La démission du Pape, un fait quasi inédit dans l'histoire moderne de l'Eglise
Cette démission du pape est un fait quasi inédit dans l’histoire moderne de l’Eglise.
Seul un ermite, le Pape Célestin V avait avant Benoît XVI pris la décision de renoncer
au ministère de Pierre en 1294 il y a plus de huit siècles et seulement quelques mois
après son élection. Il avait alors évoqué comme Benoît Xvi des motifs simples à sa
démission : l’âge, la maladie, son incompétence face à la curie et le désir de se
retirer dans son ermitage.
Les papes qui ont abdiqué
Avant Célestin
V, certains papes s’étaient déjà retirés lors de circonstances historiques particulières
plus ou moins connues. Ainsi, le pape Martin Ier, arrêté puis exilé en Grèce en 653
par l’empereur d’Orient, aurait approuvé tacitement l’élection faite de son vivant
d’un autre pape, Eugène Ier. 300 ans plus tard, en 964, le pape Benoît V, souvent
présenté comme un antipape, était déposé par l’empereur Otton Ier, et acceptait la
sentence, renonçant de ce fait au pontificat.
On sait par ailleurs que le pape
Jean XVIII est mort en 1009 à Rome comme simple moine de Saint-Paul-hors-les-Murs,
que le pape Sylvestre III, expulsé par son rival Benoît IX en 1045, ne s’est plus
occupé ensuite que de son diocèse, et que le même Benoît IX abdiqua quelques mois
plus tard en faveur du pape Grégoire VI. Enfin, après Célestin V, le pape Grégoire
XII renonça lors du Concile de Constance en 1415, et se retira comme simple cardinal-évêque.
C’était l’époque du grand schisme d’Occident. L’Eglise se trouvait alors en présence
de trois papes concurrents.
Jean-Paul II avait évoqué l'éventualité de la
démission d'un pape
L’éventualité de la renonciation d’un pape avait été
déjà évoquée par plusieurs papes du 20e siècle, et en dernier lieu par Jean Paul II
dans la Constitution apostolique "Universi dominici gregis", publiée en février 1996.
Le pape y faisait référence au paragraphe 2 de l’article 332 du Code de droit canon
de 1983. On peut y lire que "s’il arrive que le pontife romain renonce à sa charge,
il est requis pour la validité que la renonciation soit faite librement et qu’elle
soit dûment manifestée, mais non pas qu’elle soit acceptée par qui que ce soit".
Jean
Chelini est historien, spécialiste de l'histoire religieuse et plus particulièrement
de l'Église, médiévale ou contemporaine
Jean
Chelini est le créateur et directeur de l'Institut de droit et d'histoire canoniques
d'Aix-en-Provence. Il est l’auteur de Benoît XVI : l’Héritier du Concile, Paris, Hachette,
2005. Il revient sur les droits d’un Pape à démissionner
(Photo : Le Pape durant
l'audience générale du 24 avril 2010 en salle Paul VI)