Municipales 2014 : Les évêques français mettent en garde contre les discours populistes
(RV)- Entretien - L'Église de France prend la parole à trois mois des élections
municipales, qui auront lieu les 23 et 30 mars 2014. Dans une déclaration du Conseil
permanent de la Conférence épiscopale de France publiée le 11 décembre, les évêques
dénoncent « les discours populistes » de certains politiques, discours qui selon
eux « répandent la suspicion contre toute représentation politique ». Les évêques
encouragent « fortement toutes les personnes qui projettent en 2014 de donner quelques
années au service du bien commun ». En d’autres termes, les candidats aux prochaines
élections municipales devront être des « élus de la proximité humaine », « enracinés»
dans leur commune, « premier garant de lien social ».
Eclairage de Mgr Bernard
Podvin, porte-parole de la Conférence des évêques de France : Des propos recueillis
par Antonino Galofaro.
Avec cette déclaration, vous accordez une place
importante à ces élections ? Les élections municipales sont attendues. Elles
sont un rendez-vous très important. D’ailleurs, c’est peut-être une des rares élections
dont la participation électorale soit encore si forte. Il ne faut donc pas rater ce
rendez-vous, qui est à la fois un rendez-vous de démocratie mais aussi un rendez-vous
très important pour les croyants . Et je crois que les évêques sont dans leur rôle
quand ils jouent-là un encouragement , quand ils signifient toute l’importance qu’ils
attachent à cette vie locale. Je me permets de rappeler que les évêques font énormément
de visites pastorales. Et ils ont très souvent des contacts avec les équipes municipales.
Ils sont donc très au fait de la situation qui se déroule aujourd’hui dans les villages
et dans les villes.
Concrètement, qu'attendez-vous d’un élu ? Le nouvel élu, évidemment, ne pourra pas tout faire. Ça serait illusoire
de tout attendre d’un maire et on a d’ailleurs parfois tort de tout attendre du maire
d’une commune. Mais en même temps, il est l’homme ou la femme de la communion. Il
doit aussi être animé par des valeurs profondes . Nous avons des valeurs à défendre
envers les plus petits mais aussi envers la famille, envers la manière de vivre, envers
l’accueil du handicapé, envers des choix financiers aussi , aujourd’hui, dans la commune
et qui sont de plus en plus délicats parce qu’étant donné la crise budgétaire, étant
donné le besoin de vivre beaucoup de choses à l’échelle intercommunale, il faut que
l’élu soit intègre. Il faut que l’élu soit quelqu’un qui soit animé par un service
des autres. Mais il faut encourager ceux qui demain, seront les candidats parce que
nous constatons aussi une grande désaffection. Il y a aussi tous ceux qui, parce que
cette charge est très complexe, envisagent de ne plus se représenter. Et donc, il
y a aussi une fonction que l’Église doit avoir de redonner une noblesse à la politique.
S’il
y a un appel, c’est peut-être aussi car il y a une inquiétude, vous parlez d’une tendance
à l’individualisme, à la perte du sens du Bien commun. C’est une inquiétude réelle
que vous observez ? Oui, absolument, l’inquiétude est réelle. Elle est explicable
parce qu’il y a la crise, le risque du repli sur soi. Il y a aussi des peurs, des
peurs qui peuvent être plus ou moins fondées. Il y a quand même une peur de l’avenir,
une peur de l’autre dans sa différence. Il faut donc à la fois comprendre ces peurs,
essayer de les accompagner et tout faire pour que l’ensemble de nos concitoyens n’aillent
pas dans l’individualisme, dans le repli, dans le rejet mais vivent vraiment le projet
municipal comme une occasion très grande de créer quelque chose de meilleur.
Vous
tirez la sonnette d’alarme contre la montée du populisme. Cette année, les discours
populistes sont une crainte réelle ? Oui, il faut être très franc. D’ailleurs,
ici, "populisme" est une expression que les évêques usent pour recouvrir toute une
série de populisme, il y a plusieurs facettes au populisme. Le populisme peut contenir
énormément de fausses réponses, des réponses qui font des impasses à toutes les peurs
dont je viens de parler. Il faut prendre le temps d’être avec les gens pour comprendre
vraiment la réalité de leurs souffrances, de leurs angoisses. Et les populismes qui
sont de multiples formes, il faut vraiment dire à quel point ce sont des impasses.
Et c’est là qu’il faut que se rassemblent tous les hommes de bonne volonté, tous ceux
qui cherchent les intérêts vraiment commun de la cité. Et donc, cette déclaration
était vraiment nécessaire et elle est rédigée en amont de la campagne pour qu’il n’y
ait pas de récupération, que la parole de l’Église soit bien libre.
Photo:
une conférence du candidat Front national à la mairie de Lyon, le 13 novembre.