Des conditions de travail non remises en cause au Bangladesh
Les grues sont entrées en action lundi pour déblayer les gravats d'un immeuble effondré
près de Dacca mercredi, après la mort du dernier survivant de la catastrophe dans
laquelle ont péri plus de 380 ouvriers du textile travaillant pour des firmes étrangères.
Un incendie a éclaté dans les décombres de l'immeuble écroulé, alors que les pompiers
tentaient de sauver une des dernières survivantes de la catastrophe.
Le propriétaire
de l’immeuble de huit étages qui s’est effondré à Dacca a été arrêté dimanche. La
police est toujours à la recherche du copropriétaire, un ressortissant espagnol.
Le
pape François a fait part samedi de ses pensées pour les victimes via le réseau
social Twitter. Il s’est joint à eux par la prière. Il a demandé à Dieu d’accorder
réconfort et forces à leur famille.
Le même jour, les entrepreneurs du secteur
du textile ont décrété la journée de samedi fériée et les syndicats ont lancé un appel
à la grève pour dimanche afin d'exiger de meilleures conditions de travail. La plupart
des 4500 usines du textile du pays étaient déjà à l'arrêt.
C’est l’une des
conséquence de manifestations, vendredi : des centaines de milliers de personnes sont
descendues dans les rues de la capitale. Les manifestants s’en sont pris à des usines,
la police a répondu par des tirs de balles en caoutchouc et de gaz lacrymogènes. Ce
que ces ouvriers exigeaient : l’arrestation et l’exécution des propriétaires des ateliers
et du bâtiment qui s’est effondré.
Mais pas, ou peu, de références à leurs
conditions de travail, souvent très précaire. Et c’est bien là tout le problème selon
Jérémie Codron, politologue spécialiste du Bangladesh au Centre d’étude et de recherche
internationale, à Sciences Po Paris. Il est interrogé par Antonino Galofaro :
« Ces explosions
de colère ne s’attaquent pas vraiment au problème structurel, explique le chercheur.
Au bout de quelques jours, le problème est oublié et le gouvernement ne fait rien
pour mettre la pression sur les propriétaires d’usine. » Les partis sont en fait aux
mains des grands industriels du secteur textile, analyse Jérémie Codron. Rien n’est
fait par exemple pour que des syndicats puissent émerger et puissent jouer le rôle
de contre-pouvoir, conclut le politologue.
Deux suspects arrêtés
Les
manifestants ont été en partie entendus. La police a annoncé samedi l’arrestation
de deux propriétaires d’ateliers de confection installés dans le bâtiment de huit
étages. « Nous avons arrêté après minuit Bazlus Samad, le président des ateliers New
Wave Buttons et New Wave Style, et Mahmudur Rahaman Tapash, directeur général de l'un
de ces ateliers », a déclaré à l'AFP le chef adjoint de la police de Dacca Shyaml
Mukherjee.
La police a ouvert contre ces deux personnes une procédure pour
« homicides dus à la négligence », a-t-il dit, après que le Premier ministre a indiqué
que les salariés avaient été forcés à retourner au travail, malgré les fissures apparues
la veille dans l'immeuble. Mais la police était toujours à la recherche du propriétaire
de l'immeuble.
Deuxième catastrophe en six mois
L'Organisation
internationale du travail a lancé vendredi un appel aux autorités du Bangladesh et
aux partenaires sociaux de ce pays pour qu'ils aident à créer des « lieux de travail
sûrs ». La catastrophe, le pire accident dans l'histoire industrielle du pays, n’est
en effet pas la première : en novembre 2012, un incendie dans une usine textile fournissant
notamment l'américain Walmart avait fait 111 morts à la périphérie de Dacca.
Les
conditions été pratiquement les mêmes que celles autour de la catastrophe en cette
fin d’avril : selon des ouvriers, les responsables avaient demandé aux travailleurs
de rester à leur poste en affirmant qu’il n’agissait que d’un exercice d’alerte incendie.
Avec
AFP
(Photo : un survivant de l'effondrement de l'immeuble, dimanche 28 avril)