2013-02-21 18:37:06

Benoît XVI et le dialogue avec les musulmans


Chrétiens et musulmans, unissez-vous : c’est l’un des leitmotiv du pontificat de Benoît XVI. Le dialogue interreligieux, et en particulier le rapport avec les musulmans fait en effet partie des grands dossiers traités avec beaucoup de détermination par le Pape. Cheminant sur les pas de ses prédécesseurs et riche de leur héritage - déclaration Nostra ætate du concile Vatican II de Paul VI en 1965, création d'une Commission pour les rapports religieux avec les musulmans en 1974, voyages très symboliques de Jean-Paul II au Maroc en 1985 puis en Syrie en 2001, mais aussi Assise et son esprit – Benoît XVI n’a eu de cesse d’encourager à un véritable dialogue.

Certes ses relations avec les musulmans n’ont pas débutées sous les meilleurs auspices avec le discours très contesté de Ratisbonne, prononcé peu de temps après son élection, mais n’est-ce pas après ce fameux exposé, traitant du rapport entre foi et raison, qu’un tournant a été marqué et un nouveau cap franchi dans le dialogue islamo-chrétien ?

Des gestes décisifs et un dialogue de raison

Il y a eu la création du Forum catholique-musulman suite à une lettre écrite en octobre 2007 par 138 personalités musulmanes, qui a réuni à deux reprise, à Rome puis en Jordanie de hauts représentants catholiques et musulmans pour une réflexion commune sur des thèmes tels que « Raison, foi et personne humaine ». Et puis le voyage en Turquie en 2006 et ce moment de méditation du Pape, déchaussé, dans la Mosquée bleue au côté du Grand mufti d’Istanbul : une image qui a fait le tour du monde.

Au geste, Benoît XVI a associé la parole en invitant à plusieurs reprises chrétiens et musulmans à collaborer pour faire face au relativisme. « Dans un monde marqué par le relativisme et excluant trop souvent la transcendance de l’universalité de la raison, nous avons impérativement besoin d’un dialogue authentique entre les religions et entre les cultures, capable de nous aider à surmonter ensemble toutes les tensions, dans un esprit de collaboration fructueuse » (Discours de Benoît XVI aux ambassadeurs de 21 pays à majorité musulmane près le Saint-Siège et à quelques représentants des communautés musulmanes - 25 septembre 2006).

Chrétiens et musulmans appelés à s’unir pour dénoncer la violence

La voix de Benoît XVI s’est également élevé pour exhorter chrétiens et musulmans à œuvrer main dans la main en faveur de la paix . « Il est temps que musulmans et chrétiens s’unissent pour mettre fin à la violence et aux guerres » Des paroles prononcée depuis le Liban, en septembre dernier, où le Pape a signé et remis son exhortation apostolique post-synodale « Ecclesia in Medio Oriente », qui a fait suite à l’assemblée spéciale pour le Moyen-Orient du synode des évêques, qui s’est réuni au Vatican du 10 au 24 octobre 2010.

Avant même de fouler le sol libanais, dans l’avion qui le menait à Beyrouth, Benoît XVI avait dénoncé le fondamentalisme qui « est toujours une falsification de la religion ». « La tâche de l’Église et des religions est « d’illuminer et de purifier les consciences (…) le message fondamental de la religion doit être contre la violence qui en est une falsification – comme le fondamentalisme – et doit être l’éducation, l’illumination et la purification des consciences pour les rendre capables au dialogue, à la réconciliation et à la paix ». (Conférence de presse dans l'avion pour le Liban - 14 septembre 2012)


Alors que le dialogue islamo-chrétien apparait encore pour beaucoup comme une illusion, Benoît XVI s’est montré convaincu du contraire. Plus encore, semble-t-il que ses prédécesseurs il a fait de ce vaste chantier une priorité. Beaucoup reste encore à construire, comme en témoignent les incompréhensions et violences quasi quotidiennes dans de nombreux pays. Mais les fondations ont été renforcées, et des fenêtres ont été ouvertes, par un Pape qui se retire sur la pointe des pieds en laissant des traces indélébiles.
(Hélène Destombes)


Entretien. Benoît XVI, le Pape qui a souhaité instaurer un dialogue de raison avec les musulmans. Vincent Aucante, ancien diplomate à Rome, à l’ambassade de France près le Saint-Siège, en est convaincu. Pour l’auteur de « Benoît XVI et l'Islam » (Parole et silence, 2008) la particularité de ce Pape a été « véritablement de promouvoir un dialogue, un échange de raison, avec comme objectif d’arriver à des positions qui soient réellement communes entre des représentants de l’Islam et l’Eglise catholique ».

« Benoît XVI a voulu aller plus loin, que Jean-Paul II, plus loin qu’une rencontre qui a été nécessaire, qui a été une étape. Il a souhaité instaurer un dialogue de raison ». Le discours de Ratisbonne a été « une maladresse » affirme Vincent Aucante mais cet exposé très contesté qui traitait du rapport entre foi et raison, a ensuite permis de franchir un nouveau cap.

La tâche du futur Pape sera de « continuer cette œuvre initiée par Benoît XVI ». Il va s’agir notamment de « lancer le troisième Forum catholique-musulman, d’élargir le dialogue avec d’autres composantes du monde musulman et de poursuivre la mission de paix au Proche-Orient ».

Écoutez Vincent Aucante interrogé par Hélène Destombes RealAudioMP3

(Photo : portait du Pape aux abords de la mosquée Mohammed Al-Amin à Beyrouth)







All the contents on this site are copyrighted ©.