2013-03-08 12:37:55

L'Eglise a besoin de témoins simples et pauvres


Rome bouillonne, l’univers médiatique s’agite et spécule, mais l’Eglise universelle veille. Les cœurs et les esprits sont en prière, l’attente est grande.

C’est en substance ce que nous dit le père Nicolas Buttet, prêtre, modérateur de la fraternité Eucharistein et fondateur de l’institut Philanthropos. « Je sens un besoin de prière énorme », nous confie-t-il. « On se rend bien compte que Benoît XVI a porté à bout de cœur, à bout de bras, à bout de force cette Eglise, et ce combat spirituel de notre temps ». Car l’enjeu, poursuit-il, est « capital ».

Ecoutez l'entretien de Manuella Affejee avec le père Nicolas Buttet : RealAudioMP3

La définition du Temps chez les Grecs, rappelle le père Buttet, repose sur deux concepts-clefs : le Kronos, la succession des années, et le Kairos, l’occasion, le basculement, ou le temps de la visite de Dieu. « Nous sommes dans un kairos, véritablement maintenant», affirme-t-il. L‘enjeu dont ce Kairos serait porteur « dépasse toutes les stratégies qu’on pourrait lire ou voir, mais rejoint vraiment l’enjeu du salut du monde ». Et dans ce cas précis, la prière reste, pour le père Buttet, « la première arme et le premier moyen pour faire avancer les choses ».

L’urgence d’un renouveau spirituel de l’Eglise

Les avis sont unanimes : les chantiers s’annoncent colossaux pour l’Eglise. L’ignorance, la sécularisation massive, la confrontation à la modernité et à un relativisme souvent hostile, les questions bioéthiques et morales, les fondamentalismes religieux, sont les principaux défis qui attendent le futur pape.

Ce travail d’évangélisation du monde doit, pour beaucoup de fidèles, s’accompagner d’un vrai renouveau au sein même de l’Eglise et de la Curie romaine, éclaboussées par des scandales retentissants. Le Cardinal Philippe Barbarin n’avait pas hésité à l’affirmer avec force sur nos ondes : «Quand l ’Eglise, composée de pêcheurs que nous sommes, trahit ostensiblement son Seigneur et l’Evangile, c’est une honte ». Le constat est partagé par Nicolas Buttet, qui cite le philosophe français Jacques Maritain : « Il y a l’Eglise, sa personne qui est sainte, et son personnel qui laisse à désirer ».

Pour le père Buttet, la réduction de la Curie à une dimension essentiellement administrative a porté atteinte à l’essence même de sa mission. « Dès qu’on met les pieds là-dedans, on peut très facilement se laisser prendre à une logique de pouvoir, et non plus de service », déplore-t-il. C’est une vision humaine et organisationnelle des choses qui se serait, peu à peu, imposée, au détriment d’une vision de foi, « d’une vision théologale ». La curie n’est pas « une administration comme les autres », précise Nicolas Buttet.

La dimension administrative, qui requiert « rigueur et compétence » ne doit certes pas être négligée, mais la mission de la curie va bien au-delà. Ce dont l’Eglise et la curie ont besoin, « en urgence », continue le père, « c’est d’un renouveau théologal et spirituel profond ». Cette « purification » préconisée par certains, cette « réorientation », -préfère dire Nicolas Buttet-, passe par une « évangélisation de la curie », et par une « remise en perspective de la finalité sa mission», qui n’est rien de moins que l’évangélisation du monde.

Une Eglise « simple et pauvre »

C’est en effet à un monde marqué par la présomption et l’angoisse, que l’Eglise doit apporter l’Espérance. Le défi est « terrible » pour Nicolas Buttet, mais « l’Eglise a la réponse ». « Il ne faut pas qu’elle se perde en débats liturgiques ou idéologiques, ajoute-il, mais qu’elle ramène ce regard de foi ». L’annonce prophétique et décomplexée de la Bonne nouvelle du Salut : voilà « la réponse la plus scandaleuse et guérissante pour notre monde », affirme le père. A l’Eglise donc de se renouveler, de redevenir « simple et pauvre », et d’adapter son langage. « Le monde d’aujourd’hui a plus besoin de témoins que de maîtres, et s’il écoute les maîtres, c’est parce qu’ils sont avant tout des témoins », conclue le père Buttet.

Manuella Affejee

(Photo: obélisque Place Saint Pierre, Ettore Ferrari, Ansa)







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