Benoît XVI et les jeunes : une génération "réenchantée"

Succéder à Jean-Paul II dans le cœurs des jeunes : la chose ne s’annonçait pas facile. La réelle proximité du pape polonais avec la jeunesse, les liens particuliers qu’il avait su tisser avec elle, et son charisme, si évident, semblaient bien difficile à égaler, surtout pour Benoît XVI, et sa personnalité si différente de celle de son prédécesseur.
L’homme est en effet discret, effacé, « préfère le silence des bibliothèques et des monastères». Arriver derrière Jean-Paul II, «pape des foules», « pape des jeunes », et initiateur des JMJ, apparaissait donc «bien compliqué» pour lui.

Et pourtant, «dès ses premières JMJ à Cologne en 2005, observe Marie-Lucile Kubacki, journaliste à l’hebdomadaire La Vie, il s’est passé quelque chose entre Benoît XVI et les jeunes», d’emblée conquis par la silhouette fragile du nouveau pape, son sourire timide, sa profondeur et la force de sa parole.

Ecoutez l'entretien de Manuella Affejee avec Marie-Lucile kubacki :

Benoît XVI n’est pas le pape des faux-semblants, cela les jeunes le comprennent instantanément. «Il n’a pas cherché à séduire» remarque Marie-Lucile Kubacki ; son authenticité, son humilité et sa vulnérabilité n’en ont été que plus touchantes pour les jeunes.

Une plongée au cœur de la culture des jeunes

La jeunesse : le souci permanent de Benoît XVI, qui n’a cessé, tout au long de son pontificat, de chercher à s’en rapprocher, à en comprendre les attentes, les peurs et les espérances… jusqu’à en utiliser les moyens de communication. Le 12 décembre 2012, salle Paul VI, et sous une salve d’applaudissements, Benoît XVI twitte les 140 premiers caractères de l’Histoire de la papauté. «Le théologien, l’homme de réflexion fait son entrée dans l’univers de l’immédiateté», analyse Marie-Lucile Kubacki. Le pape veut se rendre accessible, et n’hésite pas, pour cela, à se plonger dans la culture même des jeunes.
Mais pour eux, Benoît XVI reste un père avant tout, «une figure de bienveillance». « Il leur a fait une place dans l’Eglise, affirme Kubacki, il leur a fait confiance, et les jeunes se sont sentis accueillis».

Benoît XVI, pape de la liberté intérieure

Ce que Marie-Lucile Kubacki retiendra de Benoît XVI ? «Une parole de joie !» lance-t-elle. Benoît XVI n’a cessé d’exhorter une jeunesse guettée par la désespérance à ne pas se laisser abattre. Voici le message qu’il lui adresse, lors de la journée mondiale de la paix 2011 : «Vous êtes un don précieux pour la société. Face aux difficultés, ne vous laissez pas prendre par le découragement et ne vous complaisez pas dans les fausses solutions.» (…) «N'ayez pas peur de vous engager, d'affronter l'effort et le sacrifice, de choisir des chemins qui exige la fidélité et la constance, l'humilité et le dévouement. Vivez avec confiance votre jeunesse et les désirs profonds de bonheur, de vérité, de beauté et d'amour vrai que vous éprouvez! Vivez intensément cette phase de la vie si riche et pleine d'enthousiasme». «Benoît XVI est le pape de la liberté intérieure », note Marie-Lucile Kubacki, celui qui encourage à aller à contre-courant.

« La génération Benoît XVI »

L’annonce de sa renonciation a suscité une vive émotion parmi les jeunes, visible notamment sur les réseaux sociaux. «Il n’y a eu aucune remise en question», remarque Marie-Lucile Kubacki. Les jeunes ont interprété cet ultime signe d’humilité comme un geste d’espoir et de confiance de Benoît XVI en l’avenir de l’Eglise.
Ils ont donc pris la mesure de la renonciation historique du pape, mais n’en ressentent pas moins une vraie tristesse. « Ils ont l’impression de perdre leur pape », conclut Marie-Lucile Kubacki… Un pape qui aura finalement su leur redonner confiance, et « réenchanter » une génération, la « génération Benoît XVI », à jamais reconnaissante.
Manuella Affejee


(Photo : Madrid 21 août 2011)