2012-02-08 11:30:55

Le témoignage de Marie Collins, moment fort du symposium sur les abus sexuels




Le témoignage de Marie Collins ce mardi matin devant les participants du colloque a été un moment fort de cette journée. Elle a montré toutes les erreurs que l’Église a commises par le passé face aux abus sexuels. Mais il serait réducteur de répéter ces erreurs maintenant connues et de ne pas montrer tout ce qui a déjà été fait en la matière. Monseigneur Stephen Rossetti, un Américain, a beaucoup travaillé sur les cas d’abus sexuels sur mineurs. Il a expliqué à tous les délégués des conférences épiscopales présents quelles sont les six erreurs le plus souvent commises par les autorités ecclésiales. Il a aussi présenté douze recommandations pour remédier aux problèmes rencontrés. Le point avec Xavier Sartre RealAudioMP3

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Le cardinal William Levada, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi (CDF), a ouvert lundi soir les travaux du colloque « Vers la guérison et le renouveau », organisé par l’université pontificale grégorienne de Rome. « La petite minorité [d’abuseurs] a causé un grand mal aux victimes et à la mission de l’Église qui est d’apporter l’amour du Christ au monde d’aujourd’hui », a-t-il expliqué. Il a ajouté que les mesures actuellement mises en œuvre depuis une dizaine d’années aideront à « répondre de manières diverses et fructueuses afin de guérir les blessures du passé et à renouveler l’engagement en faveur d’un avenir d’espoir ».

Son intervention, intitulée « une réponse à multiples facettes au défi des abus sexuels sur mineurs », a rappelé tout d’abord combien Benoît XVI, déjà du temps où il était cardinal-préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi, a agi pour que les lignes changent à l’intérieur de l’Église et pour que « la délicate et urgente question » des abus trouve des réponses.

Le cardinal-préfet a exposé devant les délégués de cent dix conférences épiscopales et d’une trentaine d’ordres religieux le travail déjà accompli par l’Église lors de ces dix dernières années. Cette question fut déjà abordée par Jean-Paul II lorsqu’il promulgua le 30 avril 2001 le motu proprio Sacramentum sanctitatis tutela. Ce texte faisait explicitement référence au crime d’abus sexuel, l’incluant dans la liste des graviora delicta, autrement dit, crime canonique. Il était fait obligation de rapporter tout acte de cette nature auprès de la CDF. Le texte fut ensuite amendé et complété le 21 mai 2010 par Benoît XVI.

Après la révélation par la presse des abus commis aux États-Unis au début des années 2000, les évêques américains ont adopté de leur côté la Charte pour la protection des enfants et des jeunes adultes. Le cardinal Levada n’a pas manqué de rendre hommage à Benoît XVI, qui, à l’époque où il dirigeait la CDF, a apporté tout son soutien aux normes prises par les évêques américains après 2002, ce qui ne l’a pas empêché de « subir des attaques de la part des médias durant ces dernières années un peu partout dans le monde », et ce, « quand il devrait recevoir la reconnaissance de tous, dans et hors de l’Église ». Le cardinal-préfet a aussi cité la lettre aux catholiques irlandais que le Pape a envoyée en mars 2010, et a rappelé les différentes interventions de Benoît XVI lors de ses voyages aux États-Unis en 2008, en Grande-Bretagne, à Malte, en Allemagne et en Australie.

A l’occasion de l’année sacerdotale, en décembre 2010, lors de la présentation des vœux de Noël à la Curie romaine, Benoît XVI avait abordé de front et sans concession le drame des abus. Après cette prise de position sans équivoque sur la volonté du Pape d’affronter le problème, la CDF a publié une circulaire le 3 mai 2011, « pour aider les conférences épiscopales à établir des directives pour le traitement des cas d’abus sexuel commis par des clercs à l’égard de mineurs ».


Le préfet de la CDF a ensuite détaillé la première partie de la lettre circulaire de 2011, celle concernant les considérations générales. Il a souligné que les conférences épiscopales et les évêques étaient au centre de la réponse que l’Église doit donner aux problèmes posés par les abus. « Le rôle de la conférence épiscopale est double : celui d’offrir une assistance aux évêques diocésains, et celui de coordonner une réponse effective et uniforme face à la crise des abus sexuels sur mineurs. » Mais cette disposition ne décharge en rien les évêques diocésains et les supérieurs religieux de leurs responsabilités. Ils doivent aussi collaborer avec la CDF rappelle le préfet.

Un des points les plus importants, et qui a été illustré par le témoignage d’une victime mardi, est l’attention portée aux victimes d’abus. Le premier besoin pour les victimes, « est d’être écoutées, de savoir que l’Église les écoute, que l’Eglise comprend la gravité de leur souffrance, qu’elle veut les accompagner le long d’un chemin de guérison souvent long, et qu’elle a entrepris ou qu’elle est désireuse de prendre des mesures effectives pour s’assurer que d’autres enfants seront protégés de tels abus. » D’où l’importance des diverses interventions publiques du Pape ces dernières années. L’exemple donné par le Pape devrait ainsi, a expliqué le cardinal Levada,
« animer le cœur de tous les évêques et prêtres. »

Au-delà de l’écoute nécessaire, il y a la protection proprement dite des mineurs. Des programmes nationaux existent déjà en la matière et proposent les moyens de reconnaître les signes d’abus afin de créer un environnement sûr pour les enfants. Un autre défi se pose, selon le cardinal, celui d’une « éducation des parents et des enfants eux-mêmes au sujet des abus dans la société dans son ensemble ».

C’est là qu’entre en jeu la formation des prêtres et des religieux. « Les évêques et les supérieurs des ordres religieux [ont besoin ] d’être des plus attentifs lorsqu’ils acceptent des candidats à la prêtrise et à la vie religieuse. » « Les candidats devraient être formés à apprécier au mieux les notions de chasteté et de célibat. » Le cardinal Levada pointe aussi du doigt le fait que les conférences épiscopales doivent communiquer entre elles, ainsi que les ordres religieux, sur les candidats qui changent de séminaire, de diocèse ou même de pays car ces transferts ont maintenant une dimension internationale.

L’évêque a toujours « le devoir de traiter tous ses prêtres en tant que père et frère ». Il doit ainsi mettre à leur disposition un programme de formation continue surtout pour les plus jeunes prêtres. Il est de son devoir en outre de soutenir et d’aimer chacun de ses prêtres, surtout quand l’un d’entre eux est accusé injustement d’un crime.

Dernier point abordé par le cardinal Levada concernant la lettre circulaire de 2011, la coopération avec les autorités civiles. Cette coopération « reconnaît la vérité fondamentale que l’abus sexuel sur mineurs est non seulement un crime aux yeux du droit canon, mais qu’il est aussi un crime qui viole les lois dans la plupart des juridictions civiles. » « L’Église a donc l’obligation de coopérer et de rapporter les crimes aux autorités compétentes ».
(Xavier Sartre)

Compte-rendu de Xavier Sartre RealAudioMP3

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Articles précédents:

Ce mardi matin Marie Collins, une Irlandaise victime d'abus, a témoigné devant les participants au colloque. Les précisions de Xavier Sartre RealAudioMP3


Marie Collins s'est aussi confiée à nos confrères de Radio Vatican, Philippa Hitchen e Stefano Leszczynski dans cet entretien.

Le fait que l’Eglise ait décidé de tenir un symposium sur ce thème est très important.
En tant que victime, j’ai beaucoup critiqué l’Église, ayant souffert – si l’on peut dire –de la main même de mon diocèse, lorsque j’ai voulu apporter devant la justice la personne qui avait abusé de moi. Mais nous ne pouvons vivre dans le passé : il nous faut aller de l’avant.
La chose la plus importante, l’unique chose importante, c’est la sécurité des enfants.
Et j’attends d’un tel symposium que les leaders de l’Église puissent avoir une meilleure connaissance, une plus grande compréhension de ce phénomène, et faire tout le possible pour que cela n’arrive plus, en élaborant des stratégies pour prévenir. On ne répètera jamais assez combien c’est important ! Ma plus grande preoccupation: que les lignes-guides mises en pratique ne soient pas suffisantes.
Il est donc important que chaque membre de la hiérarchie ecclésiastique qui n’applique pas ces lignes-guides en subisse les conséquences. Les paroles ne servent à rien si elles ne sont pas suivies d’ actions. Il est évident que la question des abus n’est pas limitée à l’Église : qu’elle est partout dans la société. Mais si l’Église pouvait indiquer à la hiérarchie comment prévenir ce mal terrible, elle apporterait une grande contribution à la guérison de ces personnes profondément blessées par la manière dont l’Église a géré ce phénomène, et les aiderait à retrouver le respect.


De quoi ont besoin les enfants qui ont subi des abus, quand ils se rendent compte de ce qui leur est arrivé ?

Ce n’est pas tellement pour ce que la personne qui commet l’abus te fait physiquement , c’est plutôt pour ce que, toi victime, tu ressens psychologiquement.
J’avais une mauvaise opinion de moi-même, je me suis toujours considerée comme une personne méchante, une personne indigne. Je voulais que personne ne le sache. Souvent, les gens se demandent : pourquoi les enfants ne racontent-ils pas ce qui leur est arrivé ?
C’est parce qu’ils sont persuadés qu’ils ont commis quelque chose de très mal… ils ne peuvent le raconter. En eux grandit toujours plus la conscience qu’il y a quelque chose qui ne va pas. En ce qui me concerne, cela m’a provoqué une très grave depression : je suis devenue phobique, avec des attaques de panique, je ne parvenais plus à travailler, je devais continuellement être hospitalisée en psychiatrie.
Il m’a fallu 30 ans pour pouvoir tout raconter à un médecin, faire face à cette histoire m’a beaucoup aidée. Cela fait maintenant 15 ans que je ne suis plus retomber en état de dépression, d’anxiété.
Selon moi, plus tôt on parvient à comprendre si un enfant a été victime d’abus, plus tôt on pourra lui venir en aide et plus tôt on parviendra à sauver le reste de sa vie.

Etes-vous parvenue à rester catholique et à vous réconcilier avec cette Église qui vous a trahie ?

Je me suis beaucoup engagée à travailler avec l’Église, à la maison, en collaborant avec le comité qui a rédigé les lignes-guides pour la tutèle des enfants, en travaillant avec le diocèse de Dublin pour organiser le bureau pour la tutèle des enfants. Cependant aujourd’hui encore, il m’est très, très difficile de pratiquer ma religion.
Je veux être catholique, je veux rester dans l’Église, je m’y attache de toutes mes forces car je veux en finir avec cette histoire. Mon espérance, c’est qu’à la fin, mon Église réussira à remédier à cette situation. Il y a un grand manque de respect et de confiance, chez moi, dans mon pays…Tout cela a été trop dévastateur… Mais ce qui a été le plus dur, ce n’est pas de découvrir qu’à l’intérieur de l’Église des personnes commettent des abus : cela arrive partout dans la société, aussi bien dans les milieux sportifs que dans les milieux éducatifs… Ce qui a été le plus dur c’est de découvrir que ces personnes étaient protégées par des hommes qui auraient dû protéger les enfants. Oui, c’est cela qui a causé tant de mal à la foi et à la confiance des gens et c’est ce qui m’a fait le plus de mal, mais je n’a pas perdu la foi en Dieu et en Jésus Christ. Certes, j’ai beaucoup de difficulté à pratiquer ma religion, mais je reste là…

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Signe de la préoccupation vive de Benoît XVI au sujet du dossier des abus sexuels sur mineurs commis par des membres du clergé, le Pape a envoyé un message aux participants d’un colloque organisé à Rome par l’université pontificale grégorienne qui a débuté ce lundi soir et qui doit se conclure jeudi soir.
Dans cette adresse au recteur de l’université, le père Dumortier, « le Pape assure les participants de ses prières pour cette importante initiative ». « Il demande au Seigneur qu’à travers [leurs] décisions, tous les évêques et supérieurs religieux du monde entier puissent être aidés à répondre à la tragédie des abus sexuels sur mineurs comme répondrait le Christ ».
Le Pape souligne combien la « guérison des victimes doit être une préoccupation fondamentale de la communauté chrétienne et doit aller de pair avec un profond renouvellement de l’Eglise à tous les niveaux ».
Benoît XVI encourage ainsi « chaque effort visant à répondre avec charité évangélique au défi d’offrir aux enfants et aux adultes vulnérables un environnement ecclésial propice à leur croissance humaine et spirituelle. »

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Des délégués de 110 conférences épiscopales et supérieurs d’une trentaine d’ordres religieux participent, cette semaine, à l’Université pontificale Grégorienne de Rome à un symposium international de quatre jours, le premier du genre, dont l’objectif est de trouver des remèdes contre les abus sexuels dans l'Eglise et favoriser un échange d’expérience. "Vers la guérison et le renouveau" : c’est le thème choisi pour cette rencontre à laquelle participent quelque 200 délégués. Une quarantaine de rapporteurs prendront la parole sur les différents aspects du fléau, des experts mais aussi des pasteurs qui ont agi courageusement. Une victime, Marie Collins, irlandaise, témoignera mardi devant l’assemblée. Une veillée pénitentielle est prévue mardi en l’église Saint-Ignace, au centre de Rome. Des représentants de prêtres ou religieux pédophiles demanderont pardon à Dieu et aux victimes. Un texte clair et explicite sera lu à cette occasion. Les scandales de pédophilie dans l’Eglise ont suscité ces dernières années une vague d’indignation. L’Eglise veut montrer sa volonté d’agir avec détermination. Un centre d’enseignement, financé par des institutions catholiques allemandes, et installé à Munich, en Allemagne, sera lancé à la fin de ce symposium inédit.
Le point avec Xavier Sartre RealAudioMP3
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C’est ce lundi que s’ouvre à Rome le colloque « vers la guérison et le renouveau », qui réunit 110 représentants des conférences épiscopales nationales et une trentaine de cadres d’ordres religieux. La rencontre, organisée par l’université pontificale grégorienne, durera quatre jours. Soutenue par le Saint-Siège, elle porte sur la question douloureuse des abus sexuels commis sur des mineurs par des membres du clergé. Après les prises de position nettes de Benoît XVI ces dernières années sur la question, l’université jésuite de Rome entend accélérer la prise de conscience et la recherche de solutions concrètes. Ces quatre jours de débat ne seront donc pas une simple rencontre pour disserter sur le sujet mais bien une initiative pour aller de l'avant. Retour sur les enjeux de ce colloque avec le recteur de l’université grégorienne, le père François-Xavier Dumortier SJ RealAudioMP3 Un dossier de Xavier Sartre

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Pendant quatre jours, l’Eglise se penchera sur le dossier sensible et urgent des abus sexuels sur des mineurs et des personnes vulnérables commis par des membres du clergé. Du 6 au 9 février, sous le titre « Vers la guérison et le renouveau », des délégués de 110 conférences épiscopales et une trentaine de supérieurs d’ordres religieux seront invités à partager leur expérience, à s’engager à agir et à collaborer avec la justice, à être attentifs à la douleur des victimes afin de soigner cette blessure ouverte de l’Eglise.
Organisé par l’université pontificale grégorienne de Rome, ce colloque a pour ambition de promouvoir de vraies réponses au problème de la pédophilie dans l’Eglise et de faire en sorte que l’Eglise soit à l’avenir aux avant-postes de la protection de l’enfance.
Les travaux seront ouverts lundi soir par le cardinal Levada, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi. L’un des moments forts de ce symposium sera le témoignage d’une victime, Marie Collins, Irlandaise abusée sexuellement par un prêtre durant son enfance en Irlande. Des intervenants venant des cinq continents prendront la parole de manière à ce que le problème soit abordé sous tous les angles et qu’il soit avant tout compris par tous, quelque soit sa culture et son environnement social. Un Américain, un Sud-Africain, un Mexicain, un Brésilien, un Maltais, un Philippin, et un Allemand se succèderont à la tribune tout au long de ces quatre journées.
Autre moment fort, une veillée pénitentielle aura lieu mardi soir en l’église Saint-Ignace, dans le centre de Rome. Elle sera présidée par le cardinal Ouellet, préfet de la Congrégation pour les évêques.
La rencontre se veut aussi une nouvelle étape dans le processus ouvert par Benoît XVI qui n’a pas hésité à aborder la question de front et à rencontrer des victimes d’abus sexuels lors de ces voyages apostoliques, notamment aux Etats-Unis.
Ce colloque pour les évêques et les supérieurs des ordres religieux se veut amplement ouvert à la société. Si les travaux se tiendront à huis clos, la presse a été conviée à suivre les échanges. Il n’est pas question pour les organisateurs et les participants de se cacher. Le mot d’ordre est transparence.
Le compte-rendu de la conférence de presse de Xavier Sartre RealAudioMP3

L’heure n’est plus au repentir, encore moins à l’omerta : ce colloque vers la guérison et le renouveau entend clairement promouvoir une vraie réponse au dossier douloureux de la pédophilie. Si la rencontre est organisée par l’université jésuite de Rome, le Saint-Siège l’a soutenue largement. Car c’est bien toute l’Eglise, aussi bien universelle que locale, qui est impliquée. Devant la diversité des acteurs, aux cultures, aux vécus, aux expériences différentes, une seule réponse est quasi impossible. C’est pourquoi des représentants du monde entier et de toutes les aires culturelles seront présents.
Le Promoteur de justice de la Congrégation pour la doctrine de la foi, Mgr Scicluna, a bien précisé que c’était « un devoir de donner une réponse à chaque cas ». « Les paroles ne suffisent plus, elles doivent être traduites dans les textes de lois et bien sûr appliquées », a-t-il souligné.
Au-delà de l’approche proprement disciplinaire, les participants se rendront compte aussi combien la question du pardon est centrale pour les victimes. Marie Collins, une Irlandaise victime d’abus présente à la conférence de présentation, a bien précisé que pardonner est une chose, mais que demander le pardon en est une autre, tout aussi importante. Elle aura l’occasion de développer cette réflexion devant tous les représentants des conférences épiscopales.
Preuve que l’Eglise ne se contente pas de parler, un centre pour la protection des enfants, dont le siège sera à Munich en Allemagne, aidera via internet au moins pendant trois ans, et dès la fin du colloque, à créer des structures locales pour répondre le plus vite possible à tous les cas d’abus signalés. Ce centre de l’Institut de psychologie de l’université pontificale grégorienne, sera dirigé par le professeur Hubert Liebhardt. La Papal Foundation, dont toutes les opérations sont validées par Benoît XVI, a apporté sa contribution financière.








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