Message du Pape pour la journée mondiale de prière pour les vocations
Le message du Pape, à l’occasion de la 49e Journée Mondiale de Prière pour les Vocations,
a été rendu public ce lundi 13 février. Cette journée qui sera célébrée le 29 avril
2012, a pour thème « Les vocations, don de l’Amour de Dieu ».
Traduction
officielle en français
Chers frères et sœurs,
La 49e Journée
Mondiale de Prière pour les Vocations, qui sera célébrée le 29 avril 2012, quatrième
dimanche de Pâques, nous invite à réfléchir sur le thème : Les vocations, don de l’Amour
de Dieu. La source de tout don parfait est Dieu Amour – Deus caritas est –: «celui
qui demeure dans l’amour, demeure en Dieu et Dieu en lui» (1 Jn 4, 16). L’Écriture
Sainte raconte l’histoire de ce lien originel entre Dieu et l’humanité, qui précède
la création elle-même. Saint Paul, écrivant aux chrétiens de la ville d’Éphèse, fait
monter un hymne de reconnaissance et de louange au Père, Lui qui, avec une infinie
bienveillance, met en œuvre, au cours des siècles, son dessein universel de salut,
qui est un dessein d’amour. Dans son Fils Jésus – affirme l’Apôtre – Il «nous a choisis
avant la création du monde, pour que nous soyons, dans l’amour, saints et irréprochables,
sous son regard» (Ep 1, 4). Nous sommes aimés par Dieu “avant” même de venir à l’existence
! Mû exclusivement par son amour inconditionnel, Il nous a “créés de rien” (cf. 2M
7, 28) pour nous conduire à la pleine communion avec Lui. Saisi d’émerveillement
devant l’œuvre de la Providence divine, le psalmiste s’exclame: «A voir ton ciel,
ouvrage de tes doigts, la lune et les étoiles que tu fixas, qu’est-ce que l’homme
pour que tu penses à lui, le fils d’un homme, pour que tu en prennes souci?» (Ps 8,
4-5). La vérité profonde de notre existence est ainsi contenue dans cet étonnant mystère:
chaque créature, en particulier chaque personne humaine, est fruit d’une pensée et
d’un acte de l’amour de Dieu, amour immense, fidèle, éternel (cf. Jr 31, 3). Découvrir
cette réalité change véritablement notre vie en profondeur. Dans une page célèbre
des Confessions, saint Augustin exprime avec une grande intensité sa découverte de
Dieu, suprême beauté et suprême amour, un Dieu qui lui avait été toujours proche,
auquel il ouvrait enfin son esprit et son cœur pour être transformé: «Bien tard je
t'ai aimée, ô beauté si ancienne et si nouvelle, bien tard je t'ai aimée! Et voici
que tu étais au-dedans, et moi au-dehors. C’est là que je te cherchais. Tout disgracieux,
je me ruais sur tes gracieuses créatures. Tu étais avec moi et je n’étais pas avec
toi. Loin de toi, elles me retenaient, elles qui ne seraient, si elles n’étaient en
toi. Tu m’appelas, crias, rompis ma surdité. Tu brillas, et ta splendeur a ôté ma
cécité; tu répandis ton parfum, je respirai, je soupirai, je t’ai goûté, et j’eus
faim et soif; tu m’as touché, et je brûlai du désir de ta paix.» (X, 27.38). Par ces
images, le saint Évêque d’Hippone cherche à décrire le mystère ineffable de la rencontre
avec Dieu, avec son amour qui transforme toute l’existence. Il s’agit d’un amour
sans réserve qui nous précède, nous soutient et nous appelle tout au long du chemin
de la vie et qui s’enracine dans l’absolue gratuité de Dieu. Se référant en particulier
au ministère sacerdotal, mon prédécesseur, le Bienheureux Jean-Paul II, affirmait
que «tout acte ministériel, en même temps qu'il conduit à aimer et à servir l'Église,
pousse à mûrir toujours davantage dans l'amour et dans le service du Christ Tête,
Pasteur et Époux de l'Église; cet amour se présente toujours comme une réponse à l'amour
prévenant, libre et gratuit de Dieu dans le Christ» (Exhort. apost. Pastores dabo
vobis, 25). Chaque vocation particulière naît, en effet, de l’initiative de Dieu,
est don de l’amour de Dieu ! C’est Lui qui fait le “premier pas”, non à cause d’une
particulière bonté rencontrée chez nous, mais grâce à la présence de son amour «répandu
dans nos cœurs par l’Esprit Saint» (Rm 5, 5). En tout temps, à la source de l’appel
divin, il y a l’initiative de l’amour infini de Dieu, qui se manifeste pleinement
en Jésus Christ. Comme je l’ai écrit dans ma première Encyclique Deus caritas est:
«En fait, Dieu se rend visible de multiples manières. Dans l’histoire d’amour que
la Bible nous raconte, Il vient à notre rencontre, Il cherche à nous conquérir – jusqu’à
la dernière Cène, jusqu’au Cœur transpercé sur la croix, jusqu’aux apparitions du
Ressuscité et aux grandes œuvres par lesquelles, à travers l’action des Apôtres, Il
a guidé le chemin de l’Église naissante. Et de même, par la suite, dans l’histoire
de l’Église, le Seigneur n’a jamais été absent : il vient toujours de nouveau à notre
rencontre – par des hommes à travers lesquels il transparaît, ainsi que par sa Parole,
dans les Sacrements, spécialement dans l’Eucharistie» (n. 17). L’amour de Dieu
demeure pour toujours, il est fidèle à lui-même, à la «parole édictée pour mille générations»
(Ps 105 [104], 8). Il faut donc ré-annoncer, spécialement aux nouvelles générations,
la beauté attrayante de cet amour divin, qui précède et accompagne: c’est lui le ressort
secret, la motivation qui ne fait jamais défaut, même dans les situations les plus
difficiles. Chers frères et sœurs, c’est à cet amour que nous devons ouvrir notre
vie, et c’est à la perfection de l’amour du Père (cf. Mt 5, 48) que Jésus Christ nous
appelle chaque jour! Le haut degré de la vie chrétienne consiste en effet à aimer
“comme” Dieu; il s’agit d’un amour qui se manifeste dans le don total de soi, fidèle
et fécond. A la prieure du monastère de Ségovie, peinée par la situation dramatique
de la suspension dont il était l’objet au cours de ces années, saint Jean de la Croix
répond en l’invitant à agir selon le dessein de Dieu: «Ne pensez à rien d’autre, sinon
que tout est disposé par Dieu; et là où il n’y a pas d’amour, mettez l’amour et vous
récolterez l’amour» (Lettre, 26). C’est sur ce terrain d’oblation ouverte à l’amour
de Dieu et fruit de cet amour, que naissent et grandissent toutes les vocations. Et
c’est en puisant à cette source dans la prière, avec une fréquentation assidue de
la Parole et des Sacrements, particulièrement l’Eucharistie, qu’il est possible de
vivre l’amour envers le prochain dans lequel on apprend à découvrir le visage du Christ
Seigneur (cf. Mt 25, 31-46). Pour exprimer le lien inséparable qui relie ces “deux
amours”– l’amour envers Dieu et celui envers le prochain – jaillissant de la même
source divine et orientés vers elle, le Pape saint Grégoire le Grand recourt à l’exemple
de la jeune pousse: «Dans le terrain de notre cœur, [Dieu] a d’abord planté la racine
de l’amour envers Lui, et puis, comme une frondaison, s’est développé l’amour fraternel»
(Moralium Libri, sive expositio in Librum B. Job, Lib. VII, cap. 24, 28; PL 75, 780D). Ces
deux expressions de l’unique amour divin, doivent être vécues avec une particulière
intensité et pureté de cœur par ceux qui ont décidé d’entreprendre un chemin de discernement
vocationnel vers le ministère sacerdotal et la vie consacrée; elles en constituent
l’élément caractéristique. En effet, l’amour pour Dieu, dont les prêtres et les religieux
deviennent des images visibles – même si elles sont toujours imparfaites – est la
motivation de la réponse à l’appel à une consécration spéciale au Seigneur par l’Ordination
presbytérale ou la profession des conseils évangéliques. La vigueur de la réponse
de saint Pierre au Divin Maître: «Je t’aime, tu le sais» (Jn 21,15), est le secret
d’une existence donnée et vécue en plénitude, et par là comblée d’une joie profonde. L’autre
expression concrète de l’amour, celui envers le prochain, surtout envers les plus
nécessiteux et les plus souffrants, est le meilleur ressort qui fait du prêtre et
de la personne consacrée, un artisan de communion entre les gens et un semeur d’espérance.
Le rapport des consacrés, spécialement du prêtre, à la communauté chrétienne est vital
et devient aussi une part fondamentale de leur horizon affectif. A ce sujet, le saint
Curé d’Ars aimait répéter: «Le prêtre n’est pas prêtre pour lui. […] il l’est pour
vous.» (Le Curé d’Ars. Sa pensée – Son cœur, Foi Vivante, 1966, p. 100). Chers
frères dans l’épiscopat, chers prêtres, diacres, consacrés et consacrées, catéchistes,
agents pastoraux, et vous tous qui êtes engagés dans le domaine de l’éducation des
nouvelles générations, je vous exhorte avec une vive sollicitude à vous mettre à l’écoute
attentive de tous ceux qui à l’intérieur des communautés paroissiales, des associations
et des mouvements perçoivent les signes d’un appel au sacerdoce ou à une consécration
particulière. Il est important que dans l’Église se créent les conditions favorables
afin que puissent éclore beaucoup de ‘oui’, comme autant de réponses généreuses à
l’appel d’amour de Dieu. Ce sera la tâche de la pastorale des vocations d’offrir
des lignes directrices pour un cheminement fructueux. Un élément central sera l’amour
pour la Parole de Dieu, en cultivant une familiarité croissante avec l’Écriture Sainte,
et une prière personnelle et communautaire attentive et constante, de manière à être
capable d’entendre l’appel divin au milieu de tant de voix qui remplissent la vie
quotidienne. Mais par-dessus tout que l’Eucharistie soit le “centre vital” de tout
cheminement vocationnel: c’est là que l’amour de Dieu nous rejoint dans le sacrifice
du Christ, expression parfaite de l’amour, c’est là que nous apprenons toujours plus
à vivre selon le “haut degré” de l’amour de Dieu. Parole, prière et Eucharistie constituent
le trésor précieux qui fait comprendre la beauté d’une vie totalement consacrée au
Royaume de Dieu. Je souhaite que les Églises locales, dans leurs différentes composantes,
deviennent les “lieux” d’un discernement attentif et d’une vérification approfondie
des vocations, offrant aux jeunes gens et aux jeunes filles un sage et solide accompagnement
spirituel. De cette manière la communauté chrétienne devient elle-même manifestation
de l’Amour de Dieu qui prend soin de tout appel. Une telle dynamique, qui répond aux
exigences du commandement nouveau de Jésus, peut trouver une réalisation éloquente
et singulière dans les familles chrétiennes, dont l’amour est l’expression de l’amour
du Christ qui s’est donné lui-même pour son Église (cf. Ep 5, 32). Dans les familles,
«communautés de vie et d’amour» (Gaudium et spes, 48), les nouvelles générations peuvent
faire une admirable expérience de cet amour oblatif. En effet, elles sont non seulement
le lieu privilégié de la formation humaine et chrétienne, mais elles peuvent représenter
«le premier et le meilleur séminaire de la vocation à une vie consacrée au Royaume
de Dieu» (Exhort. Apost. Familiaris consortio, 53), en faisant redécouvrir, justement
à l’intérieur de la famille, la beauté et l’importance du sacerdoce et de la vie consacrée.
Que les pasteurs et tous les fidèles laïcs sachent toujours collaborer afin que se
multiplient dans l’Église ces «foyers et écoles de communion» sur le modèle de la
Sainte Famille de Nazareth, reflet harmonieux, sur la terre, de la vie de la Sainte
Trinité. Avec ces souhaits, j’accorde de tout cœur la Bénédiction Apostolique à
vous, Vénérables Frères dans l’épiscopat, aux prêtres, aux diacres, aux religieux,
aux religieuses et à tous les fidèles laïcs, en particulier aux jeunes gens et jeunes
filles qui se mettent avec un cœur docile à l’écoute de la voix de Dieu, prêts à l’accueillir
avec une adhésion généreuse et fidèle.