La liberté religieuse, fil conducteur du discours de Benoît XVI au corps diplomatique
Dans la salle Royale, ce lundi 10 janvier, Benoît XVI a reçu le corps diplomatique
accrédité près le Saint-Siège pour l’échange des vœux, comme c’est la tradition en
début d’année. Cette rencontre est l’un des rendez-vous les plus attendus de l’année,
scruté à la loupe, par les journalistes, les diplomates, les experts, car elle permet
de décrypter les priorités du Saint-Siège en matière de politique internationale.
L’année dernière, Benoît XVI avait repris devant le corps diplomatique le thème de
son message pour la Journée mondiale de la paix, celui de la protection de création.
Et cette année il a choisi de revenir sur les atteintes à la liberté religieuse, lésée
ou niée dans plusieurs pays du monde, et sur le problème plus sournois de la négation
de Dieu et de la marginalisation du phénomène religieux qui occupe, dernièrement,
une place prédominante dans ses interventions. Le Pape s'est dit notamment accablé
par les attentats contre les chrétiens d'Irak et d'Egypte. Écoutez le compte-rendu
de Xavier Sartre
Extraits
du discours du Pape L’humanité, dans toute son histoire, à travers ses croyances
et ses rites, a souligné le Pape devant des représentants du monde entier, montre
une incessante recherche de Dieu. La dimension religieuse est une caractéristique
indéniable et incoercible de l’être et de l’agir de l’homme, la mesure de la réalisation
de son destin et de la construction de la communauté à laquelle il appartient. Par
conséquent, quand l’individu lui-même ou ceux qui l’entourent négligent ou nient cet
aspect fondamental, se créent des déséquilibres et des conflits à tous les niveaux,
aussi bien au plan personnel qu’au plan interpersonnel. La paix, de fait, se construit
et se conserve seulement quand l’homme peut librement chercher et servir Dieu dans
son cœur, dans sa vie et dans ses relations avec les autres. Or, la liberté religieuse,
le premier des droits, est trop souvent mis en discussion ou violé. Dans son discours,
le Pape constate que la société, ses responsables et l’opinion publique se rendent
compte aujourd’hui davantage, même si ce n’est pas toujours de façon exacte, de cette
grave blessure portée contre la dignité et la liberté de l’homo religiosus, même si
ce n’est pas toujours de façon exacte. Benoît XVI a évoqué en particulier les communautés
chrétiennes du Moyen-Orient, si éprouvées à cause de leur adhésion au Christ et à
l’Eglise, les attentats qui ont semé mort, douleur et désarroi parmi les chrétiens
d’Iraq, au point de les inciter à quitter la terre où leurs pères ont vécu pendant
des siècles. Le Pape a renouvelé aux Autorités de ce pays et aux chefs religieux
musulmans son appel anxieux à œuvrer afin que leurs concitoyens chrétiens puissent
vivre en sécurité et continuer à apporter leur contribution à la société dont ils
sont membres à plein titre. En Egypte aussi, à Alexandrie, le terrorisme a frappé
brutalement des fidèles en prière dans une église. Cette succession d’attaques est
un signe de plus de l’urgente nécessité pour les Gouvernements de la Région d’adopter,
malgré les difficultés et les menaces, des mesures efficaces pour la protection des
minorités religieuses. Benoît XVI a salué l’attention pour les droits des plus faibles
et la clairvoyance politique dont certains pays d’Europe ont fait preuve ces derniers
jours, en demandant une réponse concertée de l’Union Européenne afin que les chrétiens
soient défendus au Moyen-Orient. Pour ce qui concerne les Etats de la Péninsule Arabique,
où vivent de nombreux travailleurs immigrés chrétiens, le Pape a souhaité que l’Eglise
catholique puisse disposer des structures pastorales appropriées. Je demande - a-t-il
dit - que soit garantie partout aux communautés catholiques la pleine autonomie d’organisation
et la liberté d’accomplir leur mission, conformément aux normes et standards internationaux
en ce domaine.
Benoît XVI a par ailleurs demandé l'abrogation de la loi sur
le blasphème au Pakistan et il n'a pas manqué de tourner ses pensées vers la communauté
catholique de la Chine continentale et ses Pasteurs, qui vivent un moment de difficulté
et d’épreuve. Par ailleurs, il a adressé une parole d’encouragement aux Autorités
de Cuba, pays qui a célébré en 2010 soixante-quinze ans de relations diplomatiques
ininterrompues avec le Saint-Siège, afin que le dialogue qui s’est heureusement instauré
avec l’Eglise se renforce encore et s’élargisse. Le Pape a évoqué les atteintes plus
sournoises à la liberté religieuse constatées en Occident, plaidant notamment en faveur
de l'objection de conscience.
Enfin, en cette circonstance solennelle, le Pape
a voulu expliciter quelques principes dont le Saint-Siège, avec toute l’Eglise catholique,
s’inspire dans son activité auprès des Organisations Internationales intergouvernementales,
afin de promouvoir le plein respect de la liberté religieuse pour tous. En premier
lieu, c’est la conviction que l’on ne peut créer une sorte d’échelle dans la gravité
de l’intolérance envers les religions. Malheureusement, une telle attitude est fréquente,
et ce sont précisément les actes discriminatoires contre les chrétiens qui sont considérés
comme moins graves, moins dignes d’attention de la part des gouvernements et de l’opinion
publique. En même temps, on doit aussi refuser le contraste périlleux que certains
veulent instaurer entre le droit à la liberté religieuse et les autres droits de l’homme,
oubliant ou niant ainsi le rôle central du respect de la liberté religieuse dans la
défense et la protection de la haute dignité de l’homme. Moins justifiables encore
sont les tentatives d’opposer au droit à la liberté religieuse de prétendus nouveaux
droits, activement promus par certains secteurs de la société et insérés dans des
législations nationales ou dans des directives internationales, mais qui ne sont,
en réalité, que l’expression de désirs égoïstes et ne trouvent pas leur fondement
dans l’authentique nature humaine. Enfin, il faut affirmer qu’une proclamation abstraite
de la liberté religieuse n’est pas suffisante : cette norme fondamentale de la vie
sociale doit trouver application et respect à tous les niveaux et dans tous les domaines;
autrement, malgré de justes affirmations de principe, on risque de commettre de profondes
injustices à l’égard des citoyens qui souhaitent professer et pratiquer librement
leur foi.