Le Pape François : " N'ayons pas peur des surprises de Dieu !"
C'est toujours une cérémonie très émouvante, portée par des symboles forts. Ainsi
ce moment où le Pape François a parcouru la nef de la Basilique Saint Pierre dans
la procession qui ouvrait cet office de la Vigile de Pâques. Une procession dans la
pénombre à la seule lueur du cierge pascal allumé. Et ensuite, ce chant de l'Exsultet
pour débuter la liturgie, signe que la lumière de Dieu a vaincu les ténèbres du monde.
Et la Basilique était ensuite progressivement éclairée. Auparavant, dans l'atrium,
le Pape avait allumé un brasero pour la bénédiction du feu et devait alors préparer
le cierge pascal, lui imprimant l'alpha et l'omega.
Quelque 4 000 personnes
assistaient à cette célébration eucharistique qui marquait le terme du Triduum pascal
et de toute l'année liturgique. Selon le mot de saint Augustin, il s'agit de la «
Mère de toutes les liturgies », le cœur et le sommet de l’année liturgique. Le feu
et la lumière évoquent le passage à une vie nouvelle. Au moment du chant du "Resurrexit"
les cloches de la Basilique Saint Pierre ont retenti à toute volée pendant de longues
minutes pour célébré le Christ Ressuscité. Entre les différentes lectures, et l'Evangile
chanté en latin, les grandes orgues et des trompettes accompagnaient des alleluia.
Le
Pape a ensuite livré son homélie, centrée sur l'Evangile de cette nuit qui nous raconte
la venue des femmes au tombeau. Le Pape François, d'une voix douce et sûre, a encouragé
"à ne pas se fermer à la nouveauté que Dieu veut porter dans notre vie".
Au
cours de la cérémonie, le Pape a baptisé quatre catéchumènes: un albanais Kleant Ismaili,
30 ans, un italien Maurizio Stefano Pilati, 22 ans, un russe Eugeni Francesco Strokov,
30 ans, et un américain d'origine vietnamienne Anthony Dinh Tran, 17 ans. Le Pape
devant les fonds baptismaux leur a demandè à chacun leur nom et a versé de l'eau sur
le tête. Les quatre nouveaux baptisés, accompagnés de leurs parrains et marraines
ont allumé chacun leur cierge au cierge pascal. Ils ont ensuite été confirmés. Et
s'en suivait alors le rite eucharistique.
Texte intégral de l'homélie de
la Vigile de Pâques
Chers frères et sœurs, Dans l’évangile de cette
nuit lumineuse de la Vigile pascale, nous rencontrons en premier les femmes qui se
rendent au tombeau de Jésus avec les aromates pour oindre son corps (cf. Lc 24,1-3).
Elles viennent pour accomplir un geste de compassion, d’affection, d’amour, un geste
traditionnel envers une personne chère défunte, comme nous le faisons nous aussi.
Elles avaient suivi Jésus, l’avaient écouté, s’étaient senties comprises dans leur
dignité et l’avaient accompagné jusqu’à la fin, sur le Calvaire, et au moment de la
déposition de la croix. Nous pouvons imaginer leurs sentiments tandis qu’elles vont
au tombeau : une certaine tristesse, le chagrin parce que Jésus les avait quittées,
il était mort, son histoire était terminée. Maintenant on revenait à la vie d’avant.
Cependant dans les femmes persistait l’amour, et c’est l’amour envers Jésus qui les
avait poussées à se rendre au tombeau.
Mais à ce point il se passe quelque
chose de totalement inattendu, de nouveau, qui bouleverse leur cœur et leurs programmes
et bouleversera leur vie : elles voient la pierre enlevée du tombeau, elles s’approchent,
et ne trouvent pas le corps du Seigneur. C’est un fait qui les laisse hésitantes,
perplexes, pleines de questions : « Que s’est-il passé ? », « Quel sens tout cela
a-t-il ? » (cf. Lc 24,4). Cela ne nous arrive-t-il pas peut-être aussi à nous quand
quelque chose de vraiment nouveau arrive dans la succession quotidienne des faits
? Nous nous arrêtons, nous ne comprenons pas, nous ne savons pas comment l’affronter.
La nouveauté souvent nous fait peur, aussi la nouveauté que Dieu nous apporte, la
nouveauté que Dieu nous demande. Nous sommes comme les Apôtres de l’Évangile : nous
préférons souvent garder nos sécurités, nous arrêter sur une tombe, à la pensée pour
un défunt, qui à la fin vit seulement dans le souvenir de l’histoire comme les grand
personnages du passé. Nous avons peur des surprises de Dieu ; nous avons peur des
surprises de Dieu ! Il nous surprend toujours !
Frères et sœurs, ne nous fermons
pas à la nouveauté que Dieu veut porter dans notre vie ! Ne sommes-nous pas souvent
fatigués, déçus, tristes, ne sentons-nous pas le poids de nos péchés, ne pensons-nous
pas que nous n’y arriverons pas ? Ne nous fermons pas sur nous-mêmes, ne perdons pas
confiance, ne nous résignons jamais : il n’y a pas de situations que Dieu ne puisse
changer, il n’y a aucun péché qu’il ne puisse pardonner si nous nous ouvrons à Lui.
Mais revenons à l’Évangile, aux femmes et faisons un pas en avant. Elles trouvent
la tombe vide, le corps de Jésus n’y est pas, quelque chose de nouveau est arrivé,
mais tout cela ne dit encore rien de clair : cela suscite des interrogations, laisse
perplexes, sans offrir une réponse. Et voici deux hommes en vêtement éclatant, qui
disent : « Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ? Il n’est pas ici, il
est ressuscité » (Lc 24,5-6). Ce qui était un simple geste, un fait, accompli bien
sûr par amour – le fait de se rendre au tombeau – maintenant se transforme en évènement,
en un fait qui change vraiment la vie. Rien ne reste plus comme avant, non seulement
dans la vie de ces femmes, mais aussi dans notre vie et dans l’histoire de l’humanité.
Jésus
n’est pas mort, il est ressuscité, il est le Vivant ! Il n’est pas seulement revenu
à la vie, mais il est la vie même, parce qu’il est le Fils de Dieu, qu’il est le Vivant
(cf. Nb 14, 21-28, Dt 5,26, Jon 3,10) Jésus n’est plus dans le passé, mais il vit
dans le présent et est projeté vers l’avenir, il est l’«aujourd’hui» éternel de Dieu.
Ainsi la nouveauté de Dieu se présente aux yeux des femmes, des disciples, de nous
tous : la victoire sur le péché, sur le mal, sur la mort, sur tout ce qui opprime
la vie et lui donne un visage moins humain. Et c’est un message adressé à moi, à toi,
chère sœur et cher frère. Combien de fois avons-nous besoin que l’Amour nous dise
: pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ? Les problèmes, les préoccupations
de tous les jours tendent à nous faire replier sur nous-mêmes, dans la tristesse,
dans l’amertume… et là se trouve la mort. Ne cherchons pas là Celui qui est vivant
!
Accepte alors que Jésus Ressuscité entre dans ta vie, accueille-le comme
ami, avec confiance : Lui est la vie ! Si jusqu’à présent tu as été loin de Lui, fais
un petit pas : il t’accueillera à bras ouverts. Si tu es indifférent, accepte de risquer
: tu ne seras pas déçu. S’il te semble difficile de le suivre, n’aies pas peur, fais-lui
confiance, sois sûr que Lui, il t’est proche, il est avec toi et te donnera la paix
que tu cherches et la force pour vivre comme Lui le veut. Il y a un dernier élément
simple de l’Évangile de cette lumineuse Vigile pascale que je voudrais souligner.
Les femmes rencontrent la nouveauté de Dieu : Jésus est ressuscité, il est le Vivant
!
Mais devant le tombeau vide et les deux hommes en vêtement éclatant, leur
première réaction est une réaction de crainte : « elles baissaient le visage vers
le sol » - note saint Luc -, elles n’avaient pas non plus le courage de regarder.
Mais quand elles entendent l’annonce de la Résurrection, elles l’accueillent avec
foi. Et les deux hommes en vêtement éclatant introduisent un verbe fondamental : «
Rappelez-vous ce qu’il vous a dit quand il était encore en Galilée… Et elles se rappelèrent
ses paroles » (Lc 24,6.8). C’est l’invitation à faire mémoire de la rencontre avec
Jésus, de ses paroles, de ses gestes, de sa vie ; et c’est vraiment le fait de se
souvenir avec amour de l’expérience avec le Maître qui conduit les femmes à dépasser
toute peur et à porter l’annonce de la Résurrection aux Apôtres et à tous les autres
(cf. Lc 24,9). Faire mémoire de ce que Dieu a fait et fait pour moi, pour nous, faire
mémoire du chemin parcouru ; et cela ouvre le cœur à l’espérance pour l’avenir. Apprenons
à faire mémoire de ce que Dieu a fait dans notre vie. En cette Nuit de lumière,
invoquant l’intercession de la Vierge Marie, qui gardait chaque évènement dans son
cœur (cf. Lc 2, 19.51), demandons que le Seigneur nous rende participants de sa Résurrection
: qu’il nous ouvre à sa nouveauté qui transforme, aux surprises de Dieu ; qu’il fasse
de nous des hommes et des femmes capables de faire mémoire de ce qu’il accomplit dans
notre histoire personnelle et dans celle du monde ; qu’il nous rende capables de le
sentir comme le Vivant, vivant et agissant au milieu de nous ; qu’il nous enseigne
chaque jour à ne pas chercher parmi les morts Celui qui est vivant. Amen.