(RV) Témoignage - En Centrafrique, le calme est toujours précaire, même après
le début du désarmement des milices par l’armée française. Le sentiment de peur est
toujours très présent parmi la population. Face à cette situation, les habitants s’enferment
chez eux ou se réfugient dans les églises.
Dans la paroisse Saint-Jean de Galabadja,
à Bangui, 12 000 personnes cohabitent dans un camp de fortune, entassées en plein
air ou dans les quatre petites salles gérées par la paroisse.
Interrogé par
Jean-Baptiste Cocagne, écoutez le témoignage de François Légué, secrétaire de la
commission pastorale de la santé à la Conférence épiscopale centrafricaine. Il
coordonne les formations sanitaires privées catholiques dans le pays :
12
000 personnes sont réfugiées dans votre paroisse. Quels sont les risques qui existent
à l'heure actuelle ? Toutes les salles sont bondées et dans la cour, les gens
vivent en plein air et les conditions sanitaires sont assez difficiles dans la mesure
où l’on n'a pas prévu d’accueil pour ce genre de situations. Du coup, cela pose un
problème de santé publique. Il y a beaucoup d’enfants qui dorment à même le sol avec
leurs mamans. Et il y a des personnes très âgées, donc des personnes vulnérables.
On craint que si la situation continue, il y a un risque d’épidémie, que les enfants
aient la diarrhée. Pour le paludisme, nous sommes en zone endémique et les enfants
qui sont exposés pendant quelques jours commencent à manifester les symptômes du paludisme.
Est-ce qu’il y a des réfugiés qui continuent à arriver ? Oui, les
gens ont tellement peur que même si la situation tend à devenir calme, les gens ont
peur du fait que tout peut basculer parce que le calme est précaire. Il y a des gens
qui quittent le camp le matin, qui rentrent chez eux et le soir, ils reviennent, ce
qui fait que le centre est très bondé. Même au niveau du site, les gens ont peur parce
qu’ils craignent que des bandits de grand chemin puissent venir les agresser la nuit.
Ce matin, on a essayé d’échanger avec eux. Ils sont inquiets parce qu’il y a des rumeurs
qui circulent comme quoi des gens projettent d’attaquer le site. On a essayé de prendre
contact avec les troupes françaises, nous attendons leur réaction. De temps en temps
seulement, il y a un hélicoptère qui survole le site. Il y a des jeunes scouts qui
assurent la sécurité du camp pour qu’il y ait un peu d’ordre. Pour la distribution
également, il y a une stratégie qui est mise en place, répartissant les gens en quartier
pour qu’ils se retrouvent ensemble afin qu’il y ait moins de difficultés pour les
atteindre. Pour les gens dans le camp, a situation est difficile dans la mesure où
ils ne sont pas chez eux, mais on arrive quand même à les contenir.
Est-ce
que vous avez un message à faire passer aujourd’hui ? Nous avons peur. Nous
souhaitons que les choses puissent aller de l’avant, surtout qu’il y ait une réconciliation
entre nous, c’est-à-dire entre les deux communautés parce que ça bascule un peu vers
un conflit intercommunautaire. Il y a déjà les hauts responsables des Églises et des
mosquées qui se rencontrent régulièrement , qui sensibilisent. C’est un travail de
proximité qui se fait maintenant : il y a des petits groupes de gens qui se rencontrent
pour essayer de faire en sorte que le calme et la cohésion puissent revenir entre
les deux communautés.