Les catholiques suisses pour la reconnaissance des divorcés-remariés
(RV) Entretien - Ce sont les premières tendances de la consultation sur la
famille lancée auprès des catholiques suisses. 90% d'entre eux voudraient que l'Église
reconnaisse et bénisse les couples de divorcés-remariés, selon ces résultats officiels.
La consultation sur la pastorale de l'Église catholique sur le mariage, la
famille et la vie en couple, présentés mardi à Berne, par la Conférence des évêques
suisses (CES), a été initiée en vue du prochain synode consacré aux « défis pastoraux
de la famille dans le contexte de l’évangélisation », convoqué par le Pape François.
Les évêques se réjouissent de l'ouverture d'esprit à l'égard de la foi, chez
les 25 000 personnes qui ont participé à cette enquête. Ils notent pourtant que cette
ouverture ne va pas forcément de pair avec une adhésion inconditionnelle à la doctrine
de l'Église sur la famille, le mariage et la sexualité. Parmi eux Mgr Charles Morerod,
évêque de Lausanne, Genève et Fribourg (LGF) et Vice-président de la Conférence des
évêques suisses. Il est interrogé par Audrey Radondy :
« Beaucoup
de gens n’attendent plus tellement de l’Eglise qu’elle se mêle de leur vie privée
», relève Mgr Charles Morerod, évêque de Lausanne, Genève et Fribourg et Vice-président
de la Conférence des évêques suisses. « Et surtout des questions touchant à la
vie de leur couple ou leur vie sexuelle », précise-t-il. Un résultat qui ne l’étonne
pas, car il n’est pas rare d’entendre ce genre de discours lors de visites pastorales
et pas dans la bouche des plus jeunes. « Beaucoup de personnes âgées disent : "
autrefois quand j’étais jeune, on nous imposait des choses, maintenant on en a été
libérés " », ajoute Mgr Charles Morerod. Les jeunes quant à eux, sont bien peu
à s’intéresser à ce genre de questions. Et ceux qu’ils le font, ce sont plutôt ceux
qui redécouvrent la foi, plus généralement, les nouveaux convertis. Pour l’évêque
de LGF, « il faudrait situer les choses de manière plus profonde dans la vie chrétienne
».
Les prélats se rendent bien compte de l'ampleur de la tâche qui leur
revient de répondre aux attentes de fidèles en proie à une incompréhension manifeste
des positions de l'Église. Pour Mgr Charles Morerod, l’Église doit s’appuyer sur ce
qui est « le plus prometteur pour l’avenir », comme les cours de formation
chrétienne pour adulte, pour ceux « qui désirent mieux connaitre la foi ».
C’est selon lui, un des moyens qui peut leur permettre de mieux saisir le sens de
la morale.
Une éducation religieuse pour les enfants
L'un des
objectifs du prochain Synode des évêques sur la famille, à l'automne prochain, où
seront débattus les résultats de la consultation, sera donc « d’expliquer à des
gens, qui ne s’attendent pas à ce que cela puisse les concerner de manière positive,
que ce que nous proposons vaut la peine d’être vécu et est beau », explique-t-il.
Le prélat donne l’exemple d’un couple qu’il a rencontré, qui étudie la « théologie
du corps » de Jean-Paul II. Et qui lui ont dit : « dans le fond, nous qui essayons
de vivre, notre vie familiale comme l’enseigne l’Église sur tous les points, nous
ne pouvons le faire qu’avec l’aide de la prière en famille et des sacrements ».
Mgr Charles Morerod admet que l'Église n'a pas toujours de réponses satisfaisantes
à apporter aux fidèles, d'où l'utilité de la consultation et du prochain synode.
Au-delà
de ces défis, les résultats de la consultation ont mis en lumière le rôle important
joué par la foi dans le domaine de la famille et de l'éducation. Le souhait d'une
éducation religieuse pour les enfants, recueille ainsi le plus fort taux de réponses
positives du sondage, à 97%, a indiqué Arnd Bünker, directeur de l'Institut suisse
de sociologie pastorale (SPI), qui a récolté et évalué les réponses. Une autre preuve
de cette réalité, est l’adhésion toujours forte, au sacrement du baptême.
Le
mariage religieux reste également une référence pour les catholiques suisses. 80%
des sondés ont affirmé que ce sacrement était important pour eux. Pour le directeur
du SPI, ces deux constats sont pour l'Église une grande chance de transmettre son
message central.
Majorité en faveur du partenariat homosexuel
Les
résultats ont également relevé qu'environ 60 % des participants à la consultation
étaient en faveur de la reconnaissance et de la bénédiction par l‘Église des couples
homosexuels. Contrairement à la question des divorcés remariés, l'objet n'a ici pas
été marqué par un consensus mais plutôt par une polarisation. A côté d’une majorité
de personnes favorables, la part des sondés ayant adressé un refus catégorique à la
reconnaissance du partenariat homosexuel est également élevée.
Arnd Bünker
a remarqué qu'il existe également un « désaccord dramatique et connu de longue
date » entre la doctrine de l'Église et les fidèles sur les questions de contraception.
L’interdiction des méthodes artificielles de contraception est bien éloignée de la
pratique et des idées de la grande majorité des catholiques.
Prendre les
expériences de terrain en considération
Mgr Markus Büchel, évêque de Saint-Gall
et président de la CES, a martelé que la hiérarchie de l'Eglise ne pouvait plus continuer
à délivrer son message d'une façon « qui n'atteint plus l'homme ». Il a souligné
que dans la pratique, les agents pastoraux se montraient souvent « plus miséricordieux
et bienveillants » que la doctrine officielle. Et de souhaiter que le Synode des
évêques prennent ces expériences en considération, afin d'établir une base doctrinale
officielle qui réponde aux formes de pratique qui « ont fait leur preuve »
sur le terrain.
L'évêque a toutefois rappelé que l'enseignement de l'Eglise
ne devait pas se soumettre à « une opinion majoritaire à bon marché ». L'effort consiste
plutôt à renouveler cet enseignement à l'aune de valeurs et d'idéaux qui correspondent
à la vie réelle des personnes, a souligné le prélat saint-gallois. Présentant la situation
dans son diocèse, Mgr Theurillat, évêque auxiliaire de Bâle, a finalement relevé l'importante
participation des agents pastoraux au questionnaire. Il s'est dit frappé par la miséricorde
dont font preuve ces derniers face aux situations parfois douloureuses des fidèles.
(RV Avec Apic)
Photo : 97% des participants au questionnaire veulent
une éducation religieuse pour leurs enfants