2013-09-24 12:39:15

François Hollande et son Comité d’éthique sans religieux


Les grands débats de société qui s’annoncent en France dans les prochains mois sur la PMA (procréation médicalement assistée) ou la fin de vie, se feront au sein du Comité consultatif national d’éthique sans l’avis de religieux. Pour la première fois depuis sa création en 1983, les principales familles philosophiques et spirituelles présentes en son sein ne seront plus représentées par des ministres du culte.

Parmi la vingtaine de noms publiés le 22 septembre au Journal Officiel, le président de la République, François Hollande, a en effet choisi de nommer une historienne spécialiste de la réforme protestante Marianne Carbonnier-Burkard, en remplacement du pasteur Louis Schweitzer, dont le mandat de quatre ans arrivait à échéance et Lionel Naccache, neurologue, au poste du rabbin Michael Azoulay. Avec le départ du pasteur et du rabbin, les principales religions ne sont donc désormais représentées que par des laïcs.

Aucun religieux au sein du CCNE

Selon le quotidien Le Monde, qui est le premier à avoir révélé cette nouvelle composition, l’Elysée souhaite « revenir aux principes de création du conseil de 1983 et faire appel à des laïcs pour représenter les courants religieux ». Mais pour Xavier Lacroix, professeur de théologie morale et doyen de la faculté de théologie de Lyon, c’est un faux problème. « On peut appartenir à une religion sans être prêtre, pasteur ou imam. Je suis catholique, je suis laïc, avant moi il y avait trois religieux mais le premier représentant catholique était un laïc. Ce n’est donc pas nouveau. »

Outre cet aspect, les nouvelles nominations suscitent bien des commentaires en France. Certains critiquent ouvertement le choix de personnalités trop marquées politiquement, en l’occurrence à gauche. Le cas de Jean-Pierre Mignard, avocat et ami du chef de l’Etat, provoque quelques remous. D’aucun voit dans le choix de personnes dites progressistes une volonté du gouvernement et de la présidence une volonté de mettre de son côté le Comité avant la discussion de sujets très sensibles comme la PMA, d’autant que cette institution peu utilisée par Nicolas Sarkozy entre 2007 et 2012, est davantage sollicitée par François Hollande.

Là encore, Xavier Lacroix nuance : « On verra s’il y a un changement de couleurs. Jusqu’à maintenant les compromis étaient assez honorables. Chacun parle en son nom propre, au nom d’arguments de raison. On avance assez peu d’arguments politiques. Mais c’est vrai qu’il y a une certaine couleur politique. » Selon le théologien catholique, il faudra donc attendre de voir les avis qui seront rendus dans les prochains mois pour évaluer l’impact de ces nominations.

L'Elysée n'a pas consulté les instances religieuses

Le pasteur Louis, professeur d’éthique et de spiritualité à la Faculté théologique évangélique de Vaux-sur-Seine et dont le mandat n’a pas été renouvelé, le vrai problème est ailleurs. « La vraie question est de savoir si les représentants des grandes familles religieuses doivent être nommés par les instances religieuses concernées ou bien, si, comme le souhaite le gouvernement, doivent-ils l’être directement par le président de la République ou le gouvernement sans demander aux instances religieuses leur avis ».

La manière dont a procédé l’Elysée dans ce dossier va donc à l’encontre d’un usage qui voulait que « le président nomme ces personnes en demandant aux instances religieuses de suggérer des noms » explique Louis Schweitzer. Fait aggravant selon lui : « se passant de ces intermédiaires, on va nommer des gens forcément « proches » du pouvoir politique. Donc on met sur la touche le catholicisme, le protestantisme, le judaïsme et l’islam pour des questions de société et d’éthique pour lesquelles les religions ont leur mot à dire ».

La perspective prochaine de grands débats sur la PMA ou la procréation pour autrui a certainement incité le gouvernement à la prudence en se passant de cet avis des instances protestante et juive. L’opposition qu’il a rencontré pendant la discussion du projet de mariage pour tous de la part d’une partie de la population et des religions, et l’avis très mesuré du CCNE concernant la fin de vie, ont sans aucun doute échaudé un pouvoir qui entend entre autre s’appuyer sur les conclusions du CCNE pour faire passer ses projets controversés.

Retour sur ce dossier avec Xavier Sartre RealAudioMP3








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