2013-02-19 15:53:02

CPI : juger ou non Laurent Gbagbo ?


Laurent Gbagbo, ancien président de la Côte d’Ivoire, comparait ce mardi devant la Cour Pénale Internationale (CPI) à La Haye. Premier ex-chef d’Etat à être traduit devant la justice internationale, il est soupçonné d’être le « co-auteur indirect » de quatre chefs de crimes contre l’humanité : meurtres, viols, persécutions et autres actes inhumains, autant d’actes commis pendant la crise qui a suivi la présidentielle d 28 novembre 2010. Laurent Gbagbo avait refusé de reconnaître sa défaite alors que les résultats, validés par les observateurs de l’ONU, donnaient Alassane Ouattara vainqueur. La crise politique avait connu son pic lors de combats entre le 16 décembre 2010 et le 12 avril 2011. Trois mille personnes ont péri dans ces affrontements.

Les Ivoiriens divisés

La presse ivoirienne, comme l’ensemble de la société, est partagée. Pour les journaux proche de l’ancien pouvoir, la CPI a perdu toute crédibilité. Pour les journaux pro-gouvernementaux, Laurent Gbgabo va « répondre de ses crimes » comme le titre « le Nouvel Eveil ». Sur place à La Haye, Laurent Gbagbo peut compter sur le soutien moral de ses partisans. Des centaines de personnes étaient réunis mardi matin aux cris de « Libérez notre président » comme l’a constaté un journaliste de l’AFP présent au tribunal.

Les juges de la Cour vont écouter et évaluer si les éléments récoltés par le procureur de la Cour, Luis-Moreno Ocampo sont suffisants pour tenir plus tard un procès. Pour Michel Galy, chercheur au centre d’études sur les conflits à Paris, « il semble que le procureur ait surtout instruit à charge, or il aurait dû instruire à charge et à décharge ». « Il a systématisé un certain nombre de témoignages et de documents pour montrer que Laurent Gbagbo a une politique, avec un grand P, de persécution du camp adverse » explique le chercheur. Cette enquête « à sens unique » a négligé par ailleurs, de s’intéresser aux adversaires de l’ancien président, à savoir l’actuel chef de l’Etat, Alassane Puattara, et Guillaume Soro, l’ancien Premier ministre et actuel président de l’Assemblée nationale.

Transition ivoirienne à risque

Ce qui se passera à La Haye est évidemment suivi avec grande attention en Côte d’Ivoire. Le pays connaît toujours des tensions liées à la crise de 2010-2011 et l’heure de la réconciliation entre Ivoiriens n’a pas encore sonné véritablement. Michel Galy s’inquiète ainsi des répercussions que le cas personnel de Laurent Gbagbo pourrait avoir sur ce processus mais il pointe un autre problème tout aussi préoccupant selon lui : « la question primordiale des prisonniers politiques qui sont au nombre de cent cinquante ». De plus, il y a environ « 1500 militaires avec des statuts très divers » précise-t-il. « Une amnistie m’apparait comme un préalable à l’organisation d’élections multipartites » conclut-il. Mais pour l’heure, à Abidjan, rien de cela n’est prévu.

Michel Galy, chercheur au centre d’études sur les conflits à Paris interrogé par Xavier Sartre RealAudioMP3









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