Syrie : la fuite en avant de l'appareil sécuritaire
La France est prête à demander au Conseil de sécurité de l'ONU le vote d'une résolution
condamnant la répression en Syrie, malgré la menace d'un veto russe. Pour le ministre
français des affaires étrangères, Alain Juppé, « Bachar al-Assad a perdu sa légitimité
à la tête du pays » où « le processus de réformes est mort ». Alors que le ministre
britannique des Affaires étrangères William Hague laisse encore une chance à Bachar
Al-Assad en affirmant qu’il doit faire des réformes ou partir.
Sur le terrain,
le mouvement de contestation qui se poursuit depuis près de trois mois, aurait fait
selon des ONG plus de 1.100 tués parmi les civils, dont des dizaines d'enfants. Mais
les forces de sécurité seraient peut-être entrain de vaciller. Dimanche dernier dans
le nord ouest du pays, des policiers auraient été tués pour avoir refusé de tirer
sur des manifestants. Les autorités syriennes affirment, pour leur part, que 120 policiers
ont été tués par des hommes armés non identifiés. Des renforts de l’armée ont été
envoyés sur place et le sang pourrait bien encore couler. Analyse d’un pays où
l’appareil sécuritaire, cœur du pouvoir, est en train de basculer dans la fuite en
avant, avec Peter Harling, directeur de projet à l’International Crisis Group, basé
à Damas, interrogé par Olivier Bonnel
« Bouleversés
» par les événements récents qui ont ensanglanté la Syrie, les jésuites présents dans
le pays ont invité toutes les parties à rejeter la violence, dans un document signé
à Damas le 3 juin dernier. « Depuis quelques mois, surgissent dans notre pays,
comme dans la plupart des pays arabes, des revendications de réformes des structures
politiques et sociales », affirment-ils. « De telles revendications sont un droit
légitime et reconnu pour tous, permettant à chaque citoyen d'être un acteur de la
transformation de cette société ». Malheureusement, estiment les jésuites, « c'est
la confusion qui a pris le dessus, ouvrant la voie à la violence ». « Nous observons
en ce moment des tentatives visant à fomenter des troubles et une guerre confessionnelle
qui mèneraient à l'effritement de notre société », affirment-ils. Ils déplorent
aussi des « événements sanglants dont l'intensité, la dureté et la violence augmentent
de semaine en semaine, et qui font des victimes innocentes ». Face à cela, « nous
ne pouvons que pousser un cri d'appel à la conscience de nos concitoyens, quelle que
soit leur appartenance ». Tout en rappelant l'importance de « la liberté d'expression
» et de « la liberté d'opinion », ils rappellent que « la véritable paix nationale
ne peut pas se construire par le rejet d'une partie de la population contre une autre
; elle suppose tout au contraire une véritable vie en commun ». Pour dépasser cette
« situation douloureuse » et « aboutir à une tentative de dialogue sincère entre toutes
les parties », les Jésuites en Syrie invitent à la confiance et à l'écoute. Ils invitent
néanmoins à ne pas se laisser entraîner « par différents canaux d'informations tendancieuses
». «Le chrétien adulte est un acteur efficace dans la constitution d'une opinion publique
modérée, condition essentielle pour une réforme réussie », affirment-ils. Rejeter
la violence « Nous appelons les Syriens de tous bords à se mobiliser sans tarder
pour construire un dialogue national sincère en vue d'une issue à cette crise ». «
Nous refusons, affirment-il enfin, d'entrer dans le cercle vicieux qui engendre la
peur de l'autre et étouffe toutes les bonnes intentions qui cherchent à édifier la
patrie ». « Chaque croyant doit purifier son coeur du mépris et de la haine ainsi
que de la peur qui justifierait pour lui l'appel à l'usage de la violence ». Il doit
être « un élément efficace dans la réalisation de l'unité nationale ».