Les chrétiens du Bénin invités à une foi authentique et vivante
Texte intégral du discours prononcé par le Pape Benoît XVI, le samedi 19 novembre,
au séminaire Saint-Gall de Ouidah, au cours de sa rencontre avec la communauté ecclésiale
du Bénin.
Messieurs les Cardinaux, Monseigneur N’Koué, responsable
de la formation sacerdotale, chers frères dans l’épiscopat et le sacerdoce, chers
religieux et religieuses, chers séminaristes et chers fidèles laïcs, Merci
Monseigneur N’Koué pour vos belles paroles, et merci cher séminariste pour les vôtres
qui sont si accueillantes et déférentes. C’est une grande joie pour moi de me retrouver
au milieu de vous ici, à Ouidah, et plus particulièrement dans ce séminaire mis sous
la protection de sainte Jeanne d’Arc et dédié à saint Gall, homme aux vertus éclatantes,
moine désireux de perfection, pasteur plein de douceur et d’humilité. Quoi de plus
noble que d’avoir comme modèle sa figure, ainsi que celle de Monseigneur Louis Parisot,
apôtre infatigable des pauvres et promoteur du clergé local, celle du Père Thomas
Moulero, premier prêtre du Dahomey d’antan, et celle du Cardinal Bernardin Gantin,
fils éminent de votre terre et humble serviteur de l’Église ? Notre rencontre
de ce matin me donne l’occasion de vous exprimer directement ma gratitude pour votre
engagement pastoral. Je rends grâce à Dieu pour votre zèle, malgré les conditions
parfois difficiles dans lesquelles vous êtes appelés à témoigner de son amour. Je
le remercie pour tant d’hommes et tant de femmes qui ont annoncé l’Évangile en terre
béninoise, comme dans toute l’Afrique. Tout à l’heure, je vais signer l’Exhortation
apostolique post-synodale Africae munus. Il y sera question de paix, de justice et
de réconciliation. Ces trois valeurs s’imposent comme un idéal évangélique fondamental
à la vie baptismale et elles requièrent une saine acceptation de votre identité de
prêtre, de personne consacrée et de fidèle laïc. Chers prêtres, la responsabilité
de la promotion de la paix, de la justice et de la réconciliation, vous incombe d’une
manière toute particulière. À cause de l’Ordre sacré reçu et des Sacrements célébrés,
vous êtes appelés en effet à être des hommes de communion. De même que le cristal
ne retient pas la lumière, mais la réfléchit et la redonne, de même le prêtre doit
laisser transparaître ce qu’il célèbre et ce qu’il reçoit. Je vous encourage donc
à laisser transparaître le Christ dans votre vie par une vraie communion avec l’Évêque,
par une réelle bonté pour vos confrères, par une profonde sollicitude pour chaque
baptisé et par une grande attention pour toute personne. En vous laissant modeler
par le Christ, vous ne substituerez jamais à la beauté de votre être sacerdotal des
réalités éphémères parfois malsaines que la mentalité contemporaine tente d’imposer
à toutes les cultures. Je vous exhorte, chers prêtres, à ne pas sous-estimer la grandeur
insondable de la grâce divine déposée en vous et qui vous habilite à vivre au service
de la paix, de la justice et de la réconciliation. Chers religieux et chères religieuses,
de vie active ou contemplative, la vie consacrée est une suite radicale de Jésus.
Que votre choix inconditionnel du Christ vous conduise à un amour sans frontière pour
le prochain! La pauvreté et la chasteté vous rendent vraiment libres pour obéir inconditionnellement
au seul Amour qui, quand il vous saisit, vous porte à le répandre partout. Pauvreté,
obéissance et chasteté creusent en vous la soif de Dieu et la faim de sa Parole, qui,
en grandissant, se muent en faim et soif pour servir le prochain en mal de justice,
de paix et de réconciliation. Fidèlement vécus, les conseils évangéliques vous transforment
en frère universel ou en sœur de tous, et vous aident à marcher résolument sur la
voie de la sainteté. Vous y arriverez si, convaincus que, pour vous, vivre, c’est
le Christ (cf. Ph 1, 21), vous faites de vos communautés des reflets de la gloire
de Dieu et des lieux où vous n’avez de dettes envers personne, sinon celle de l’amour
mutuel (cf. Rm 13, 8). Par vos charismes propres vécus avec un esprit d’ouverture
à la catholicité de l’Église, vous pourrez contribuer à une expression harmonieuse
de l’immensité des dons divins au service de toute l’humanité ! M’adressant maintenant
à vous, chers séminaristes, je vous encourage à vous mettre à l’école du Christ pour
acquérir les vertus qui vous aideront à vivre le sacerdoce ministériel comme le lieu
de votre sanctification. Sans la logique de la sainteté, le ministère n’est qu’une
simple fonction sociale. La qualité de votre vie future dépend de la qualité de votre
relation personnelle avec Dieu en Jésus-Christ, de vos sacrifices, de l’heureuse intégration
des exigences de votre formation actuelle. Face aux défis de l’existence humaine,
le prêtre d’aujourd’hui comme celui de demain - s’il veut être un témoin crédible
au service de la paix, de la justice et de la réconciliation - doit être un homme
humble et équilibré, sage et magnanime. Après 60 ans de vie sacerdotale, je peux vous
confier, chers séminaristes, que vous ne regretterez pas d’avoir accumulé durant votre
formation des trésors intellectuels, spirituels et pastoraux. Quant à vous, chers
fidèles laïcs qui, au cœur des réalités quotidiennes de la vie, êtes appelés à être
le sel de la terre et la lumière du monde, je vous exhorte à renouveler vous aussi
votre engagement pour la justice, la paix et la réconciliation. Cette mission requiert
d’abord une foi en la famille bâtie selon le dessein de Dieu et une fidélité à l’essence
même du mariage chrétien. Elle exige aussi que vos familles soient comme de véritables
« églises domestiques ». Grâce à la force de la prière, « la vie personnelle et familiale
se transforme et s’améliore, le dialogue s’enrichit, la foi se transmet aux enfants,
la joie d’être ensemble s’amplifie, le foyer se rassemble et se consolide sans cesse
» (Message pour la rencontre mondiale des familles à Mexico, le 17 janvier 2009, n.
3). En faisant régner dans vos familles l’amour et le pardon, vous contribuerez à
l’édification d’une Église belle et forte, et à l’avènement de plus de justice et
de paix dans la société entière. En ce sens, je vous encourage, chers parents, à avoir
un respect profond pour la vie et à témoigner devant vos enfants de valeurs humaines
et spirituelles. Et il me plaît de rappeler ici que, voici 10 ans, le Pape Jean-Paul
II a fondé à Cotonou une section pour l’Afrique francophone de l’Institut qui porte
son nom, afin de contribuer à la réflexion théologique et pastorale sur le mariage
et la famille. Enfin, j’exhorte spécialement les catéchistes, ces vaillants missionnaires
au cœur des réalités les plus humbles, à offrir toujours, avec une espérance et une
détermination indéfectibles, leur aide singulière et absolument nécessaire à l’expansion
de la foi dans la fidélité à l’enseignement de l’Église (cf. Ad gentes, n. 17).
Pour conclure mon entretien avec vous, je voudrais vous exhorter tous à une foi authentique
et vivante, fondement inébranlable d’une vie chrétienne sainte et au service de l’édification
d’un monde nouveau. L’amour pour le Dieu révélé et pour sa Parole, l’amour pour les
sacrements et pour l’Église, sont un antidote efficace contre des syncrétismes qui
égarent. Cet amour favorise une juste intégration des valeurs authentiques des cultures
dans la foi chrétienne. Il libère de l’occultisme et vainc les esprits maléfiques,
car il est mû par la puissance même de la Sainte Trinité. Vécu profondément, cet amour
est aussi un ferment de communion qui brise toute barrière, favorisant ainsi l’édification
d’une Église dans laquelle il n’y a pas de ségrégation entre les baptisés, car tous
ne font qu’un dans le Christ Jésus (cf. Ga 3, 28). Avec grande confiance, je compte
sur chacun de vous, prêtres, religieux et religieuses, séminaristes et fidèles laïcs,
pour faire vivre une telle Église. En gage de ma proximité spirituelle et paternelle,
et vous confiant à la Vierge Marie, j’invoque sur vous tous, sur vos familles, les
jeunes et les malades, l’abondance des Bénédictions divines ! (en fon) AKLUNƆ
NI KƆN FƐNU TƆN LƐ DO MI JI (Que le Seigneur vous comble de ses grâces !)