2013-10-11 07:41:06

Mgr Santier : « les femmes nous donnent un message essentiel »


« Dieu confie l’humanité à la femme » : c’est l’une des phrases-clé de la lettre apostolique de Jean-Paul II « Mulieris Dignitatem ». Une lettre sur la dignité et la vocation des femmes, dans l’Eglise et dans la société, parue il y a 25 ans, le premier document du magistère pontifical entièrement consacré à la question féminine. Et c’est le fil conducteur d’un Séminaire organisé ces jours-ci par le Conseil pontifical pour les laïcs à Rome.

La réflexion porte sur l’évolution historique de l’image féminine ainsi que sur les différentes facettes de la crise culturelle actuelle. L’objectif est de faire toute la lumière sur le rôle unique que les femmes, avec leur identité maternelle, sont appelées à jouer, alors que des défis de plus en plus nombreux surgissent et exigent une réponse de la part des chrétiens.

Sur notre antenne, la responsable de la Section Femmes du Conseil pour les laïcs, a salué la présence croissante des femmes dans tous les secteurs de la société, mais elle regrette qu’elles soient souvent obligées de renoncer à leur identité spécifique pour s’adapter à un milieu compétitif. Selon Ana Cristina Villa Betancourt, beaucoup reste encore à faire pour mettre en pratique les idées contenues dans le texte de Jean-Paul II. Ainsi les femmes sont peu représentées dans les prises de décision et le dialogue hommes-femmes est souvent insuffisant dans l’Eglise.

Le pape François a lui-même encouragé la poursuite du débat. Il recevra samedi les participants à ce séminaire, experts et représentants d’associations et mouvements d’Eglise venus de 25 pays. Il avait également insisté pour que la communauté Sant’Egidio aborde le thème des violences faites aux femmes lors de sa rencontre internationale pour la paix qui s’est déroulée la semaine dernière à Rome.

Mgr Michel Santier, évêque de Créteil, en banlieue parisienne, est intervenu lors d’une table ronde pour apporter la voix de l’Église. Les femmes, souligne-t-il « obligent à regarder les valeurs essentiels de la société ». « L’Église risque de passer à côté de cet apport ». Des propos recueillis par Xavier Sartre. RealAudioMP3



Lisez le texte intégral :

« En même temps que les femmes sont dans une situation difficile, on les voit partout se lever dans le monde et oser prendre la parole et oser défendre leurs droits et surtout le droit de leurs enfants et de leurs familles. Et ça prend plusieurs formes comme les femmes de la place de Mai en Argentine. Je vois bien que dans les quartiers où je fais les visites pastorales, existent des associations de femmes de tous pays, de femmes de toutes cultures, qui se rassemblent pour que les relations dans les quartiers soient plus fraternelles et que les femmes puissent s’exprimer, participer à la vie sociale et non pas rester chez elles. Et autour de ces associations sont proposés pour les femmes l’apprentissage de la langue, l’apprentissage de la culture. Elles vont à des spectacles à Paris. On voit bien qu’il y a une volonté que les femmes, même si elles sont encore l’objet de cette domination, de s’organiser, de se rencontrer pour oser prendre la parole et dire qu’elles sont porteuses aussi de l’avenir de l’humanité parce que les femmes, devant les hommes qui sont très engagés dans la production, obligent à regarder les valeurs essentielles de la société qui ne sont pas uniquement des valeurs marchandes mais des valeurs telle que la gratuité, le respect, la dignité, l’amour pour leurs enfants. Elles nous donnent un message essentiel et le pape François a dit lui-même que dans l’Église nous devons vivre un changement, une conversion. Il a invité à ce que les femmes participent davantage au discernement dans la vie pastorale, à la conduite de la vie pastorale. Et donc, le Pape nous dit que nous nous privons dans l’Église de cette richesse, de ce charisme des femmes pour annoncer l’Évangile aujourd’hui et que nous avons aussi à nous interroger. »

Quelles réponses peut apporter justement la religion catholique à ces violences ? Quel message peut-elle faire passer pour que les choses évoluent, que ce soit dans le contexte de nos sociétés occidentales ou bien dans des zones de guerre ?

« Dans l’histoire, la femme a souvent été la première victime. C’est elle qui a reçu tous les coups et justement parce qu’elle est celle qui donne la vie et qui donne la vie aux êtres les plus fragiles. Et quand une société ne respecte pas la dignité de la femme, elle se déshumanise. Elle prend un chemin qui ne va pas dans le sens du bien de l’humanité. Et avec les différentes religions sur ce terrain, nous pouvons travailler ensemble. »

Vous pensez que l’Église de ce point de vue-là est prête à faire le pas que le Pape l’a engagé à faire justement vis-à-vis des femmes alors que l’Église est la cible de critiques assez fortes depuis très longtemps sur la place qu’elle donne aux femmes ?

« C’est l’Évangile qui le demande, c’est pas seulement le pape François. Il relaie l’Évangile. Il suffit de regarder l’attitude du Christ dans l’Évangile vis-à-vis des femmes. Et moi qui aies vécu en communauté et avec des femmes, je m’aperçois bien que notre Église risque de passer à côté de cet apport. Surtout que lorsque je fais les visites pastorales, partout où il y a des personnes en fragilité, en difficulté, on trouve des femmes et des religieuses. On trouve des femmes pour aller visiter les malades, pour aller visiter les prisonniers, pour l’alphabétisation , pour l’aide aux devoirs, pour la visite aux personnes âgées. Elles manifestent souvent ce que le Pape dit, ce qui est au cœur du message : l’amour miséricordieux de Dieu. Et elles n’ont pas attendu l’appel du Pape pour le vivre. Donc il suffit que nous ouvrions les yeux pour que nous puissions mettre ça en valeur. Les congrégations religieuses vivent ça dans leur charisme depuis des siècles. Donc heureusement qu’en France, beaucoup de femmes participent à la vie de l’Église parce qu’autrement on serait encore dans une situation difficile et ce n’est pas parce que des femmes accèdent à des responsabilités que ça serait un empêchement pour l’éclosion des vocations. Au contraire, je pense que ce qui va être porteur, c’est de donner un visage de l’Église où les vocations sont complémentaires et se soutiennent les unes les autres. Et elles ne seront pas là simplement parce qu’il y a eu une intention particulière aux femmes. Elles font partie de la vie de l’Église habituellement. Ce qui serait souhaitable c’est que leur charisme soit mis au service de la construction du corps du Christ qu’est l’Église. »








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