(RV) Entretien - En Irak, la ville de Fallouja dans la province sunnite de
Al-Anbar est aux mains d’Al-Qaïda et plus précisément, de son antenne locale : l'Etat
islamique en Irak et au Levant (EIIL). Le gouvernement irakien a perdu le contrôle
de la ville après plusieurs jours de combats, consécutifs au démantèlement d’un camp
de protestataires à Ramadi, non loin de Fallouja. Selon un dernier bilan établi à
la mi-journée de samedi, 32 civils et 71 combattants d’Al-Qaïda ont été tués lors
des affrontements de vendredi.
Myriam Benrad, chercheuse au Ceri et
spécialiste de l’Irak, explique à Hélène Destombes pourquoi les djihadistes de l'Etat
islamique en Irak et au Levant ont pris la ville de Fallouja :
« Fallouja
est une ville emblématique, explique la chercheuse. Elle a été le bastion de
la résistance armée à l’occupation américaine pendant les dix ans de présence étrangère
en Irak. La ville a été reprise aux djihadistes en 2007. Les Américains se sont alliés
aux tribus locales à l’époque pour reprendre la ville. Il y a une accalmie au cours
des dernières années, mais la politique de Nouri Al-Maliki, le Premier ministre, qui
est une politique de marginalisation des sunnites, a peu à peu enflammé la ville qui,
depuis décembre 2012, est le théâtre de manifestations contre le gouvernement, qui
ont été progressivement gangrénées par Al-Qaïda. »
L’organisation terroriste
« a capitalisé sur le ressentiment des sunnites et plus particulièrement des habitants
de Fallouja pour recruter de nouveau dans ses rangs ». Ce « coup de force
» d’Al-Qaïda à Fallouja s’inscrit, pour Myriam Benrad, « dans une politique du
pire ». La politique gouvernementale depuis deux ans au moins, et qui exclut les
sunnites de la reconstruction de l’Irak, n’apaise en rien les esprits, que ce soit
à Fallouja, ou dans d’autres villes et provinces du pays.
Photo : un camion
calciné dans les rues de Fallouja le 4 janvier