Les tensions entre le Vatican et Dublin montent d'un cran. Le point.
Le premier ministre irlandais, Enda Kenny, a prononcé ce mercredi devant la chambre
basse du parlement un réquisitoire extrêmement sévère contre le Vatican, dans le dossier
des abus sexuels sur des mineurs commis dans l’Église. Une semaine après la publication
d’un 4° rapport qui épingle la hiérarchie du diocèse de Clyone, Enda Kenny a reproché
au Saint-Siège les « dysfonctionnement, la déconnection, l’élitisme et même le narcissisme
qui dominent la culture du Vatican». Le premier ministre a lancé de graves accusations
contre le Saint-Siège qui aurait, selon lui, « tenté de bloquer une enquête en cours
dans un État souverain, démocratique et républicain », soutenant que cela s’est produit
« il y a trois ans et pas trente ». Enda Kenny est allé jusqu’à affirmer que « le
viol et la torture des enfants avaient été minimisés pour soutenir le primat des institutions,
leur pouvoir et leur réputation ». Dans une réaction qui n'a pas tardé, l'archevêque
de Dublin, Mgr Diarmuid Martin, a tenu a ramené l'attention sur les victimes et leur
souffrance. Dans un entretien sur la radio nationale RTE, Mgr Martin a reconnu qu'à
Cloyne ils avaient ignoré les normes édictées par le Pape en 2001, mais que lui personnellement
il avait remis 70.000 documents à la Murphy Commission of Inquiry, et dénoncé tous
les cas de déclarations d'abus à la police irlandaise. Mgr Martin a alors précisé
que jamais il n'avait été rappelé à l'ordre par le Vatican pour cette collaboration,
et que donc ces normes sont importantes. Il ajoutait: "Le Vatican bien évidemment
tient à défendre sa position, mais s'oppose tout aussi fortement à la violence physique
sur les enfants". Mgr Diarmuid Martin a enfin mis en garde contre toute rupture
dans la collaboration entre les acteurs de société civile. "Il nous faut tous travailler
ensemble, pour protéger vraiment les enfants". Mardi, le Père Federico Lombardi,
Directeur de Radio Vatican et du Bureau de presse du Saint-Siège, avait précisé pour
sa part que la « prétendue tentative d’ingérence du Saint-Siège » était une lettre
de 1997 adressée par le nonce en Irlande à la Conférence épiscopale sur la base des
informations reçues par la Congrégation pour le Clergé. Le texte relevait que le document
« Child Sexual Abuse : Framework for a Church Response » (Abus sexuels sur des
enfants : structure d'une réponse de l'Église) contenait des aspects incompatibles
avec la loi canonique universelle. Il mettait en garde contre le risque de prendre
des mesures qui se révèleraient ensuite contestables ou invalides d’un point de vue
canonique. En conséquence : 1) la lettre d’invitait pas à ne pas respecter les lois
du pays, puisqu’il s’agissait des lois de l'Église qui font partie des compétences
romaines ; 2) cette lettre ne contenait pas d’invitation à occulter les cas d’abus. Le
Père Lombardi s’est étonné de la virulence de certaines critiques adressées au Vatican,
« Comme si le Saint-Siège était coupable de ne pas avoir donné valeur de loi canonique
à des normes auxquelles un État n’avait pas jugé nécessaire de donner valeur de loi
civile ! » Les accusations proférées par le premier ministre vont bien au-delà
des affirmations du dernier rapport sur le diocèse de Cloyne. Par ailleurs, elles
ne tiennent pas compte des efforts déployés par le Saint-Siège pour affronter ce problème
*Ancien
instituteur et leader du parti centriste Fine Gael, Enda Kenny a été nommé premier
ministre, à l’issue des élections législatives du 25 février dernier qui ont redessiné
la carte politique du pays, confronté à une grave crise économique.
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précédents sur ce même sujet Une semaine après la publication d’un nouveau
dossier accablant sur les affaires de pédophilie, dans le diocèse de Cloyne, dans
le sud-est de l’Irlande, le directeur du Bureau de presse du Vatican est intervenu
mardi sur Radio Vatican à propos de cette affaire accablante. Le Père Federico Lombardi
s’est exprimé à titre personnel pour souligner une fois encore le long et difficile
travail entamé par l’Eglise d’Irlande pour se purifier. Bernard Decottignies
Une nouvelle
tourmente s’est abattue sur l’Église irlandaise avec la publication, le mercredi 13
juillet 2011, d’un nouveau dossier accablant sur les affaires de pédophilie, dans
le diocèse de Cloyne, dans le sud-est de l’Irlande. Il s’agit du quatrième rapport
concernant les abus sexuels commis au sein de l’Église catholique en Irlande. Les
conclusions concernent notamment des actes de pédophilie commis par 19 prêtres du
diocèse de Cloyne. Le cardinal Sean Brady, primat d’Irlande, a déclaré qu’il s’agissait
d’un autre « jour très sombre dans l’histoire de la réponse que les chefs de l’Église
ont apporté au cri des enfants abusés par des membres du clergé ». Hélène Destombes
a recueilli la réaction du père Arthur O'Neill prêtre du diocèse de Dublin
Le rapport,
de 400 pages, publié par les ministres de la justice et de l’enfance fait état de
négligences et d’omissions et met en cause directement une figure de proue du clergé
irlandais, Mgr John Magee, secrétaire personnel de trois Papes, Paul VI, Jean-Paul
1er et Jean-Paul II, au début de son pontificat, puis maître des cérémonies pontificales,
avant de devenir évêque de Cloyne ; Mgr John Magee, démissionnaire en 2009. Les explications
de Xavier Sartre
Le ministre
irlandais des affaires étrangères a convoqué le nonce apostolique à Dublin, Mgr Giuseppe
Leanza, pour lui faire part de son inquiétude au sujet de l’attitude de l’Église dans
le dossier des abus sexuels sur des mineurs, au lendemain de la publication d’un nouveau
rapport accablant. Le ministre a déclaré devant le Parlement qu’il partageait l’indignation
soulevée par cette nouvelle enquête, et il a reproché à l’Église catholique d’avoir
trahi la confiance de la population et de la société. Selon des propos rapportés par
l’AFP, il juge « inacceptable l’intervention du Vatican qui a pu conduire des prêtres
à penser qu’ils pourraient fuir leurs responsabilités ». Le premier ministre irlandais
a parlé pour sa part de comportement absolument scandaleux. Au cours des dernières
heures, plusieurs évêques ont pris la parole publiquement pour exprimer leur douleur
et leur angoisse. (source agences AFP ANSA)