Dimanche des Rameaux : "nous sommes appelés à suivre le Christ"
Arrivé en papamobile sur une place Saint-Pierre pleine de monde et colorée de vert,
le Pape a béni, ce dimanche 1er avril, les rameaux que brandissaient les fidèles dont
des milliers de jeunes avant de présider, sur le parvis de la basilique, la messe
des Rameaux, « le grand portique qui nous introduit dans la Semaine Sainte » a-t-il
affirmé. Dans son homélie, Benoît XVI a parcouru les épisodes évangéliques de la guérison
de l’aveugle Bartimée et de la procession de Jésus vers Jérusalem quand, à quelques
jours de la Pâque juive et de la Passion du Christ, une foule en liesse l’a accueilli
secouant des rameaux d'olivier. Le Pape a rappelé ce dimanche le sentiment d’espérance
de ceux qui acclamaient le Messie « attendu est finalement venu ». A ce moment là,
explique Benoît XVI, « dans la lumière du Christ, l’humanité se reconnaît profondément
unie et comme recouverte par le manteau de la bénédiction divine » et poursuit-il,
il s’agit du « premier grand message » qui nous arrive de la festivité d’aujourd’hui
: « l’invitation à avoir le juste regard sur l’humanité entière (…) Le regard que
le croyant reçoit du Christ est le regard de la bénédiction : un regard sage et aimant,
capable de saisir la beauté du monde et de compatir à sa fragilité ». L’autre
question que se pose le Pape est celle de ce qui se trouve dans le cœur de ceux qui
acclament le Christ et, pour nous, « qui est Jésus de Nazareth ? Quelle idée du Messie
avons-nous, quelle idée de Dieu avons-nous ? C’est une question cruciale que nous
ne pouvons pas éluder, étant donné qu’au cours de cette semaine, nous sommes appelés
justement à suivre notre Roi qui choisit comme trône la croix ; nous sommes appelés
à suivre un Messie qui ne nous garantit pas un bonheur terrestre facile, mais le bonheur
du ciel, la béatitude de Dieu. Nous devons alors nous demander : quelles sont nos
vraies attentes ? Quels sont les plus profonds désirs, avec lesquels nous sommes venus
ici aujourd’hui célébrer le dimanche des Rameaux et commencer la Semaine Sainte ?
», a-t-il dit. Enfin, s’adressant aux jeunes, Benoît XVI a rappelé que le dimanche
des Rameaux est « le jour de la décision, celle d’accueillir le Seigneur et de le
suivre jusqu’au bout ». Lors de la Semaine Sainte, Jésus nous donnera sa vie, son
corps et son sang, son amour et à un si grand don, nous devons répondre d’une manière
adéquate, c’est-à-dire par le don de nous-mêmes, de notre temps, de notre prière,
de notre vie en profonde communion d’amour avec le Christ qui souffre, meurt et ressuscite
pour moi. » Le compte rendu de Marie Duhamel
A l'issue
de la célébration, et peu avant la prière de l'Angélus, le Pape a souhaité saluer
toutes les personnes présentes place Saint-Pierre : les cardinaux, les évêques, les
prêtres, religieux et religieuses et tous les fidèles. Dans son adresse en langue
française, le Pape a invité les pèlerins francophones à ouvrir leurs cœurs au Christ
Enfin, ce
dimanche des Rameaux coïncidant avec la Journée Mondiale de la Jeunesse, Benoît XVI
a salué de manière toute particulière le comité organisateur des dernières Journées
Mondiales de la Jeunesse à Madrid (Espagne), le comité qui organise les prochaines
JMJ à Rio de Janeiro (Brésil), ainsi que es délégués de la Rencontre internationale
sur les Journées Mondiales de la Jeunesse, promue par le Conseil pontifical pour les
Laïcs, représenté place Saint-Pierre ce dimanche par son président, le cardinal Rilko,
et son secrétaire, monseigneur Clemens.
Ci dessous le texte intégral
de l’homélie de Benoît XVI en ce dimanche des Rameaux
« Chers frères et
sœurs !
Le Dimanche des Rameaux est le grand portique qui nous introduit dans
la Semaine Sainte, la semaine où le Seigneur Jésus s’achemine vers le sommet de sa
vie terrestre. Il monte à Jérusalem pour accomplir les Écritures et pour être suspendu
sur le bois de la croix, le trône à partir duquel il régnera pour toujours, attirant
à lui l’humanité de tous les temps et offrant à tous le don de la rédemption. Des
Évangiles, nous savons que Jésus s’était mis en route vers Jérusalem avec les Douze,
et que, peu à peu, s’était jointe à eux une foule grandissante de pèlerins. Saint
Marc nous raconte que dès le départ de Jéricho il y avait une « foule nombreuse »
qui suivait Jésus (cf. 10, 46). Dans cette dernière étape du parcours, on constate
un événement particulier, qui augmente l’attente de ce qui arrivera, de telle sorte
que l’attention se concentre encore plus sur Jésus. Au bord de la route, à la sortie
de Jéricho, était assis en train de mendier un aveugle, du nom de Bartimée. À peine
entend-il dire qu’arrivait Jésus de Nazareth, qu’il se met à crier : « Jésus, fils
de David, aie piété de moi ! » (Mc 10, 47). On cherche à le faire taire, mais en vain
; jusqu’à ce que Jésus le fasse appeler et l’invite à s’approcher de lui. « Que veux-tu
que je fasse pour toi ? », lui demande Jésus. Et il répond : « Rabbouni, que je voie
[de nouveau] » (v.51). Jésus répond : « Va, ta foi t’a sauvé ». Bartimée retrouva
la vue et se mit à suivre Jésus sur la route (cf. v. 52). Et, après ce signe prodigieux,
accompagné par l’invocation « Fils de David », voici qu’un frémissement d’espérance
messianique traverse la foule, faisant naître chez beaucoup de personnes une question
: ce Jésus qui marchait devant eux vers Jérusalem, était-il peut-être le Messie, le
nouveau David ? Et avec son entrée désormais imminente dans la ville sainte, le temps
où Dieu aurait finalement restauré le règne davidique serait-il arrivé ? La préparation
de son entrée, que Jésus fait avec ses disciples, contribue aussi à faire grandir
cette espérance. Comme nous l’avons entendu dans l’Évangile d’aujourd’hui (cf. Mc
11, 1-10), Jésus arrive à Jérusalem de Bethphagé et du mont des Oliviers, c’est-à-dire
par la route par laquelle aurait dû venir le Messie. De là, Il envoie deux disciples,
avec l’ordre de lui amener un petit âne qu’ils auraient trouvé au bord de la route.
Ils trouvèrent effectivement le petit âne, le détachèrent et l’amenèrent à Jésus.
À ce moment, l’esprit des disciples et aussi des autres pèlerins déborde d’enthousiasme
: les uns prennent leurs manteaux et les mettent sur le petit âne ; les autres les
étendent sur le chemin devant Jésus qui avance assis sur l’âne. Ils coupent ensuite
des branches d’arbres et ils commencent à clamer des paroles du Psaume 118, d’antiques
paroles de bénédiction des pèlerins, qui deviennent, dans ce contexte, une proclamation
messianique : « Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Béni le Règne
qui vient, celui de notre père David. Hosanna au plus haut des cieux ! » (vv. 9-10).
Cette joyeuse acclamation transmise par les quatre Évangélistes, est un cri de bénédiction,
un hymne d’allégresse : elle exprime la conviction commune qu’en Jésus, Dieu a visité
son peuple et que le Messie attendu est finalement venu. Et tous sont là, animés par
l’attente croissante de l’œuvre que le Christ accomplira une fois qu’il entrera dans
sa ville. Mais quel est le contenu, la résonance la plus profonde de ce cri de
joie ? La réponse nous est donnée par toute l’Écriture qui nous rappelle que le Messie
accomplit la promesse de bénédiction de Dieu, la promesse des origines, que Dieu avait
faite à Abraham, le père de tous les croyants : « Je ferai de toi une grande nation,
je te bénirai […] En toi seront bénies toutes les familles de la terre » (Gn 12, 2-3).
C’est la promesse qu’Israël avait toujours gardée vivante dans la prière, particulièrement
dans celle des psaumes. C’est pourquoi, Celui qui est acclamé par la foule comme le
béni, est en même temps Celui en qui sera bénie toute l’humanité. Dans la lumière
du Christ, l’humanité se reconnaît ainsi profondément unie et comme recouverte par
le manteau de la bénédiction divine, une bénédiction qui pénètre tout, soutient tout,
rachète tout, sanctifie tout. Nous pouvons découvrir ici un premier grand message
qui nous arrive de la festivité d’aujourd’hui : l’invitation à avoir le juste regard
sur l’humanité entière, sur les gens qui forment le monde, sur les diverses cultures
et civilisations. Le regard que le croyant reçoit du Christ est le regard de la bénédiction
: un regard sage et aimant, capable de saisir la beauté du monde et de compatir à
sa fragilité. Dans ce regard transparaît le regard même de Dieu sur les hommes qu’il
aime et sur la création, œuvre de ses mains. Nous lisons dans le Livre de la Sagesse
: « Seigneur, tu as pitié de tous les hommes, parce que tu peux tout. Tu fermes les
yeux sur leurs péchés, pour qu’ils se convertissent. Tu aimes en effet tout ce qui
existe, tu n’as de répulsion envers aucune de tes œuvres […] Tu épargnes tous les
êtres, parce qu’ils sont à toi, Maître qui aimes la vie » (Sg 11, 23-24.26). Revenons
au texte évangélique de ce jour et demandons-nous : qu’y-a-t-il réellement dans le
cœur de tous ceux qui acclament le Christ comme Roi d’Israël ? Ils avaient certainement
leur idée du Messie, une idée de comment devait agir le Roi promis par les prophètes
et longtemps attendu. Ce n’est pas par hasard que, quelques jours après, la foule
de Jérusalem, au lieu d’acclamer Jésus, criera à Pilate : « Crucifie-le ! ». Et les
disciples eux-mêmes, ainsi que les autres qui l’avaient vu et écouté, resteront muets
et perdus. En effet, la plupart étaient restés déçus par la manière dont Jésus avait
décidé de se présenter comme Messie et Roi d’Israël. C’est justement en cela que se
trouve pour nous aussi le point central de la fête d’aujourd’hui. Pour nous, qui est
Jésus de Nazareth ? Quelle idée du Messie avons-nous, quelle idée de Dieu avons-nous
? C’est une question cruciale que nous ne pouvons pas éluder, étant donné qu’au cours
de cette semaine, nous sommes appelés justement à suivre notre Roi qui choisit comme
trône la croix ; nous sommes appelés à suivre un Messie qui ne nous garantit pas un
bonheur terrestre facile, mais le bonheur du ciel, la béatitude de Dieu. Nous devons
alors nous demander : quelles sont nos vraies attentes ? Quels sont les plus profonds
désirs, avec lesquels nous sommes venus ici aujourd’hui pour célébrer le dimanche
des Rameaux et pour commencer la Semaine Sainte ? Chers jeunes, vous qui êtes
venus ici ! Cette journée est particulièrement la vôtre, partout dans le monde où
est présente l’Église. Pour cela, je vous salue avec grande affection ! Que le Dimanche
des Rameaux soit pour vous le jour de la décision, la décision d’accueillir le Seigneur
et de le suivre jusqu’au bout, la décision de faire de sa Pâque de mort et de résurrection
le sens même de votre vie de chrétiens. C’est la décision qui conduit à la vraie joie,
comme j’ai voulu le rappeler dans le Message aux Jeunes pour cette Journée – « soyez
toujours dans la joie du Seigneur » (Ph 4, 4) - et comme il advint pour sainte Claire
d’Assise qui, il y a huit-cents ans, entraînée par l’exemple de saint François et
de ses premiers compagnons, quitta la maison paternelle exactement le Dimanche des
Rameaux pour se consacrer totalement au Seigneur : elle avait 18 ans et elle eut le
courage de la foi et de l’amour, le courage de décider pour le Christ, trouvant en
Lui la joie et la paix. Chers frères et sœurs, deux sentiments doivent nous habiter
particulièrement en ces jours : la louange, comme l’ont fait ceux qui ont accueilli
Jésus à Jérusalem par leur « hosanna » ; et l’action de grâce car, dans cette Semaine
Sainte, le Seigneur Jésus renouvellera le plus grand don que l’on puisse imaginer
: il nous donnera sa vie, son corps et son sang, son amour. Toutefois, à un si grand
don, nous devons répondre d’une manière adéquate, c’est-à-dire par le don de nous-mêmes,
de notre temps, de notre prière, de notre vie en profonde communion d’amour avec le
Christ qui souffre, meurt et ressuscite pour moi. Les anciens Pères de l’Église ont
vu un symbole de tout cela dans le geste des gens qui suivaient Jésus entrant à Jérusalem,
le geste d’étendre les manteaux devant le Seigneur. Devant le Christ – disaient les
Pères – nous devons étendre notre vie et nos personnes, dans une attitude de gratitude
et d’adoration. En conclusion, écoutons encore la voix d’un de ces anciens Pères,
celle de saint André, Évêque de Crête : « Étendons-nous humblement donc devant le
Christ, nous-mêmes plutôt que les tuniques ou les rameaux inanimés et les branches
vertes qui réjouissent le regard seulement pour un instant et sont destinés à perdre,
avec la sève, leur verdure. Étendons-nous nous-mêmes revêtus de sa grâce, ou mieux,
de lui-même tout entier… et prosternons-nous à ses pieds comme des tuniques étendues…
pour pouvoir offrir au vainqueur de la mort non plus de simples rameaux de palmes,
mais des trophées de victoire. Agitant les rameaux spirituels de l’âme, nous aussi,
avec les enfants, acclamons saintement chaque jour : “Béni soit celui qui vient au
nom du Seigneur, le roi d’Israël” » (PG 97, 994). Amen ! »