L'Eglise de France, au service des pauvres, refuse la polémique
Les paroles de Mme Cécile Duflot, ministre du logement, auront fait les choux gras
des médias français, lundi 3 décembre. Sa remise en cause explicite de la présence
et de l’implication de l’Eglise dans le domaine de la solidarité, a suscité la stupeur
et l’indignation. Ainsi pouvait-on lire dans les colonnes du quotidien « Le Parisien
» : « Je souhaite faire appel à toutes les bonnes volontés et faire appliquer la
loi à tous ceux qu’elle concerne : par exemple, il semble que l’archevêché de Paris
possède des bâtiments quasi vides. Je viens donc de leur écrire pour voir avec eux
comment utiliser ces locaux ».
Cette sommation à l’archevêché de Paris s’est
accompagnée d’une menace de réquisitions, où cas où les catholiques se montreraient
récalcitrants : « je le ferais sans mollesse, comme l’auraient fait de Gaulle ou Jacques
Chirac. J’ai bon espoir qu’il n’y ait pas besoin de faire preuve d’autorité, je ne
comprendrais pas que l’Eglise ne partage pas nos objectifs de solidarité ».L’attaque
a fait bondir les catholiques. La réaction de l’archevêché de Paris, passablement
agacé par le ton péremptoire de la Ministre, et surtout par son procès d’intention,
n’a d’ailleurs pas tardé. « L’église n’a pas attendu la menace de réquisition brandie
par la ministre Mme Duflot pour prendre des initiatives ».
L'Eglise est
depuis longtemps active dans le combat contre la pauvreté
C’est oublier
en effet que l’Eglise catholique a toujours été en première ligne du combat contre
la pauvreté, l’exclusion, le « mal logement ». Ses actions sont visibles, tangibles,
et quantifiables. Que l’on songe seulement au Secours catholique, à la Croix- Rouge,
aux nombreuses ONG catholiques, qui préfèrent l’action discrète et concrète aux fanfaronnades.
Que l’on songe à l’opération Hiver solidaire, menée de front par l’archevêché de Paris
dès 2008, et impliquant 25 paroisses pour l’accueil des sans-abri. Que l’on songe
enfin aux diverses initiatives visant à faire habiter sans-abri et jeunes chrétiens
sous le même toit. Rien que pour la France, la liste serait longue.
Mgr
Bernard Podvin, porte-parole de la conférence épiscopale de France, joint par téléphone,
se veut pourtant apaisant
Mais pas mal
de catholiques s’interrogent : pourquoi Mme Duflot ne parle-t-elle pas des logements
publics vides ? Des châteaux des syndicats ? Des pièces vides du ministère du logement
? Pour Patrice de Plunkett, journaliste et blogueur, la ministre a choisi la mauvaise
cible : "Pour faire oublier sa soumission à un gouvernement qui traite de "kyste"
les écologistes, Duflot tente de détourner l'attention en s'en prenant au diocèse
de Paris[...] On aimerait d'ailleurs savoir ce que les bobos d'EELV et du PS font
en matière caritative : locaux à disposition des SDF, soupes populaires, etc ? Le
libéral-libertaire n'est sensible qu'en paroles. Les seuls à agir sur le terrain caritatif
sont les catholiques, les restos du Cœur, les communistes du Secours populaire et
une galaxie d'associations civiles, sans rapport avec la boutique Désir et son annexe
Duflot".
L'avis est partagé par Natalia Trouiller, journaliste et blogueuse.
Pour elle, c'est la réalité du terrain qui donne tort aux propos de Mme Duflot, propos
qui voudraient avant tout "noyer le poisson politique" :
Pour d’autres,
et ils sont nombreux, cette attaque frontale s’inscrirait dans le contexte du bras
de fer sur le « mariage pour tous ». Avec l’espoir secret, peut-être, d’intimider
une église qui a pris la parole sur un projet de loi qui devait faire l’unanimité. Manuella
Affejee
Une réaction du Cardinal archevêque de Paris, Mgr André Vingt Trois,
serait attendue dans quelques jours.