Moyen-Orient : le rôle pacificateur des médias chrétiens
Un congrès intitulé « La Communication comme instrument d’évangélisation, de dialogue
et de Paix au Moyen-Orient » se tient du 17 au 20 avril au centre de conférence
Béthanie à Harissa, au Liban. La rencontre, à l’initiative du Conseil Pontifical pour
les Communications Sociales, en collaboration avec l’Assemblée des Patriarches Catholiques
d’Orient a été convoqué suite à l’Assemblée Spéciale pour le Moyen Orient et dans
la perspective du prochain Synode sur la nouvelle évangélisation. Elle rassemble près
de 80 évêques, prêtres mais aussi laïcs originaires du Liban, de Jordanie, de Syrie,
d’Irak ou encore d’Egypte. Parmi les intervenants : Sa Béatitude Béchara Boutros Raï,
Patriarche d'Antioche des Maronites, le Patriarche latin de Jérusalem Mgr Fouad Twal
et Mgr Youssef Soueif, Archevêque de Chypre des maronites. L’objectif est de faire,
en quelque sorte, un état des lieux de la communication au Moyen-Orient et de définir
le rôle qui doit être joué par l’Église dans le contexte actuel. C’est Mgr Claudio-Maria
Celli, le président du Conseil Pontifical pour les Communications Sociales qui a ouvert
ces quatre jours de débats et d’échanges. Il souligne la richesse des témoignages
des nombreux participants qui relatent parfois des situations de grandes difficultés
Des propos recueillis
par Hélène Destombes
Ce colloque, à Harissa, intervient à cinq mois du voyage
apostolique de Benoît XVI au Liban. Durant ce déplacement qui aura lieu du 14 au 16
septembre 2012, le Pape signera l’Exhortation apostolique post-synodale adressée à
l’Église du Moyen-Orient.
Mgr Claudio Maria Celli, président du conseil pontifical
pour les communications sociales, citant le Pape, a rappelé que : « le défi de
l’Église est d’inculturer le message du Salut dans le monde d’aujourd’hui. Le web
devrait devenir le nouveau « parvis des gentils » en dialogue respectueux et enrichissant
avec les autres religions, croyances et non croyances ». Sa Béatitude Mgr Bechara
Raï a de son côté rappelé que ce congrès s’inscrit aussi dans la ligne du Synode pour
la nouvelle évangélisation et « celle-ci ne porte pas que sur la forme, le contenu
et les outils de communication mais comment les utiliser et les enseigner ».
Il s’agit aussi par leurs moyens de « célébrer le printemps chrétien ». Les
médias peuvent aider les chrétiens à protéger leur rôle historique, à refuser la violence
et à inviter au dialogue.
Le choix du Liban pour cette rencontre n'est pas
un hasard car le pays du cèdre est le lieu le plus indiqué pour comprendre la priorité
que représente pour les Églises du Moyen Orient, le défi des moyens de communication.
Beyrouth est la capitale culturelle de la région mais aussi parce que, le quartier
Fatka, est le siège de Noursat, la chaine satellitaire qui diffuse ses programmes
24 h sur 24, 7 jours sur 7, non seulement au Moyen Orient et en Afrique du Nord, mais
également pour les communautés de la diaspora arabe chrétienne installés en Europe,
aux États Unis, en Amérique Latine ou en Australie. C'est aussi le lieu où est géré
le site internet www.noursat.tv qui retransmet ses programmes en streaming. Il
y a ensuite la chaîne parallèle Nour El Shabab, qui s'adresse plus particulièrement
aux jeunes. C' est comme une réponse catholique au modèle al Jazeera. Au début, la
chaine Noursat s'appellait Télélumière : fondée à la fin de la guerre civile qui avait
ensanglanté le Liban, à l'iniatitive d'un moine ermite, le frère Nour, et d'un petit
groupe de laïcs, encouragés par le patriarche maronite. L'émetteur était lié à une
autre voix historique: la radio Voix de la Charité.
2003 a vraiment marqué
un tournant avec les nouvelles possibilités offertes par les émetteurs satellitaires
: à la chaîne libanaise de Télélumière s'est unie pour tout le Moyen Orient Noursat
(en arabe « lumière » et curieusement al Nour est également le nom du parti salafiste
en Egypte). Cela peut paraître une nouveauté de moindre importance mais ce n'est pas
le cas : si au Liban pour un Maronite il est normal de regarder sa propre télévision,
dans d'autres pays arabes, où les chrétiens représentent de petites minorités, une
chaîne satellitaire catholique est une grande opportunité pour se sentir moins seuls.
De même qu'il est fondamental pour les millions d'arabes chrétiens qui au cours de
ces dernières années ont quitté le Moyen Orient pour émigrer en Occident de leur permettre
de garder un lien avec leurs propres racines .Certes les difficultés n'ont pas manqué,
par exemple en 2006, les installations de Télélumière/Noursat subirent des bombardements
lors du conflit israélo-libanais bref mais intense. Et c'est justement de ces ruines
qu'est né le pari de recommencer en partant de l'idée de la citadelle des médias à
Fatka, devenue toujours plus un point de référence pour toutes les Églises catholiques
du Moyen Orient.
A l'occasion du Synode pour le Moyen Orient qui a eu lieu
au Vatican en octobre 2010, les évêques ont expressément parlé de Noursat et leurs
réflexions ont été publiées dans les propositions finales : « Les Pères synodaux
- peut-on lire dans la porposition 33, votée par l'Assemblée et consacrée au thème
des médias, recommandent d'aider et de soutenir par tous les moyens les structures
déjà existantes dans ce domaine, telles Télélumière-Noursat, la Voix de la Charité
et d'autres encore, parce qu'elles réalisent dans l'esprit ecclésial les objectifs
pour lesquels elles ont tété créées. Certains ont même souhaité la création d'une
ville médiatique pour Noursat régional et internationale. Les Pères - poursuit le
document recommandent vivement aux responsables des structures audiovisuelles de
nos Églises, de former une équipe spécialisée sur les domaines théologique et technique,
d'établir les programmes de formation biblique, à usage pastoral, de souligner en
turc et persien les programmes, pour les chrétiens de Turquie et d'Iran ». Ces
projets d'avenir figurent à l'ordre du jour du congrès d'Harissa.
A noter
une nouveauté importante pour Noursat, parvenue au cours des dernières semaines :
la constitution en Jordanie du Catholic Centre for Studies an Media. Parmi
ses objectifs, a précisé son directeur, le Père Rifat Bader sur nos antennes, figure
la « supervision de la section jourdane de Noursat ».