2013-06-04 16:35:26

Investissements étrangers en Birmanie, un pari risqué ?


La concurrence est rude entre la Chine et les Etats-Unis pour conquérir ce marché, en pleine expansion depuis l’ouverture économique consécutive à l’autodissolution de la junte en 2011. La firme américaine Coca-Cola a ainsi inauguré ce mardi une première usine dans le pays, après soixante ans d’absence. Un forum asiatique est également en préparation ; il devra réunir plus de 900 délégués du 5 au 7 juin prochains.

Une loi sur les investissements et la levée des sanctions internationales ont permis cette arrivée de capitaux étrangers sur le territoire birman. Il possède beaucoup d’atouts pour attirer les investisseurs : un marché important de 55 millions d’habitants, des matières premières : pétrole, gaz, minéraux, de bas coûts du travail dans un des plus pauvres pays d’Asie. Il profite également de la bonne santé économique de la sous-région, qui connait les taux de croissance les plus rapides du monde.

De nouveaux partenaires

La Chine, bien que premier partenaire commercial de la Birmanie, a connu ces deux dernières années une chute spectaculaire de ses investissements dans le pays. Le voisin inquiète les Birmans par sa puissance, tant économique que militaire, et l’exploitation des ressources naturelles mise en place par les Chinois ces dernières décennies a créé peu de bénéfices pour les habitants. La Chine était le seul partenaire de la Birmanie pendant la dictature militaire. Avec la récente ouverture politique, les locaux n’hésitent plus à se faire entendre et à manifester contre les projets d’extraction chinois, d’autant plus que les concurrents se présentent.

En plus des deux géants, les pays émergents cherchent également à profiter de ce nouveau marché. Ainsi, des compagnies sud-africaines, indiennes et qataries sont en compétition pour obtenir une licence téléphonique en Birmanie. La diffusion des téléphones portables est quasi nulle dans le pays, rappelle le Wall Street Journal. La participation record au forum asiatique est un signe de cet engouement. Les risques de déception sont toutefois forts dans ce pays très archaïque: le cadre légal est inexistant, le système judiciaire corrompu, le système bancaire embryonnaire et les infrastructures en ruines.

Instabilité chronique

Le risque principal pour les investisseurs vient probablement du manque de stabilité sociale : les violences entre bouddhistes et musulmans de 2012 ont fait environ deux cent morts et contraint à l’exil quelques 140 000 personnes. Plus de deux mille réfugiés musulmans Rohingya sont bloqués dans des centres en Thaïlande puisqu’aucun pays tiers n’est prêt à les accueillir. Cette minorité est même reconnue par l’ONU comme l’une des plus persécutées au monde.

Bien que le président Thein Stein ait formé un gouvernement quasi-civil, l’influence de l’armée reste colossale dans cette ancienne dictature militaire. Ainsi, il arrive que des soldats lancent des assauts contre les rébellions des minorités ethniques alors même que le président organise des pourparlers en vue de la paix. L’annonce ce mardi du cessez-le-feu avec la dernière rébellion active, celle de la minorité Kachin, est donc à surveiller.

Ces violences très fortes entre bouddhistes et musulmans pourraient dégrader les relations du pays avec les Etats musulmans voisins comme le Bangladesh, alors même que la stabilité politique n’est pas assurée. Selon l’ONG « Freedom House » l'accueil le 20 mai du président Thein Stein à la maison blanche par Barack Obama était prématuré : les réformes vont dans le bon sens mais « nous sommes encore loin d’un processus durable de transition démocratique », prévient l’organisation. (J.Degosse)







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