Liturgie de la Passion : le pape encouragé à abattre les détritus du passé, obstacles
à l'évangélisation
A 17 heures, le pape François a commencé à présider la célébration de la Passion du
Seigneur dans la basilique Saint-Pierre. Dans la basilique, aucune fleur, aucun cierge,
un autel dénudé, sans aucun apparat pour cette liturgie de la Parole, ce temps d’adoration
de la Croix et de la communion.
Au début de la célébration, François a enlevé
sa mitre et s’est allongé sur le sol de la basilique, se prosternant en silence devant
l’autel, un geste qu’avait également accompli le pape émérite Benoît XVI au début
de son pontificat.
L’homélie a été prononcée, comme c’est la tradition, par
le prédicateur de la Maison pontificale. Le père Raniero Cantalamessa a implicitement
encouragé le pape François à abattre dans l’Eglise toutes les détritus du passé qui
entravent l’évangélisation.
Le compte-rendu d’Olivier Bonnel
Au
terme d’un long exposé, après avoir cité Kafka, Hilaire de Poitiers, Bède le Vénérable
et les Ecritures Saintes, le prédicateur de la Maison pontificale a pointé du doigt
les murs qui divisent les églises chrétiennes entre elles, la bureaucratie poussée
à l’excès, le poids des controverses passées, les lois et l’apparat.
« C’est
comme avec certains vieux édifices », a-t-il dit. « Au fil des siècles, pour s’adapter
aux exigences du moment, on les remplit de cloisons, d’escaliers, de salles et de
petites salles. Un jour on s’aperçoit que tous ces aménagements ne répondent plus
aux exigences actuelles, qu’elles sont même un obstacle. Il faut alors avoir le courage
d’abattre tout cela, et de ramener l’édifice à la simplicité de ses origines. C’est
la mission que reçut un jour un homme qui priait devant le crucifix de Saint Damien
: Va, François, et répare ma maison ».
Le père Cantalamessa a noté que
parfois lorsque Jésus frappe à la porte, ce n’est pas pour entrer. Il frappe de l’intérieur
pour sortir vers la « banlieue existentielle du péché, de la souffrance, de l'injustice,
de l'ignorance et de l'indifférence religieuse, de la pensée et de toutes les formes
de misère. ».
Il faut demander à l’Esprit Saint de réveiller chez les hommes
l’attente du message
Le prédicateur a longuement insisté sur l’urgence
d’évangéliser en précisant, toutefois, que l’évangélisation chrétienne n’est « ni
conquête, ni propagande ». L’évangélisation a une origine mystique; « c’est un don
qui vient de la croix du Christ ».
Pour le père Cantalamessa, un temps
nouveau s’ouvre pour l’Eglise en ce moment ; il est plein de promesses et d’espérance
; il faut demander à l’Esprit Saint de réveiller chez les hommes l’attente du message
et chez les messagers la volonté de l’annoncer même au prix de leur vie. C’est Dieu,
a-t-il martelé, qui « nous rend capables d'être ministres d'une nouvelle alliance,
non de la lettre, mais de l'Esprit ; car la lettre tue, l'Esprit vivifie ».
Photo:
le père capucin Rainero Cantalamessa, prédicateur de la Maison pontificale
Ci-dessous,
la Prédication du Vendredi saint 2013 du père Raniero Cantalamessa en la basilique
Saint-Pierre
Justifiées gratuitement par la foi dans
le sang de Jésus-Christ
« Tous les hommes sont pécheurs, ils sont tous
privés de la gloire de Dieu, lui qui leur donne d'être des justes par sa seule grâce,
en vertu de la rédemption accomplie dans le Christ Jésus. Car Dieu a exposé le Christ
sur la croix, par l'offrande de son sang, […], pour manifester, au temps présent,
ce qu'est sa justice qui sauve. Telle est sa manière d'être juste et de rendre juste
celui qui met sa foi en Jésus. » (Rm 3, 23-26). Nous voici au sommet de l’année
de la foi et à son moment décisif. Voilà la foi qui sauve, la « foi qui triomphe du
monde » (1 Jn 5, 5)! La foi – appropriation par laquelle nous faisons nôtre le salut
accompli par le Christ, nous revêtons le manteau de sa justice. D’un côté il y a la
main tendue de Dieu qui offre sa grâce à l’homme; de l’autre la main de l’homme qui
se tend pour l’accueillir avec foi. La « nouvelle alliance éternelle » est scellée
par une poignée de main entre Dieu et l’homme. Nous avons la possibilité de prendre,
ce jour-là, la décision la plus importante de toute notre vie, celle qui ouvre grand
les portes de l’éternité : croire ! Croire que « Jésus est mort pour nos fautes et
ressuscité pour notre justification » (Rom 4, 25) ! Dans une homélie pascale du IVème
siècle, voici ce que disait l’évêque dans un langage extraordinairement moderne et
existentiel : « Pour chaque homme, le début de la vie est celui à partir duquel le
Christ s’est immolé pour lui. Mais le Christ s’est immolé pour lui au moment où il
a reconnu la grâce et où il est devenu conscient de la vie qui lui a été donnée par
cette immolation » ( Homélie pascale de l’année 387 , dans SCh 36, p. 59 s.).
Quelle
chose extraordinaire ! Ce Vendredi Saint célébré durant l’Année de la foi et en présence
du nouveau successeur de Pierre, pourrait être, si nous le voulons, le début d’une
nouvelle existence. L’évêque Hilaire de Poitiers, converti au christianisme à l’âge
adulte, en repensant à sa vie passée disait: « Avant de te connaître, je n’existais
pas ». La seule chose qu’on nous demande c’est de ne pas nous cacher comme Adam
après la faute, de reconnaître que nous avons besoin d’être justifiés ; que nous ne
nous justifions pas nous-mêmes. Le publicain de la parabole monta au Temple et fit
une très courte prière: « Mon Dieu, prends pitié du pécheur que je suis ». Et Jésus
dit que cet homme rentra chez lui « justifié », c’est-à-dire devenu un homme juste,
pardonné, un autre homme, en chantant allègrement, j’en suis sûr, dans son cœur (Lc
18,14). Qu’avait-il fait de si extraordinaire ? Rien, il s’était mis dans la vérité
devant Dieu, et c’est l’unique chose dont Dieu a besoin pour agir.* * *Comme celui
qui, pendant l’escalade à une paroi alpine, vient de surmonter un passage dangereux
et s’arrête un instant pour reprendre son souffle et admirer le nouveau panorama
qui s’ouvre devant lui, ainsi fait l’apôtre Paul, au début du chapitre 5 de la Lettre
aux Romains: « Justifiés donc par la foi, nous sommes ainsi en paix avec
Dieu par notre Seigneur Jésus Christ, qui nous a donné, par la foi, l'accès au monde
de la grâce dans lequel nous sommes établis ; et notre orgueil à nous, c'est d'espérer
avoir part à la gloire de Dieu. Mais ce n'est pas tout : la détresse elle-même fait
notre orgueil, puisque la détresse, nous le savons, produit la persévérance ; la persévérance
produit la valeur éprouvée ; la valeur éprouvée produit l'espérance ; et l'espérance
ne trompe pas, puisque l'amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l'Esprit Saint
qui nous a été donné. » (Rm 5, 1-5). Aujourd’hui, on fait des photos satellitaires
à rayons infrarouges de régions entières de la terre, voir de la planète dans sa totalité.
Comme le panorama vu d’en-haut, à la lumière de ces rayons, est diffèrent par rapport
à ce que nous voyons à la lumière naturelle et en étant dedans! Je me souviens de
l’une des toutes premières photos satellitaires diffusées dans le monde; celle-ci
reproduisait toute la péninsule du Sinaï. Les couleurs étaient très différentes, les
reliefs et les dépressions plus marquées. C’est un symbole. La vie humaine aussi,
vue aux rayons infrarouges de la foi, du haut du Calvaire, paraît différente de ce
que l’on voit « à l’œil nu ».
« Tous – disait le sage de l’Ancien Testament
– ont un même sort, le juste et le méchant... Je regarde encore sous le soleil : à
la place du droit, là se trouve le crime, à la place du juste se trouve le criminel
» (Qo 3, 16; 9, 2). Et en effet de tout temps on a vu l’iniquité triompher et l’innocence
humiliée. Mais pour ne pas avoir à croire qu’il existe dans le monde quelque chose
de fixe et de sûr, relève Bossuet, voilà qu’il nous arrive parfois de voir le contraire,
c’est-à-dire de voir l’innocence sur le trône et l’iniquité sur l’échafaud. Mais que
répondait Qohélet à cela ? « Alors je me dis en moi-même : le juste et le criminel
Dieu les jugera, car il y a un temps pour toutes choses » (Qo 3, 17). Il a trouvé
le point d’observation qui remet l’âme en paix. Ce que Qohélet ne pouvait pas savoir
et que nous, par contre, nous savons c’est que ce jugement a déjà eu lieu: « C’est
maintenant – dit Jésus en entrant dans sa passion – le jugement de ce monde ; maintenant
le Prince de ce monde va être jeté dehors ; et moi, une fois élevé de terre, j'attirerai
tous les hommes à moi » (Jn 12, 31-32). En Jésus-Christ mort et ressuscité le monde
a atteint sa destination finale. Le progrès de l’humanité avance aujourd’hui à un
rythme vertigineux et celle-ci voit se déployer devant elle des horizons nouveaux
et impensables, fruit de ses découvertes. Pourtant, on peut dire que la fin des temps
a déjà eu lieu, car en Christ, monté à la droite du Père, l’humanité a atteint sa
destination finale. Les cieux nouveaux et la terre nouvelle ont déjà commencé. Malgré
toutes les misères, les injustices, les monstruosités, présentes sur terre, l’ordre
du monde définitif a déjà commencé en lui. Ce que nous voyons de nos yeux peut nous
suggérer le contraire, mais le mal et la mort sont en réalité battus à jamais. Leurs
sources sont asséchées ; la réalité c’est que Jésus est le Seigneur du monde. Le mal
a été radicalement vaincu par l’œuvre de rédemption qu’il a opérée pour nous. Le nouveau
monde a déjà commencé. Une chose surtout paraît différente, vue avec les yeux
de la foi: la mort! Le Christ est entré dans la mort comme on entre dans une sombre
prison; mais il en est sorti en passant par l’autre mur. Il n’est pas retourné là
d’où il était venu, comme Lazare qui se remet à vivre pour mourir à nouveau. Il a
ouvert une brèche vers la vie que personne ne pourra refermer, et pour laquelle tous
peuvent le suivre. La mort n’est plus un mur contre lequel se brise toute espérance
humaine ; elle est devenue un pont vers l’éternité. Un « pont des soupirs », peut-être
parce que personne n’aime mourir, mais un pont, non plus un abîme qui avale tout.
« L’amour est fort comme la mort, dit le Cantique des cantiques » (Ct 8,6). En Jésus-Christ
il a été plus fort que la mort !
Dans son « Histoire ecclésiastique
du peuple anglais »,Bède le Vénérable raconte comment la foi chrétienne fit
son entrée dans le nord de l’Angleterre. Quand les missionnaires venus de Rome arrivèrent
dans le Northumberland, le roi local convoqua un conseil des dignitaires pour décider
s’il fallait ou pas leur permettre de répandre le nouveau message. Certains y étaient
favorables, d’autres pas. C’était l’hiver et dehors il neigeait et c’était la tempête,
mais la pièce était éclairée et chaude. A un certain moment un petit oiseau entra
par un trou du mur, voleta apeuré quelques instants dans la pièce, puis disparut par
un autre trou dans le mur d’en face.
Alors une des personnes du conseil se
leva et dit : « Sire, notre vie dans ce monde ressemble à ce petit oiseau. Nous venons,
nous ne savons pas d’où, nous profitons de la lumière et de la chaleur du monde un
instant et puis nous disparaissons à nouveau dans l’obscurité, sans savoir où nous
allons. Si ces hommes sont en mesure de nous révéler quelque chose du mystère de notre
vie, nous devons les écouter ». La foi chrétienne pourrait revenir sur notre continent
et dans le monde sécularisé pour la même raison que celle qui l’a faite arriver :
c’est-à-dire comme la seule à avoir une réponse sûre à donner aux grandes interrogations
de la vie et de la mort. * * *La croix sépare les croyants des non croyants,
car pour les uns celle-ci est « scandale » et « folie » et pour les autres « puissance
» et « sagesse » de Dieu (cf. 1 Co 1, 23-24); mais dans un sens plus profond celle-ci
unit tous les hommes, croyants et non croyants. « Jésus allait mourir […] non pas
pour la nation seulement, mais encore afin de rassembler dans l'unité les enfants
de Dieu dispersés » (cf. Jn 11, 51 s.). Les cieux nouveaux et la terre nouvelle sont
à tout le monde et pour tout le monde, car le Christ est mort pour tous. C’est
de tout cela que naît l’urgence d’évangéliser : « L'amour du Christ nous presse, à
la pensée qu’un seul est mort pour tous » (2 Co 5,14). Il nous presse à l’évangélisation!
Annonçons au monde la bonne nouvelle qu’« il n'y a plus maintenant de condamnation
pour ceux qui sont dans le Christ Jésus, car la loi de l'Esprit qui donne la vie
dans le Christ Jésus nous a affranchis de la loi du péché et de la mort » (Rm 8,1-2).
Il
y a un court récit de Franz Kafka qui est un puissant symbole religieux, et prend
une signification inédite, presque prophétique, écouté le vendredi saint. Il s’intitule
« Un message impérial ». Ce récit parle d’un roi qui, sur son lit de mort, appelle
à son chevet un de ses sujets et lui susurre un message à l’oreille. Ce message est
si important qu’il se le fait répéter, à son tour, à l’oreille. Puis il renvoie le
messager qui se met en route. Mais écoutons directement de l’auteur la suite du récit,
aux accents oniriques, proche du cauchemar, propres à cet écrivain: « Avançant
un bras, puis l’autre, le messager se fraye un chemin à travers la foule ; s’il rencontre
de la résistance, il désigne sa poitrine qui porte le signe du soleil ; il avance
ainsi, avec une très grande facilité. Mais la foule est immense, elle est partout.
Si l’espace s’ouvrait devant lui, comme il volerait ! Tu entendrais bientôt le martèlement
glorieux de ses poings à ta porte. Mais hélas, ses efforts restent vains ! Il continue
de peiner pour se frayer un chemin à travers les appartements du palais central desquels
il ne sortira jamais. Et s’il y parvenait, il n’en serait pas plus avancé ; dans la
descente des escaliers, il aurait encore à se battre ; et s’il parvenait jusqu’en
bas, il n’aurait encore rien fait, il lui faudrait traverser les cours ; et après
les cours, le second cercle de palais, et de nouveau des escaliers et des cours, et
de nouveau un palais ; et ainsi de suite durant les siècles des siècles. Et si enfin
il se précipitait par la dernière porte – mais jamais, jamais cela ne pourrait se
produire – il trouverait devant lui la Ville impériale, le centre du monde, la Ville
ont sont entassées des montagnes de ses détritus. Là, personne ne pénètre, même avec
le message d’un mort. Mais toi tu es assis à ta fenêtre, et tu rêves de ce message
quand vient le soir ». Sur son lit de mort, le Christ aussi a confié à son Eglise
un message: « Allez dans le monde entier. Proclamez la Bonne Nouvelle à toute la création
» (Mc 16, 15). Il y a encore tant d’hommes qui sont à la fenêtre et rêvent, sans le
savoir, d’un message comme le sien. Jean, nous venons de l’entendre, affirme que
le soldat a transpercé le côté du Christ sur la croix afin que cette parole de l’Ecriture
s’accomplisse : « Ils lèveront les yeux vers celui qu'ils ont transpercé » (Jn
19, 37). Dans l’Apocalypse il ajoute: « Voici qu'il vient parmi les nuées, et tous
les hommes le verront, même ceux qui l'ont transpercé, et, en le voyant, toutes les
tribus de la terre se lamenteront » (Ap 1,7).
Cette prophétie n’annonce pas
la venue finale du Christ, quand l’heure ne sera désormais plus à la conversion mais
au jugement. Il décrit au contraire la réalité de l’évangélisation des peuples. En
elle se vérifie une mystérieuse, mais réelle venue du Seigneur qui leur apporte le
salut. Leurs pleurs ne seront pas des pleurs de désespoir, mais des pleurs de guérison
et de consolation. Tel est le sens de l’Ecriture prophétique que Jean voit se réaliser
lorsque le Christ est transpercé sur le côté, c’est à dire celle de Zacharie 12, 10:
« Je répandrai sur la maison de David et sur l'habitant de Jérusalem un esprit
de grâce et de supplication, et ils regarderont vers moi, celui qu'ils ont transpercé.
»
L’évangélisation a une origine mystique; c’est un don qui vient de la croix
du Christ, de ce côté transpercé, ouvert, de ce sang et de cette eau. L’amour du Christ,
comme l’amour trinitaire dont il est la manifestation historique, est « diffusivum
sui », tend à se répandre et à atteindre toutes les créatures, « spécialement
celles qui ont le plus besoin de sa miséricorde ». L’évangélisation chrétienne n’est
pas « conquête », n’est pas « propagande » ; c’est un don de Dieu au monde en son
Fils Jésus. C’est donner à la Tête la joie de sentir la vie s’écouler de son cœur
vers son corps, jusqu’à en vivifier ses membres les plus lointains.
Nous
devons faire en sorte que l’Eglise ne ressemble jamais à ce château compliqué et encombré
décrit par Kafka, et que le message puisse sortir d’elle libre et joyeux comme lorsqu’il
a commencé sa course. Nous savons quels sont les empêchements qui peuvent retenir
le messager: les murs diviseurs, à commencer par ceux qui séparent les différentes
églises chrétiennes entre elles, l’excès de bureaucratie, les restes d’apparats, lois
et controverses passées, devenus désormais de simples détritus. Dans l'Apocalypse,
Jésus dit qu'il se tient à la porte et frappe (Ap 3,20). Parfois, comme l'a souligné
notre Pape François, il ne frappe pas pour entrer, mais frappe de l'intérieur pour
sortir. Sortir à la «banlieue existentielle du péché, de la souffrance, de l'injustice,
de l'ignorance et de l'indifférence religieuse, de la pensée et de toutes les formes
de misère. » C’est comme avec certains vieux édifices. Au fil des siècles, pour
s’adapter aux exigences du moment, ceux-ci sont remplis de cloisons, d’escaliers,
de salles et petites salles. Le moment arrive quand l’on s’aperçoit que toutes ces
adaptations ne répondent plus aux exigences actuelles, qu’elles sont même un obstacle,
et il faut alors avoir le courage d’abattre tout cela, et de ramener l’édifice à la
simplicité et à la linéarité de ses origines. C’est la mission que reçut un jour un
homme qui priait devant le crucifix de Saint Damien : « Va, François, et répare ma
maison ». « Qui peut-être à mesure de cette tache ? », se demandait atterré l’Apôtre
Paul devant le devoir surhumain d’être « la bonne odeur du Christ » dans le monde;
et voici sa réponse qui vaut encore aujourd’hui: « Ce n'est pas que de nous-mêmes
nous soyons capables de revendiquer quoi que ce soit comme venant de nous; non, notre
capacité vient de Dieu, qui nous a rendus capables d'être ministres d'une nouvelle
alliance, non de la lettre, mais de l'Esprit ; car la lettre tue, l'Esprit vivifie
» (2 Co 2, 16; 3, 5-6). Puisse l’Esprit Saint, en ce moment où s’ouvre pour l’Eglise
un temps nouveau, plein de promesses et d’espérance, réveiller chez les hommes, qui
sont à la fenêtre, l’attente du message et chez les messagers la volonté de le leur
faire parvenir, au prix même de leur vie.