seul ses responsabilités.
Pas de sujets
éludés
Dans cette interview, le Pape François n’élude pas les thèmes qui
fâchent à commencer par le scandale des abus sexuels. A ce sujet, ces propos sont
fermes : «l’Eglise a fait beaucoup. Elle est peut-être la seule institution publique
à avoir agi avec transparence et responsabilité. Et pourtant elle est la seule à être
attaquée», s’insurge-t-il dans une allusion à un rapport très critique de l’ONU.
Les sujets chauds de société sont abordés. A propos des divorcés remariés, toute décision
sera le fruit d’une réflexion profonde. Le mariage, c’est un homme et une femme ;
les unions civiles, justifiées par les Etats laïcs pour régler des aspects économiques,
doivent être évaluées dans leur variété. Quand il évoque aussi l'encyclique Humanae
Vitae, il défend Paul VI qui a eu le courage de s'opposer au néo-malthusianisme mais
qui recommandait aussi beaucoup de miséricorde, d'attention aux situations concrètes.
Sur la fin de vie, le Pape défend les soins palliatifs et critiques l'acharnement
thérapeutique. Le rôle de la femme dans l’Eglise mérite un approfondissement théologal
qui a déjà commencé, précise t-il encore. Pour lui, il n’y a pas de valeurs non
négociables, il n’y a que des valeurs tout court. Enfin, des questions œcuméniques
et internationales ont été également abordées dans l'entretien : le Saint-Siège entretient
des rapports avec la Chine, quant aux orthodoxes il faut marcher et travailler ensemble
sur la route de l’unité. Le Saint-Père explique par ailleurs avoir renouvelé son passeport
argentin parce qu'il était arrivé à échéance, qu'il veut aller en Terre Sainte, en
Asie, en Afrique, avant de retourner en Argentine, dont il ne ressent pas la nostalgie.