Liban : une bibliothèque incendiée par des extrémistes à Tripoli
La fameuse bibliothèque historique Saeh, fondée par le Père grec-orthodoxe Ibrahim
Surouj, a été incendiée le soir du 3 janvier par des « inconnus » à Tripoli, le fief
des extrémistes sunnites au nord du Liban. Cette bibliothèque et librairie sise à
la rue al-Rahbat, la seconde en importance de ce type au Liban, contenait quelque
80’000 livres et manuscrits, dont les deux tiers ont été détruits.
Elle a été
visée par des fondamentalistes musulmans qui accusent le Père Ibrahim Surouj d’avoir
soi-disant publié un livre « insultant pour l’islam et le prophète Mahomet ». Selon
la chaîne de télévision du Hezbollah « al Manar », Mgr Samir Mazloum, vicaire patriarcal
maronite, a vivement condamné « un tel acte barbare qui va à l’encontre de l'humanité,
du droit à la connaissance, du respect des religions et de la culture humaine ». Il
a souligné que « ceux qui ont commis un tel acte sont ceux qui refusent l’autre, qui
éprouvent de la rancune envers toute personne qui ne partage pas leurs convictions
et qui cherchent à annuler l’autre ».
Forcé de quitter la ville sous la
menace
Les extrémistes avaient déjà attaqué Bachir Hazzouri, un employé
de la bibliothèque, qui a été blessé par balles le 2 janvier dernier dans les souks
de Tripoli. Par ailleurs, selon le site d’informations libanais en langue arabe «
elNashra », le Père Ibrahim Surouj s’est vu forcé de quitter la ville de Tripoli pour
se réfugier dans un endroit plus sûr après avoir reçu une lettre de menaces lui promettant
de « faire couler son sang ».
La librairie contenait des livres rares et
anciens, et des ouvrages traitant de sujets politiques, sociaux, scientifiques, historiques,
philosophiques, médicaux, artistiques, ainsi que des livres religieux chrétiens, musulmans,
hindous, bouddhistes. Saehlib « publications orthodoxes » imprime et publie également
des livres.
Dans un communiqué publié samedi 4 janvier, rapporte le quotidien
libanais francophone l'Orient-Le Jour, l'ancien chef des services de renseignement
des Forces de sécurité intérieure (FSI), le général Achraf Rifi, a affirmé qu'une
« brochure mensongère et écrite au nom du Père Surouj circulait depuis quelques temps
sur internet ».
Un acte destiné à provoquer les dissensions interreligieuses
Selon
le général Achraf Rifi, la personne à l'origine de ce pamphlet n'est pas de nationalité
libanaise. « Le Père Surouj est un prêtre intellectuel originaire de Tripoli. Il y
a vécu toute sa vie et a entretenu de très bonnes relations avec tous ses habitants.
Le Père Surouj est connu et respecté pour ses positions appelant au dialogue, à la
coexistence et au respect des religions ». Le général Rifi accuse les incendiaires
de vouloir porter atteinte à la coexistence dans la ville de Tripoli, appelant les
autorités sécuritaires et judiciaires à arrêter les coupables sans attendre. (Apic)