Caricatures de Mahomet : le gouvernement français appelle à la prudence
Polémique. La France prend des "précautions de sécurité particulières" pour protéger
ses ambassades, après la publication de caricatures du prophète dans l'hebdomadaire
satirique français Charlie Hebdo. Le journal publie dans son numéro de mercredi
des dessins représentant le prophète Mahomet. L’une des caricatures montre Mahomet
dénudé, dans une parodie d’une scène d’un film « Le Mépris » de Jean-Luc Godard où
l’acteur français Michel Piccoli admire la chute de reins de la célèbre Brigitte Bardot.
Alors que le monde musulman s’enflamme après la diffusion d’un extrait sur internet
du film islamophobe « L’innocence des musulmans », le choix osé de l’hebdomadaire
suscite de vives réactions en France.
"Ne pas verser de l'huile sur
le feu"
Le Premier ministre français a tenu à exprimer sa « désapprobation
face à tout excès » et cela, « dans le contexte actuel ». Sans dénier la liberté d’expression,
Jean-Marc Ayrault a appelé à « l’esprit de responsabilité de chacun ». De son côté,
le recteur de la Grande Mosquée de Paris, Dalil Boukakeur, demande de ne pas « verser
de l’huile sur le feu ». Réaction plus ferme du Conseil français du culte musulman,
organe représentant différents courants musulmans en France, qui condamne « avec la
plus grande vigueur ce nouvel acte islamophobe qui vise à offenser délibérément les
sentiments des musulmans ». Le CFCM presse aussi les musulmans de France « à ne pas
céder à la provocation ».
"La liberté de la presse est-elle une provocation?"
Chez
Charlie Hebdo, on ne comprend pas vraiment la polémique. « La liberté de la presse
est-elle une provocation ? », s’interroge le directeur du journal, Charb. « Je n'appelle
pas les musulmans rigoristes à lire "Charlie Hebdo", comme je n'irais pas dans une
mosquée pour écouter des discours qui contreviennent à ce que je crois », a-t-il ajouté
sur la chaine d’information française Itélé. Le magazine n’en est pas à sa première
caricature. Il y a moins d’un an, ses locaux avaient été incendiés après la sortie
d’un numéro spécial, rebaptisé « Charia Hebdo ». En une, le prophète Mahomet s’étalait,
hilare.
Réaction de l'Eglise de France et du quotidien du Vatican
Interrogé
sur la radio Europe 1 sur les dessins parus dans l'hebdomadaire, le cardinal Vingt-Trois
a souligné : "Je ne veux pas les voir. Je pense que ce genre de provocations ne prospèrent
que si elles suscitent l'intérêt. Je ne m'intéresse pas à ces provocations." Mais,
a-t-il poursuivi, "cela va susciter la répulsion de beaucoup de croyants musulmans
qui vont se sentir blessés dans leur foi et qui vont chercher des moyens d'exprimer
leur mécontentement". "On ne peut pas dire n'importe quoi sous le couvert de la
liberté d'expression, a ajouté Mgr Vingt-Trois. Je pense que ce qui caractérise une
démocratie, c'est qu'on puisse avoir recours à des moyens de droit pour obtenir réparation."
Par
ailleurs, l'Osservatore Romano, quotidien du Vatican, a qualifié mercredi la publication
de caricatures de Mahomet par l'hebdomadaire satirique français Charlie Hebdo d'"initiative
discutable", qui "jette de l'huile sur le feu"."Alors que l'on cherche péniblement
à faire baisser la tension qui traverse le monde islamique en raison du film Innocence
des Musulmans, on risque aujourd'hui d'ouvrir un nouveau front de protestation" avec
la publication des dessins satiriques du prophète Mahomet, a souligné l'Osservatore
Romano sous le titre "Huile sur le feu".