Livre : le désarmement nucléaire, une arme pour la paix
(RV) Entretiens - En France, on parle souvent de nucléaire civil, mais en revanche
beaucoup plus rarement de nucléaire militaire. L’Eglise veut aujourd’hui changer la
donne et relancer le débat autour du désarmement. Mais comment convaincre les Etats
qui ont la bombe ou qui aspirent à la posséder, d’y renoncer ? Comment faire comprendre
qu’un désarment nucléaire est une option crédible pour obtenir la paix ? Pour faire
connaitre leur point de vue et analyses, la commission justice et paix, Pax Christi
et la faculté de sciences sociales et économiques (FESSE) de l’Institut catholique
de Paris publient un livre aux Editions de l’Atelier. Il est intitulé « La paix sans
la bombe ? ».
Mgr Boivineau, l’évêque d’Annecy et président de Justice
et Paix France, nous rappelle le point de vue de l’Église sur l’armement nucléaire.
Le Saint-Siège encourage un désarmement multilatéral et négocié par paliers successifs
:
Sylvie
Bukhari - de Pontual, avocate au barreau de Paris et présidente de la Fédération internationale
de l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (FIACAT) nous explique
pourquoi les Etats tels que l’Inde, les Etats-Unis ou la France restent aujourd’hui
convaincus par le nucléaire militaire :
Présentation
du livre par les éditeurs
«Alors que l’éventuelle détention de la bombe
nucléaire pour des pays comme l’Iran ou la Corée du Nord inquiète, la question de
la pertinence de l’arme nucléaire pour les grandes puissances n’est pas vraiment remise
en cause. Dans un pays marqué par les risques terroristes et les instabilités du pourtour
méditerranéen et de l’Afrique, l’arme nucléaire est-elle toujours pertinente ? Cet
ouvrage aborde le sujet sans tabou, sous tous ses aspects, notamment celle d’une éthique
chrétienne, pour relancer le débat sur la pertinence de l’arme nucléaire.
L’arme
nucléaire ne suscite plus aujourd’hui le même effroi. La crainte d’un « holocauste
», présente dans un grand nombre de pays durant la guerre froide, s’éloigne. Pourtant,
les risques liés à l’existence de vastes stocks d’armes nucléaires ne diminuent pas.
Malgré leur suréquipement, les États-Unis et la Russie semblent plus préoccupés d’empêcher
d’autres pays d’acquérir l’arme que de progresser vers de nouvelles réductions. Certains
détenteurs de l’arme nucléaire (Pakistan, Chine, Israël, Inde) en font la garantie
de leur sécurité, voire poursuivent une course aux armements dangereuse. Enfin des
pays non-possesseurs veulent au moins parvenir au « seuil » du nucléaire militaire
(Iran), ou parviennent même à se doter de l’arme à un stade embryonnaire (Corée du
Nord).
Face à cette prolifération, n’y a-t-il d’autre réponse que le recours
à la force ? Comment concilier l’affirmation faisant du nucléaire la garantie ultime
de la sécurité pour quelques-uns et l’interdiction faite à tous les autres de se doter
de l’arme ? Est-il réaliste de vouloir construire un ordre international fondé sur
la coopération des États en s’accommodant de l’anarchie nucléaire ? D’ailleurs, si
en France la dissuasion nucléaire semble généralement acceptée, sa fonction de sécurisation
convainc beaucoup moins les opinions occidentales.
Soucieux de répondre aux
questions éthiques que les Églises et de nombreuses organisations de la société civile
soulèvent à propos de la dissuasion nucléaire, les auteurs de l’ouvrage proposent
de ne plus penser celle-ci seulement dans le cadre d’une stratégie de défense nationale
mais de l’intégrer dans une stratégie de désarmement qui pourrait notamment être portée
par la France et ses partenaires européens et devenir un objectif de l’Union européenne.
Car l’option du désarmement est crédible, puisqu’elle a déjà permis des succès importants
comme les accords bilatéraux américano-russes ou multilatéraux comme les zones dénucléarisées,
ou encore le moratoire appliqué sur les essais. Un engagement de politique étrangère
des États membres dans une stratégie de désarmement négocié donnerait en outre à l’Union
européenne un objectif partagé par la majorité des populations et renouvellerait ainsi
des postures manifestement figées. »
Photo : Manifestation anti-nucléaire
en Allemagne. Une tête de mort sur un parapluie noir et jaune, symbole du nucléaire.