(RV) Entretien - Le Liban a un nouveau gouvernement de compromis depuis ce
samedi. Après dix mois de blocage, les partis politiques sont parvenus à se mettre
d’accord pour préserver l’intérêt national comme l’a affirmé le nouveau Premier ministre
Tammam Salam. La nouvelle équipe compte vingt-quatre ministres : huit au camp du Hezbollah,
huit au camp de Saïd Hariri et huit à des proches du président de la République Michel
Sleimane.
La volte-face du chef de file du camp du 14 mars, Saïd Hariri, qui
refusait jusqu’à présent de participer à un gouvernement avec le Hezbollah, a, semble-t-il,
en partie débloqué la situation. La multiplication des attentats et des assassinats
ces derniers mois, explique aussi qu’un compromis a été trouvé alors que les problèmes
sécuritaires, économiques et sociaux ne cessent d’augmenter.
Pourtant, rien
de neuf n’est à signaler concernant ce gouvernement, comme l’explique à Xavier Sartre,
Vincent Geisser chercheur à l’Institut français du Proche-Orient à Beyrouth
«
On est dans une sorte de compromis d’élites qui n’ont pas véritablement produit de
grandes réformes sociales et politiques qui donnent une impression d’immobilisme qui,
paradoxalement vient rassurer les Libanais qui étaient inquiets de l’absence de gouvernement
depuis un an », souligne le chercheur.
« Les politiques libanais ont pris
conscience du danger de la violence et de ses effets catastrophiques et les assassinats
et les attentats de ces dernières semaines ont accéléré une sorte de responsabilisation
de la classe politique qui se rendaient compte que les conséquences de la crise syrienne
au Liban devenaient catastrophiques en terme de cohésion sociale et de sécurité des
élites. Il y a un réflexe auto-protecteur de la part des élites qui ont formé ce gouvernement
pour se protéger » analyse Vincent Geisser.
Hezbollah vainqueur du rapport
de force
Le Hezbollah apparait comme le vainqueur de cette sortie de crise
qui consacre sa position incontournable sur la scène politique libanaise. Le camp
du 14 mars faisait de l’exclusion du parti chiite la condition sine qua non pour sa
participation à un nouvel exécutif. Il a finalement reculé. La milice du Hezbollah,
véritable armée, est donc toujours présente. La participation de ses membres aux côtés
des troupes de Bachar al Assad en Syrie n’est pas remise en cause.
Le nouveau
gouvernement devra affronter le problème que cause la présence de plus d’un million
de réfugiés syriens qui ne disposent d’aucun statut et d’aucun camp officiel. Il devra
aussi s’atteler à résoudre les problèmes du quotidien de la population, comme la fourniture
en électricité, en eau, les transports ou l’aménagement du territoire. Autant de dossiers
qui sont en attente depuis plusieurs mois, sinon plusieurs années.