Certains analystes le qualifient de sommet de la dernière chance. Une nouvelle Conférence
internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) s’est ouverte aujourd’hui à Kampala,
la capitale de l’Ouganda. L’organisation qui regroupe onze pays, assure la médiation
entre Kinshasa et la rébellion congolaise du Mouvement du 23 mars (M23) qui s’affrontent
dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) depuis plus d’un an.
Pour
Thierry Vircoulon, directeur pour l’Afrique centrale de l’International Crisis Group,
trois scénarios sont possibles : « Soit les Nations unies ou les Ougandais trouvent
une nouvelle formule pour relancer les pourparlers entre le M23 et Kinshasa ; soit
il y a un échec et on va vers la reprise des combats avec un risque d’escalade, notamment
du fait du Rwanda ; soit il peut y avoir la résurrection d’une idée qui avait été
évoquée lors de la précédente réunion de la CIRGL, qui aurait été de faire une sorte
de zone tampon avec un rôle d’interposition donné à la Monusco. Le problème évidemment
c’est que ça serait une déviance par rapport à la résolution 2098, mais c’est toujours
possible ».
Adoptée fin mars, la résolution de l’ONU autorise la Mission de
l’ONU pour la stabilisation de la République démocratique du Congo « à mener des opérations
offensives contre les groupes qui entretiennent la violence en RDC ». La Mission a
évoqué mercredi la possibilité de nouvelles actions contre le M23, alors qu’il y a
une pose dans les combats entre l’armée congolaise et les rebelles.
"Tout
le monde veut un délai fixe"
« En tout cas, je crois que s’il y a une reprise
des pourparlers il y a aura une deadline, parce que ces pourparlers ont commencés
en décembre de l’année dernière et n’ont pas donné grand-chose, voir n’ont rien donné.
Et par conséquent tout le monde veut que maintenant il y ait un délai fixe. Malheureusement
c’est une idée qui avait été aussi agitée lors de la précédente CIRGL en juillet à
Nairobi et qui n’avait pas été adoptée mais je crois que cette fois-ci, elle le sera
», précise Thierry Vircoulon
En marge du sommet ont eu lieu ce jeudi une
série d’entretiens bilatéaux. Ainsi, les présidents de la RDC et du Rwanda se seraient
rencontrés, mais impossible de savoir si cette discussion s’est faite en face-à-face
ou en présence d’un médiateur. Un entretient qui intervient une semaine après de
nouvelles déclarations de l’ONU. Les Nations unies avaient à nouveau accusé le Rwanda
d’ingérence dans le conflit. Ils avaient déclaré avoir « des informations crédibles
et cohérentes » sur un soutien de l’armée rwandaise aux rebelles du M23.
Selon
Michel Luntumbue, chercheur au Groupe de recherche et d’information sur la paix et
la sécurité, dans le secteur « Conflit, sécurité et gouvernance en Afrique », le Rwanda
veut garder le contrôle de la région du Nord-Kivu pour deux raisons : « initialement
c’était pour des raisons sécuritaires, pour contrer la présence de l’opposition armée
des Hutus installée dans l’est du Congo. Le Rwanda craignait qu’ils s’organisent à
partir de la RDC, pour reconquérir le pouvoir au Rwanda. L’autre volet c’est l’exploitation
des ressources naturelles ».
Des Ressources naturelles que Kigali compte bien
garder. En 2011, selon la banque centrale rwandaise, l’exportation minière a rapporté
environ 50 millions d’euros à l’Etat, devenant ainsi la première source de rentrée
de devises, dépassant pour la première fois, l’exportation du thé, qui a toujours
été le premier secteur d’exportation.
C’est la septième fois depuis juillet
2012 que les chefs d’Etat de la CIRGL se réunissent pour tenter de trouver une solution
à cette crise, sans succès notable jusqu’ici. De son côté, le M23 a ces derniers jours
appelé à la reprise des négociations.
Thierry Vircoulon, directeur pour
l’Afrique centrale de l’International Crisis Group, interrogé par Audrey Radondy
(avec
agences)
(Photo : des soldats de l'armée congolaise près de Kibati, une
ville à l'est de la République démocratique du Congo, occupée pendant près d'un an
par les rebelles du M23)