Dossier : entretien exclusif avec le président ivoirien, Alassane Ouattara
« Je voudrais d’abord vous dire combien nous sommes heureux d’avoir eu l’opportunité
de rencontrer sa Sainteté le Pape pour recevoir ses conseils et ses bénédictions et
surtout recueillir ses prières pour la paix en Côte d’Ivoire. » Interrogé en exclusivité
ce samedi par le père Joseph Ballong du programme Afrique francophone de Radio Vatican,
le président ivoirien Alassane Ouattara prend l’initiative de revenir sur son audience
avec Benoît XVI ce vendredi : « C’est une visite importante pour moi, pour les Ivoiriens
et pour la Côte d’Ivoire ».
Intégralité de l'entretien exclusif réalisé
par le père Joseph Ballong avec le président ivoirien Alassane Ouattara
Au
sujet de la situation actuelle de son pays, profondément meurtri par la crise politico-militaire
de décembre 2010-avril 2011 qui a fait quelques 3 000 morts, le président ivoirien
affirme qu’un « bien meilleur avenir » se dessine pour la Côte d’Ivoire, en raison,
des atouts dont elle dispose, la « diversité qui est véritablement une richesse
et le climat de paix qui se renforce actuellement. » Le président Ouattara évoque
plus de sécurité et une bonne santé économique du pays.
Un meilleur avenir
se dessine pour la Côte d’Ivoire
En ce qui concerne la réconciliation
nationale deux ans après la crise, Alassane Ouattara affirme que la société civile
ainsi que le Catholicisme, Protestantisme et l'Islam, ont eu un « rôle central ».
Le Président ivoirien se félicite de la collaboration des religions en faveur de la
paix et de la réconciliation, « du caractère inter religieux et œcuménique de la nation
ivoirienne. »
« L’Eglise catholique joue un rôle important en Côte d’Ivoire
( …) et je ne voudrais pas qu’on pense que ce rôle soit limité dans le domaine de
la religion ou dans grandes villes. L’Eglise apporte une grande contribution dans
le domaine social, dans celui de l’éducation et de la santé »
« Une solution
rapide pour le Mali? Je ne sais pas »
Le chef d’Etat ivoirien étant également
président en exercice de la CEDEAO, la communauté économique des Etats d’Afrique de
l’Ouest, le père Joseph Ballong l’a interrogé sur la situation malienne et guinéenne.
En
ce qui concerne le Mali, le président Ouattara doute d’une « solution rapide ». Réunie
cinq fois ces huit derniers mois, il assure cependant que la CEDEAO est mobilisée
pour amener les Maliens à retrouver la paix, l’unité du pays et pour faire en sorte
que la laïcité soit « sauvegardée » et « rétablie. »
Rappelant la condamnation
du coup d’état de mars dernier, il souhaite un retour à l’ordre constitutionnel et
des élections démocratiques car, estime-t-il, « la situation au Mali est dangereuse
pour la sous région. »
Un dialogue politique pour obtenir l'unité du Mali
et faire partir les extrémistes
Le président Ouattara « espère », une
décision du Conseil de Sécurité de l’ONU à la fin du mois ou le mois prochain pour
permettre l’intervention militaire au nord Mali. Mais « bien entendu, précise-t-il,
nous souhaitons tous des négociations qui permettent d’éviter la guerre dans le nord
Mali, parce que la guerre veut dire des pertes en vies humaines et du sang versé.
Personne ne souhaite cela, mais il faut nécessairement que les extrémistes, surtout
s'is sont des étrangers, quittent le nord Mali. »
Quand il évoque des négociations,
le président de la CEDEAO souhaite que les mouvements tels que le MNLA ou Ansar Dine
dialoguent avec les Maliens du sud pour trouver une solution politique. Cette option,
« la meilleure» selon lui, permettrait de restaurer l’unité et faire en sorte que
les extrémistes étrangers partent.
Faut-il craindre une islamisation de
l'Afrique ?
Ce qui se passe au Mali et au Nigéria avec Boko Aram, ne représente-t-il
pas un danger de déstabilisation de l’Afrique et est-ce que cela ne cache pas la
volonté de certains musulmans d’islamiser l’Afrique ? « J’espère que ce qui arrive
au Mali et au Nigeria sont des accidents et que nous allons pouvoir régler ce problème
», répond Alassane Ouattara. « Vous savez l’Islam, en Afrique de l’Ouest notamment,
est un Islam modéré. Il n’y a jamais eu de violence dans l’application de cette religion
et ce qui se passe est peut être la volonté d’extrémistes extérieurs au continent
et à notre sous-région, de certains qui veulent imposer leur perception de l’Islam
en Afrique et nous ne pouvons pas accepter cela. » Face à ce risque, le président
Alassane Ouattara se dit favorable à un renforcement du dialogue interreligieux entre
les dignitaires de toutes les religions.
Guinée Bissau : pour un consensus
politique et combattre le trafic de drogue
Enfin, concernant la situation
en Guinée Bissau, la CEDEAO encourage un « consensus politique » afin de remplir des
« objectifs simples » après le coup d’état qui a suivi le premier tour de l’élection
présidentielle en mars dernier. Le président de la CEDEAO souhaite la tenue d’élections
démocratiques dans la première moitié de l’année prochaine et estime qu’il faut restaurer
l’armée pour combattre le trafic de drogue, prévalant en Guinée Bissau.