L'Eglise suisse réagit à un projet contre l'immigration de masse
L’initiative de l'UDC « contre l’immigration de masse », soumise au peuple le 9 février,
voit les personnes comme une marchandise et fait comme si la Suisse était une île.
Tel est l'avis de la Commission Justice et paix, l’organe de la Conférence des évêques
suisses (CES) chargé des questions de l’éthique sociale. Dans un communiqué du 27
janvier, elle rejette un texte qui « va à l’encontre des valeurs chrétiennes ».
«
Du point de vue chrétien, les préoccupations et objectifs de l’initiative traduisent
une vision de l’homme discriminatoire et discutable », écrit la Commission épiscopale
dans son communiqué. Selon elle, l’initiative (tout comme de nombreux contre-arguments)
envisagent l’homme uniquement du point de vue de son utilité économique pour la Suisse
et le réduit à l’état de marchandise. « Elle admet que des travailleurs étrangers
ne possèdent presque plus de droits et ouvre ainsi la porte aux abus. Elle déshumanise
également les hommes et les femmes quand elle utilise l’image des 'masses' qui menacent
un monde préservé : la Suisse », poursuit le texte. « Une telle pensée et argumentation
est contraire à l’idée chrétienne fondamentale selon laquelle l’économie doit être
au service de l’homme et non l’inverse ».
Nous avons besoin de plus
d’Europe
Pour la Commission Justice et paix, l’initiative vise l’isolement
de la Suisse. « Dans l’optique de la solidarité chrétienne, le succès remporté
avec notre modèle nous oblige à nous engager au-delà des frontières nationales »,
affirme-t-elle. « En l’occurrence notre modèle se caractérise par le dispositif
de prise en compte des cantons avec leurs forces et faiblesses, la participation d’un
grand nombre d’acteurs aux consultations et la volonté d’être innovant. L’Europe fait
face à des défis de taille et a besoin de notre contribution ».
« En
cas de retour aux contingents, de refus du regroupement familial et de levée de la
séparation entre politique du travail et politique d’asile, l’aide et la protection
dépendront de la situation économique », écrit la Commission. « Or des exigences
relevant des droits de l’homme, comme l’asile ou la vie familiale, ne sont pas négociables
en fonction de la santé économique. Promouvoir la famille à l’échelle nationale et
empêcher des étrangers de vivre en famille est dégradant. Il est également cynique
de fixer des quotas pour l’admission de personnes menacées. Selon la vision chrétienne,
tout homme, mais plus encore celui qui est dans la détresse, poursuivi et en fuite,
est à l’image de Dieu ». Pour ces différentes raisons, la Commission Justice et
paix rejette l’initiative.
Photo: manifeste de l'UDC contre l'immigration
de masse