Le père Lombardi présente les nombreux enjeux du voyage du Pape au Mexique et à Cuba
Benoît XVI entame dans une semaine un voyage apostolique en Amérique latine qui le
conduira d’abord au Mexique puis à Cuba. Les enjeux de ce 23e déplacement du Pape
à l’étranger ont été présentés à la presse ce vendredi 16 mars au Vatican. Ce voyage
intervient alors que depuis 2009, à tour de rôle, les pays d’Amérique latine célèbrent
le bicentenaire de leur indépendance. Ce sera d’ailleurs le thème de la messe en plein
air du 25 mars au Mexique. Quant à l’étape cubaine, elle coïncide avec le Jubilé de
Notre Dame de la Charité du cuivre, patronne de l’île. Le Pape passera environ 48
heures au Mexique et 48 heures à Cuba, deux étapes jalonnées comme toujours de visites
protocolaires et de rendez-vous pastoraux. En toile de fond de nombreux enjeux : déchiré
par la violence liée au trafic de drogue, le Mexique doit se rendre aux urnes en juillet
prochain. La pauvreté, l’émigration, la criminalité : les dossiers sensibles sont
nombreux. Quant à Cuba, l’actualité récente a été marquée par des réformes et des
gestes d’ouverture économique et sociale très médiatisé, même s’il est difficile d’en
mesurer la portée réelle. Le rôle de l’Eglise n’a cessé de s’affirmer. Signe de l’importance
du contexte politique de ce voyage, le Secrétaire du Saint-Siège pour les Rapports
avec les États, Mgr Dominique Mamberti, fera partie de la suite du Pape. Même si un
tel événement ne figure pas au programme, il n’est pas exclu que Benoît XVI puisse
rencontrer Fidel Castro – a indiqué le directeur du bureau de presse du Saint-Siège.
Interrogé par les journalistes, le Père Federico Lombardi a réaffirmé que le Saint-Siège
était toujours contraire à l’embargo contre Cuba, car les sanctions font souffrir
la population sans atteindre leur objectif. En revanche le Père Lombardi a exclu une
rencontre du Pape avec les victimes des abus commis par le fondateur des Légionnaires
du Christ, le Père Marcial Maciel. Les évêques locaux n’ont présenté aucune demande
en ce sens. Le compte rendu de Thomas Chabolle
Les préparatifs
pour la visite de Benoît XVI vont donc bon train. Le nonce apostolique à la Havane,
Mgr Bruno Musaro l’a affirmé sur les antennes de Radio Vatican. « Depuis l’annonce
faite le 10 novembre, explique-t-il, (le délai pour la préparation étant bref), les
deux Commissions, celle de l’Église et celle du gouvernement, ont travaillé avec
rapidité et je dois dire qu’elles ont bien travaillé. Maintenant on est arrivé à
la phase finale ». La population, a-t-il dit, attend beaucoup de cette visite
de Benoît XVI, sur les traces de la visite apostolique effectuée par Jean-Paul II
en 1998 afin que la société s’ouvre toujours plus. Ici, a affirmé Mgr Masaro, personne
n’a oublié le voyage du Pape Wojtyla, et le gouvernement avait également apprécié
ses paroles sous forme de slogan : « Que Cuba s’ouvre au monde et que le monde
s’ouvre à Cuba ». Selon le représentant du Saint-Siège, c’est là le désir secret
qui jaillit du plus profond du cœur de toute la population qui attend surtout de
la visite de Benoît XVI un processus de réconciliation entre tous les Cubains. C’est
le point sur lequel les évêques ont insisté, au cours du pèlerinage de la Vierge et
sur lequel ils insistent dans cette phase préparatoire de la visite.
Mgr Musaro
rappelle qu’après la révolution de 1959, Cuba fut défini pendant plusieurs années
comme un “pays athée”. « Mais cet aspect de l’athéisme fut retiré de la Constitution
peu avant la visite de Jean-Paul II. Cela n’avait plus aucune signification. Comment
peut-on parler d’un pays athée, ici en Amérique Latine ? Avec le nouveau président
de la République, il y a eu à Cuba, ces dernières années, une ouverture surtout dans
le domaine économique et cela a suscité et continue de susciter beaucoup d’espoir
chez les Cubains, ils souhaitent la poursuite de ces ouvertures et parvenir ainsi
à un niveau de vie meilleur, un niveau de vie qui leur redonne confiance et les amène
à s’engager et à travailler pour le bien commun de la société. Les Cubains attendant
donc de cette visite de Benoît XVI, une plus grande ouverture, économique et sociale
et la réconciliation entre tous ».
Au cours de son entretien, le représentant
pontifical à Cuba a également abordé d’autres thèmes, comme la menace des sectes,
la situation spirituelle des Cubains et leur rapport avec l’athéisme, ainsi que l’héritage
laissé par le voyage de Jean-Paul II à l’Église cubaine.
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«
Le Pape vient nous affermir dans la foi, il vient renforcer les valeurs chrétiennes
» : le cardinal Jaime Ortega, archevêque de La Havane l’a affirmé dans un vidéo
message, diffusé ce mardi 13 mars par la télévision officielle « Cubavisio’n » et
rapporté par Radio Vatican. Il s’est adressé aux Cubains avec passion, évoquant ses
souvenirs depuis la visite à Cuba de Jean-Paul II en 1998, à sa dernière rencontre
avec Benoît XVI au Vatican, lors du Consistoire de février dernier. A cette occasion,
raconte le cardinal Ortega, le Pape l’a salué avec beaucoup d’affection, lui disant
: « Nous nous reverrons à Cuba ».
Le Pape visitera l’île en « pèlerin
de la charité » et dans l’optique de son engagement à « renouveler la foi dans
ces pays déjà christianisés, mais qui ont besoin d’une nouvelle évangélisation »
a fait savoir le prélat cubain. Une foi qui à Cuba est restée « un peu endormie
mais qui est présente dans le cœur des personnes ». Le cardinal Ortega a ensuite
tracé un portrait de Benoît XVI, il l’a décrit comme « le Pape de la vérité »,
l’intellectuel qui a consacré sa vie à la vocation théologique. « En tant que chercheur
de la vérité », a poursuivi l’archevêque de La Havane, le Pape désire que les
fidèles cherchent eux aussi la vérité, aujourd’hui menacée par le « relativisme,
le laxisme éthique ou par l’absolutisme ». Rappelant enfin le caractère pastoral
de la visite de Benoît XVI selon son mandat de Successeur de Pierre, le cardinal Ortega
a invité tous les fidèles à participer nombreux aux rencontres avec le Saint Père.
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Un
voyage pour l’espérance : l'éditorial du Père Federico Lombardi, sj
Les
motifs du prochain voyage de Benoît XVI au Mexique et à Cuba sont nombreux et bien
connus : le bicentenaire de l’indépendance des peuples latino-américains et le grand
désir des Mexicains d’accueillir le Pape, le 20e anniversaire des relations diplomatiques
entre le Mexique et le Saint-Siège, le 4e centenaire de la découverte (de la statue)
de Notre-Dame de la Charité du cuivre, patronne de Cuba, et l’année jubilaire organisée
à cette occasion et ainsi de suite.
Ce sont les raisons de cette visite, mais
au centre de tout voyage du Pape, il y a avant tout son service de Pasteur de l’Église
universelle qui – selon le mandat du Christ – va confirmer ses frères dans la foi.
Cependant, on peut relever une intonation spécifique de ce voyage au cœur du continent
américain : ce sera certainement un voyage pour l’espérance. Pour l’espérance
des Mexicains, un peuple aux grandes possibilités et ressources, mais en proie
aujourd’hui à de graves problèmes qui pèsent sur son présent et sur son avenir, à
commencer par une violence dramatique. Pour l’espérance des Cubains, qui
se sentent au seuil d’une nouvelle époque possible, et où les paroles prophétiques
de Jean-Paul II sur l’ouverture réciproque de Cuba et du monde, s’avèrent dans un
climat de développement, de liberté et de réconciliation. Pour l’espérance de
toute l’Amérique latine, où une Église, engagée dans la « mission continentale
» lancée lors de l’Assemblée d’Aparacida, veut continuer à apporter sa contribution
inspiratrice au cheminement du continent et pour que les valeurs humaines et chrétiennes
puissent garantir un développement intégral des personnes, malgré les difficultés
et les risques de notre temps.
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L’Église écoute et accueille,
mais personne n’a le droit de transformer les lieux de culte en tribunes politiques.
Après deux jours d’occupation, la police a évacué ce jeudi 15 mars la basilique Notre
Dame de la charité à La Havane. Treize dissidents cubains s’y étaient retranchés.
L’archidiocèse souligne – dans une note – que c’est la fin d’une crise qui n’aurait
jamais du se produire et souhaite que de tels événements, vraisemblablement destinés
à semer le trouble à l’approche de la visite du Pape, ne se répètent plus. Le groupe
de dissidents était venu remettre au recteur du Sanctuaire un message pour Benoît
XVI, avant de se barricader à l’intérieur de la basilique. Ce message contenait une
série de revendications sociales. Personne – affirme l’archidiocèse de La Havane –
n’a le droit de détruire le climat festif qui précède la venue du Pape, de gâcher
la joie des fidèles et de nombreux cubains qui l’attendent avec espoir.