LA JEUNESSE BENINOISE S’EST RETROUVEE POUR LA MUSIQUE ET POUR LE PAPE
Un grand concert gratuit était organisé dans la soirée du vendredi 18 novembre dans
un stade d’un quartier populaire de Cotonou (Bénin), à l’initiative de Radio Vatican
et de la Radio-Télévision béninoise. Le début du concert avait été fixé à 20 heures,
dans le quartier populaire d’Akpakpa. À cet instant, les gradins qui entourent les
virages du stade René Pleven de Cotonou affichent déjà complet. Ils sont plongés dans
l’obscurité car, dans cette enceinte sportive aux allures de petit stade d’une modeste
équipe de Ligue 2 française, seule la tribune officielle est faiblement éclairée.
Aux abords du stade, un sable épais recouvre le sol, qui sert aussi d’étal à de nombreux
petits commerçants de fortune. Les gradins se trouvent bien loin de la scène où doit
se dérouler le vendredi 18 novembre un grand concert gratuit offert à la jeunesse
béninoise par Radio Vatican et la Radio Télévision béninoise, en cette soirée qui
conclut le premier jour de la visite de Benoît XVI en Afrique. Alors que les techniciens
procèdent encore aux derniers réglages, de nombreux jeunes sont attroupés derrière
les grillages, dans l’espoir de conquérir une meilleure place. Les deux écrans géants
installés sur la pelouse ne sont pas visibles depuis les gradins… Or, l’une des stars
de la musique africaine, le Congolais Papa Wemba, est annoncée, parmi d’autres vedettes
africaines qui doivent se succéder tout au long de la soirée. Pas question de rater
« le roi de la rumba », comme l’appelle Arcadius, menuisier de 28 ans. Si on le souhaite,
il peut chanter « dix morceaux » de cet artiste très apprécié ici mais, pour l’heure,
c’est d’une autre performance dont il veut s’enorgueillir. Sortant de sa poche son
téléphone portable, il montre fièrement l’enregistrement vidéo qu’il a effectué l’après-midi
même dans les rues de Cotonou : dans sa papamobile, Benoît XVI longe la foule en liesse
et passe tout près du jeune homme volubile. Ce soir, Arcadius, qui assiste régulièrement
à la messe à la paroisse du Sacré-Cœur de Cotonou, est aussi venu pour le pape. Comme
la plupart des jeunes présents, qu’ils soient musulmans ou affichent ostensiblement
leur attachement à la religion vaudou… C’est évidemment en l’honneur de Benoît
XVI qu’est organisé « ce concert pour la réconciliation et la paix », thèmes du Synode
pour l’Afrique en octobre 2009 à Rome. Il est 21 h 30 bien sonnés quand les deux animateurs
en donnent le coup d’envoi. L’ambiance est timide. Seuls quelques privilégiés ont
eu accès à la pelouse, devant la scène, et les applaudissements se perdent dans la
moiteur de la nuit. Martin, 24 ans, secrétaire dans une usine, ne cache pas sa déception
même s’il dit sa fierté qu’un pape vienne pour la troisième fois en Afrique, après
Jean-Paul II en 1982 et 1993. « Vous vous rendez compte ? Il fait spécialement le
voyage de Rome jusqu’à Cotonou et ensuite il repart… » C’est sans doute pour ne pas
décevoir Martin et tous ses jeunes camarades que l’un des deux animateurs lance soudain
un appel aux forces de sécurité pour qu’elles laissent entrer les jeunes sur la pelouse.
Comme par enchantement, une heure après le début du concert, les issues ouvrant sur
le gazon laissent déverser un flot de spectateurs qui se précipitent avec un enthousiasme
tout juvénile. Dans la tribune, on commence à se déhancher sur les sièges en plastique
pendant que de très jeunes filles passent dans les rangs pour vendre des rafraîchissements
et autres confiseries, d’immenses paniers juchés sur la tête. Entre deux chansons
de Papa Wemba, le P. Federico Lombardi, directeur de la salle de presse du Saint-Siège
et de Radio Vatican, est monté sur la scène. Il assure la promotion de l’album produit
par sa station en faveur « de la justice et de la paix » et redit le sens de la présence
de Benoît XVI au Bénin : « Le pape est venu ici pour délivrer un grand message à toute
l’Afrique. C’est la conclusion du long chemin de l’Église avec le continent. ». Arcadius,
lui, ne veut pas en rester là. « Nous voulons qu’il revienne une nouvelle fois pour
nous apporter des mots de justice et de paix. L’Afrique en a tant besoin. » Dans le
stade, plus de deux heures après le début des festivités, la musique électrise le
stade. La présentatrice avait prévenu : « nous serons là jusqu’au bout de la nuit
». BRUNO BOUVET (du Journal La Croix, envoyé spécial à Cotonou)